La subrogation personnelle, entendue au sens des articles 1249 et suivants du Code Civil, est un mécanisme qui opère, comme le ferait bien que d'une façon différente une cession de créance, une substitution du créancier. Or, si les effets de la subrogation ont toujours été clairement définis en ce qui concerne le créancier subrogé, qu'en est-il à l'égard du débiteur ? C'est sa situation en présence d'une telle subrogation que la Cour de Cassation va s'attacher à recadrer dans un arrêt rendu par sa Chambre Commerciale en date du 3 avril 1990.
En l'espèce, la société SFF avait procédé, en exécution d'un contrat d'affacturage au règlement de factures à la société STAIC au titre d'une créance que cette dernière détenait sur la société Debeaux. Comme il en est d'usage et même de principe en matière d'affacturage, le factor, à savoir la société SFF, s'est donc trouvée par conséquence subrogée dans les droits du créancier originaire la société STAIC quant à sa créance envers ladite société Debeaux. Une telle subrogation constitue en ceci le fondement de l'affacturage que le factor assume ainsi le risque de solvabilité du client certes, mais pas celui de non- paiement.
La société SFF, désireuse de voir sa créance acquittée, en a donc réclamé le paiement à la société Debeaux, mais se vit cependant opposer par cette dernière la compensation de ladite créance avec une créance qu'elle détenait elle-même sur la société STAIC, ce pourquoi la société SFF a intenté une action en justice. La Cour d'Appel de Grenoble, dans un arrêt rendu le 9 novembre 1988, s'est rangée aux côtés de la société Debeaux, estimant que si la compensation devait se produire antérieurement à la compensation pour être opposable, cette limite n'était effective « qu'autant que le débiteur ait été régulièrement informé du transfert de la propriété des créances au facteur », ce qui n'était pas le cas en l'espèce ; arrêt suite auquel la société SFF a formé un pourvoi en Cassation. La Cour de Cassation quant à elle, réunie en sa formation Commerciale, a fait droit, dans un arrêt qui se veut étonnant de clarté, à la demande de cette dernière, procédant en ceci à une cassation de l'arrêt d'appel précité pour violation de la loi.
La question à laquelle il lui convenait de répondre dans cette affaire était donc celle de savoir dans quelle mesure un débiteur est-il en droit d'opposer une exception de compensation au créancier subrogé.
Si la Haute Juridiction s'est alors au premier plan attelée à rappeler les conditions d'opposabilité des exceptions disponibles au débiteur dans le cadre global qu'est celui de la subrogation (I), il apparaît que la réponse qu'elle nous fournit en l'espèce tende à avoir un impact beaucoup plus vaste en particulier sur l'opposabilité à l'égard du débiteur de la subrogation elle-même (II).
[...] La question à laquelle il lui convenait de répondre dans cette affaire était donc celle de savoir dans quelle mesure un débiteur est-il en droit d'opposer une exception de compensation au créancier subrogé. Si la Haute Juridiction s'est alors au premier plan attelée à rappeler les conditions d'opposabilité des exceptions disponibles au débiteur dans le cadre global qu'est celui de la subrogation il apparaît que la réponse qu'elle nous fournit en l'espèce tende à avoir un impact beaucoup plus vaste en particulier sur l'opposabilité à l'égard du débiteur de la subrogation elle-même (II). [...]
[...] Selon cet article en effet, le cessionnaire n'est saisi à l'égard des tiers que par la signification du transport faite au débiteur ce qui revient à dire que la cession de créance n'est considérée comme opposable qu'à compter de la date à laquelle le débiteur en aura été informé. En matière de subrogation conventionnelle en revanche, il semble de longue date considéré que l'opposabilité du transfert de la créance intervienne de plein droit, c'est-à-dire en l'absence de toute formalité. C'est effectivement ce que la jurisprudence avait déjà pu estimer à travers deux arrêts d'une part de la Chambre Commerciale en date du 13 juillet 1954, d'autre part de la Première Chambre Civile en date du 12 octobre 1984, et c'est ce que la Haute Juridiction nous rappelle ici avec grande insistance. [...]
[...] par exemple Com juin 1992. Cf. CA Paris 17 novembre 1995. Bull. IV 230. Rec. [...]
[...] Cf. par exemple A. Bénabent, Droit Civil Les obligations, 10e éd. 728. Cf. Com mai 1995, JCP 1995.II.22448. [...]
[...] Certes l'arrêt de la Chambre Commerciale du 3 avril 1990, nous délivrant de nombreuses informations sur la situation du débiteur face à une subrogation conventionnelle, s'attache à réaffirmer l'absence de formalisme légal qui régit l'opposabilité de ladite subrogation envers le débiteur. Mais il semble toutefois que ce principe soit aujourd'hui limité à la seule hypothèse de l'invocation d'une exception de compensation, l'information du débiteur à cet effet étant sinon requise, du moins fortement conseillée. Bull. Civ IV, 308, rendu toutefois en présence de créances connexes. [...]
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