Dans son arrêt rendu le 30 juin 2000, le Conseil d'Etat estime que « le film Baise-moi est composé pour l'essentiel d'une succession de scènes de grande violence et de scènes de sexe non simulées, sans autre que les autres séquences traduisent l'intention affichée par les réalisatrices, de dénoncer la violence faite aux femmes par la société ». Le Conseil d'Etat admet de fait que le film constitue un message pornographique et d'incitation à la violence susceptible d'être vu ou perçu par des mineurs et qui pourrait relever des dispositions de l'article 227-24 du code pénal. Par conséquent, le Conseil reconnaît qu' « en se bornant à assortir le visa d'exploitation du film Baise-moi d'une interdiction aux mineurs de moins de seize ans et d'un avertissement, le ministre de la culture et de la communication a entaché sa décision du 22 juin 2000 d'excès de pouvoir ».
Si le Conseil d'Etat effectue un contrôle traditionnel (I) il a également entendu l'élargir (II).
[...] En général, le contrôle de l'exactitude matérielle des faits (CE 14 janv Camino) constitue comme celui de l'erreur de droit, de l'erreur manifeste d'appréciation et du détournement de pouvoir, le contrôle minimum qu'exerce le juge de l'excès de pouvoir, même à l'égard des actes pour lesquels l'administration détient un pouvoir discrétionnaire (CE 26 janv Ministre de la santé Prat). Et le Conseil d'Etat ne peut apprécier l'opportunité des mesures qui lui sont déférés par la voie du recours en excès de pouvoir (CE 20 oct Société civile Sainte-Marie de l'Assomption). [...]
[...] Ce contrôle n'a eu de cesse de s'étendre depuis son existence. On peut noter qu'antérieurement au présent arrêt, la Haute juridiction avait pu juger que les mesures de classement de films dans le genre pornographique ou de violence extrême sont assujetties à un entier contrôle de la part du juge. La jurisprudence, riche en la matière, a même pu annuler un tel classement pour la simple et bonne raison que le film litigieux ne comprenait pas de scènes obscènes (CE 13 juillet 1979, Société des productions du Chesne). [...]
[...] L'arrêt qui nous est soumis confirme la volonté du Conseil d'Etat de veiller au respect de la dignité humaine qui rejoint de fait la notion de moralité publique. Pour ce faire, la Haute juridiction s'est basée sur la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que sur la Convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990. Cependant, si ces textes sont visés par les visas de l'arrêt, ceux-ci n'ont pas à eux seuls justifiés la décision du Conseil. [...]
[...] Cette citation sied parfaitement à l'arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 30 juin 2000 suite à une requête présentée par l'association Promouvoir. Cette association de défense des valeurs judéo-chrétiennes et de la famille, basée à Carpentras dans le Vaucluse en effet, saisi le 21 juin 2000 la Haute juridiction d'une demande de sursis à exécution et d'annulation de la décision du ministre de la culture et de la communication d'accorder un visa d'exploitation assorti seulement d'une interdiction de diffusion du film aux mineurs de seize ans et non d'une inscription sur la liste des films pornographie et d'incitation à la violence, ce qui aurait eu pour effet d'en interdire la diffusion à tous les mineurs. [...]
[...] C'est bien parce que ce film composé pour l'essentiel d'une succession de scènes d'une grande violence et de scènes de sexe non simulées constituait un message pornographie et d'incitation à la violence relevant de l'article 227-24 du Code pénal qui a justifié la position de la Haute juridiction. B' Une décision administrative violant la loi pénale Dans l'arrêt qui nous est soumis, le Conseil d'Etat n'a pas statué en tant que juge pénal mais en tant que juge administratif. En effet, la Haute juridiction n'a sanctionné personne mais annulé un acte. [...]
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