Le Conseil Constitutionnel a reconnu en 2006 la valeur constitutionnelle de la liberté contractuelle des personnes publiques et cette décision semble avoir mis fin aux débats doctrinaux sur son existence. Toutefois en dépit de la reconnaissance de cette liberté aux personnes publiques celles-ci ne sont pas devenues des cocontractants assimilables à de simples personnes privées. En effet, l'action administrative est fondée et finalisée par la poursuite de l'intérêt général.
Ainsi, l'administration lorsqu'elle conclut un contrat administratif possède des pouvoirs exorbitants dont la valeur est d'ordre public et qui tirent leur justification dans l'intérêt impérieux qui s'attache à la préservation de l'intérêt général et au bon fonctionnement du service public qui en est une composante essentielle. Les prérogatives de l'administration sont variées mais ce n'est pas pour autant qu'elles anéantissent toute idée d'égalité à l'égard du cocontractant. En effet, celui-ci en dépit d'un déséquilibre manifeste en terme de pouvoir bénéficie d'un droit à l'équilibre financier ainsi que l'explique parfaitement le commissaire du gouvernement Léon Blum dans ces conclusions sur le célèbre arrêt « Cie générale française des tramways ». Par conséquent, il arrive parfois que l'administration soit contrainte de résilier unilatéralement un contrat dans l'intérêt général en dehors de toute faute ou inexécution de ce dernier. Ce pouvoir même s'il s'avère souvent coûteux pour l'administration est d'ordre public et n'est pas un droit subjectif mais une obligation objective.
Un arrêt rendu le 7 janvier 2006 par la Cour d'appel administrative de Versailles « commune de Draveil » illustre parfaitement les enjeux qui peuvent naître de cette antinomie entre l'existence d'une liberté contractuelle des personnes publiques et l'impératif d'ordre public qui s'attache à ce que l'administration conserve ces pouvoirs exorbitants.
En l'espèce, il s'agit d'un contentieux contractuel opposant l'administration à son cocontractant privé. Ce litige portant sur l'exécution d'un contrat administratif, le juge administratif est compétent pour connaître de ce recours en plein contentieux. La commune a signé le 15 juillet 2002 deux contrats de prestation de service avec une société privée. Pour des raisons d'intérêt général, celle-ci a prononcé la résiliation unilatérale de ce contrat le 8 août 2002. La résiliation fut tellement instantanée à la conclusion qui ce contrat n'avait même pas commencé à être exécuté. Le cocontractant a donc demandé à la commune de l'indemniser sur le fondement d'une stipulation contractuelle prévoyant une indemnité contractuelle quasiment égale au prix du marché. Suite au refus de la commune d'exécuter pleinement son engagement contractuel, la société a attaqué cette dernière devant le juge administratif.
Quelle latitude la liberté contractuelle confère-t-elle aux parties pour aménager des clauses dérogeant aux principes jurisprudentiels gouvernant la résiliation?
[...] Ce dernier repose sur l'art du décret du 19 décembre 1962 portant règlement général de la comptabilité publique qui impose que les créances des personnes privées sur les personnes publiques le soient en contrepartie de l'exécution d'une prestation. Or, l'administration invoque le fait qu'il n'y a pas eu de commencement d'exécution du contrat. Le juge rejette se moyen car pour causer juridiquement la créance, le contrat se suffit à lui même autrement dit puisque l'indemnité est stipulée, c'est qu'elle est due ( Antoine Alonso Garcia et Amélie Mailard) L'examen du montant de l'indemnisation au regard du critère subjectif de sa dissuasivité quant au libre exercice par l'administration de son pouvoir de résiliation unilatérale Le deuxième moyen invoqué par la commune se fonde sur le principe de la jurisprudence Eurolat selon lequel il est impossible de renoncer au pouvoir de résiliation unilatérale pour l'intérêt général. [...]
[...] Un arrêt rendu le 7 janvier 2006 par la Cour d'appel administrative de Versailles commune de Draveil illustre parfaitement les enjeux qui peuvent naître de cette antinomie entre l'existence d'une liberté contractuelle des personnes publiques et l'impératif d'ordre public qui s'atttache à ce que l'administration conserve ces pouvoirs exorbitants. En l'espèce, il s'agit d'un contentieux contractuel opposant l'administration à son cocontractant privé. Ce litige portant sur l'exécution d'un contrat administratif, le juge administratif est compétent pour connaître de ce recours en plein contentieux. [...]
[...] Les limitations frappant la liberté contractuelle doivent être interprétées strictement. Ce n'est pas la première fois que le juge administratif doit connaître d'une telle clause. En effet, cette insertion est logique, car l'administration dans une démarche de contractualisation et de meilleure relation avec les particuliers trouve naturellement dans le recours aux clauses contractuelles aménageant ses pouvoirs un moyen de rendre l'action administrative, centrée bien souvent sur l'acte unilatéral, moins autoritaire. Ainsi, la jurisprudence reconnaît la validité de clauses aménageant les conditions de fonds comme la cause ( par exemple CE mai 1990 OPHLM de Toulon; CE octobre 1991, syndicat intercommunal Guzet Neige) et les conditions d'exercice du pouvoir de résiliation ( CE mars 1999, Cne de Montgenèvre). [...]
[...] Un contribuable mécontent ne pourrait même pas dans cette hypothèse intenter une action pour obtenir une autorisation de plaider (CE janvier 2004, Mery) et c'est bien dommage,« surtout à une époque où les caisses publiques sont vides On voit que sous cet angle, il est difficile de dire que cette convention ne nuit pas aux tiers. Ainsi, la liberté contractuelle des personnes publiques est encore problématique Néanmoins, on ne pouvait pas espérer une solution aussi subtile et respectueuse de la sécurité juridique. [...]
[...] Ainsi, ces libertés constitutionnellement reconnues doivent être maniées avec prudence par le juge quand il s'agira de les concilier avec d'autres principes de même valeur comme l'objectif constitutionnel qui s'attache au respect de l'ordre public. Conséquence de la liberté contractuelle: un contrat loi des parties pendant toute sa durée d'exécution La liberté de prévoir contractuellement une indemnisation pouvant excéder le montant du préjudice réellement subi par le titulaire en raison de la résiliation du contrat pour intérêt général Sauf dans l'hypothèse où le cocontractant renonce contractuellement à toute indemnisation en cas de résiliation unilatérale pour intérêt général et qu'il ne tente pas de contester sa propre renonciation devant le juge (ce qui serait difficile compte tenu de la force contraignante des engagements contractuels en dehors de tout vice de consentement), la résiliation implique une indemnisation du cocontractant. [...]
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