Le Conseil d'État a, au cours de la dernière décennie, esquissé par voie prétorienne les contours précis d'un droit pénitentiaire plus protecteur des droits fondamentaux des détenus. Une série de décisions récentes (notamment des décisions du 17 décembre 2008) illustre ce contrôle de plus en plus large du juge administratif sur l'administration en matière pénitentiaire – contrôle par lequel le Conseil d'État, dans des décisions du 17 décembre 2008, a admis que la faute simple suffit à engager la responsabilité de l'État en cas de décès accidentel d'un détenu, qu'une mesure de placement à l'isolement à titre préventif puisse faire l'objet de recours...
La décision commentée aujourd'hui, rendue par la sixième sous-section du Conseil d'État dans un arrêt Section française de l'Observatoire international des prisons, du 31 octobre 2008, vient annuler certaines dispositions du décret simple du 21 mars 2006 modifiant le code de procédure pénale et relatif à l'isolement des détenus.
L'isolement des détenus, c'est quoi? C'est une mesure de protection ou de sécurité (ce n'est pas une mesure disciplinaire selon l'article D 283-1-2) prononcée par l'administration, pour une période de trois mois renouvelable jusqu'à deux ans, et ce peut être à la demande d'un détenu. Le but étant de maintenir l'ordre carcéral. L'isolement administratif touchait au 1er août 2008 435 détenus.
[...] Or, la liste de l'article 186 ne comprend pas les dispositions de l'article D 56-1. Le pouvoir réglementaire ne pouvait prévoir l'application du régime de l'isolement judiciaire tant que le législateur n'avait pas institué une voie de recours effectif. L'alinéa 4 de l'article du CPP est donc annulé en l'absence d'un tel recours, dans la lignée de la décision Remli qui a mis fin à l'immunité juridictionnelle des décisions de mise à l'isolement admnistratif (c'est l'ancienne jurisprudence Fauqueux). La Cour avait notamment condamné la France dans l'arrêt Ramirez-Sanchez du 4 juillet 2006 (sous la jurisprudence Fauqueux) pour l'absence de voie de recours pour contester les mesures de prolongation de l'isolement: compte tenu des répercussions d'une mise à l'isolement prolongée pour le détenu, un recours effectif est indispensable Deux solutions sont proposées par Mattias Guyomar: soit modifier la disposition transversale du CPP afin qu'elle y inclue les décisions prises sur le fondement de l'article 715, soit créer une voie de recours ad hoc. [...]
[...] Le décret du 9 mai 2007 a d'ailleurs prévu que le mineur de 16 ans prévenu ne peut faire l'objet d'une mesure d'isolement et l'article D 283-1 du CPP exclut expressément les mineurs (remplacement par une mesure de protection individuelle art D 520) II/ Malgré une jurisprudence plus protectrice, la France est toujours régulièrement pointée du doigt pour la situation dégradée du système pénitentiaire. Des pistes de solution existent toutefois pour améliorer l'effectivité des droits fondamentaux des détenus Dire que les droits fondamentaux sont garantis dans les prisons, c'est nier la réalité singulière de l'univers carcéral. [...]
[...] A la lumière de l'arrêt rendu par le Conseil d'État le 31 octobre 2008, les droits fondamentaux sont-ils garantis dans les prisons françaises? Le Conseil d'État au cours de la dernière décennie, esquissé par voie prétorienne les contours précis d'un droit pénitentiaire plus protecteur des droits fondamentaux des détenus. Une série de décisions récentes (notamment des décisions du 17 décembre 2008) illustre ce contrôle de plus en plus large du juge administratif sur l'administration en matière pénitentiaire contrôle par lequel le Conseil d'État, dans des décisions du 17 décembre 2008, a admis que la faute simple suffit à engager la responsabilité de l'État en cas de décès accidentel d'un détenu, qu'une mesure de placement à l'isolement à titre préventif puisse faire l'objet de recours . [...]
[...] C'est une mesure plus rare (au 1er septembre 2008, seuls 39 prévenus faisaient l'objet d'une telle mesure), mais sur le fond le régime est identique à celui de l'isolement administratif. Le détenu ou prévenu conserve les mêmes droits et devoirs sa situation juridique n'est pas affectée (il conserve ses droits à la correspondance, aux visites, à l'exercice du culte mais il est évident que les conditions matérielles de détention sont aggravées puisque le détenu ne peut participer aux promenades et activités collectives. [...]
[...] Le juge administratif a recherché un équilibre entre les impératifs liés à cet univers spécifique qu'est la prison et la garantie des droits fondamentaux des détenus. Ainsi, le Conseil d'Etat a reconnu que certains actes pouvaient être contestés devant le juge administratif: comme le refus de respecter le secret des correspondances entre le détenu et son avocat (la décision du 12 mars 1980, Centre hospitalier spécialisé de Sarreguemines); ou les décisions relatives au nombre et à l'espacement des repas des détenus (arrêt du 15 janvier 1992, C.) Le champ des mesures intérieures s'est donc progressivement réduit. [...]
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