« L'ordre public est l'ordre matériel et extérieur considéré comme un état de fait opposé au désordre, l'état de paix opposé à l'état de trouble » affirme Maurice Hauriou dans son Précis de droit administratif. La police administrative a pour objet le maintien de cet ordre public dont le respect de la dignité de la personne humaine en serait une composante. C'est ce dont il est question dans un arrêt de la Cour administrative d'appel de Versailles du 25 octobre 2007, Commune de Bobigny.
En l'espèce, le maire de cette commune avait interdit (par un arrêté du 25 octobre 2005) les coupures d'eau sur le territoire de la commune visant les familles en difficulté, pour des raisons économiques et sociales, tant que, pour ces familles en difficulté, tous les moyens de prévention et de résorption de la dette n'avaient pas été mis en oeuvre au titre de la solidarité nationale.
Se posait la question à la Cour de savoir si la mesure d'interdiction de coupure d'alimentation en eau prise par le maire était légale au regard du principe du respect de la dignité humaine.
[...] Ces coupures pourraient en effet être considérées comme une atteinte à l'ordre public, l'eau étant un produit de première nécessité et indispensable. Le maire faisait même valoir qu'il aurait été dangereux d'en priver des personnes. Le juge a tout d'abord accordé le fait qu'en vertu des articles du code général des collectivités territoriales, le maire pouvait prendre des mesures interdisant la coupure d'une alimentation en eau Cependant, il a ensuite ajouté que cette mesure ne pouvait être prise qu'à la condition que des circonstances particulières rendent cette mesure nécessaire B-Une mesure disproportionnée aux circonstances En ajoutant la condition des circonstances particulières, le juge fonde son rejet de la demande de la commune. [...]
[...] En effet, depuis un arrêt de 1994, le principe du respect de la dignité de la personne humaine serait une composante de l'ordre public. C'est en vertu de ce principe que le maire avait pris sa mesure. Mais le juge semble privilégier la condition des circonstances locales au principe du respect de la dignité. II- La réticence du juge à valoriser le principe du respect de la dignité de la personne humaine Par cette décision du 25 octobre 2007, on remarque que le juge administratif montre une certaine réticence à valoriser le principe du respect de la personne humaine. [...]
[...] De nombreux arrêts ont rappelé la nécessité de ces circonstances pour que l'atteinte à l'ordre public soit constatée. Par exemple, on peut mentionner l'arrêt du 8 décembre 1997, Commune d'Arcueil, du Conseil d'Etat dans lequel le juge a déclaré la mesure du maire illégale. En l'espèce, il avait interdit l'affichage de publicité en faveur des messageries roses Le juge considérant qu'il n'y avait pas de circonstances locales particulières de nature à engendrer un trouble matériel sérieux, la mesure devait être annulée. [...]
[...] Ainsi, bien que le maire détienne des pouvoirs de police, ceux-ci sont également soumis à des conditions. La prévention est l'objectif de la police administrative contrairement à la police judiciaire qui vise la répression. Cette prévention vise l'ordre public mais celui-ci est normalement fonction des circonstances locales, qui à un moment donné, déclenchent des risques de troubles. Evidemment, l'appréciation des données conjoncturelles de temps et de lieu comporte une part de subjectivité. C'est au juge d'en apprécier souverainement la réalité. Cet attachement aux circonstances particulières n'est pas nouveau s'agissant du maintien de l'ordre public. [...]
[...] Ainsi, une mesure de police prise en vertu de ce principe devrait logiquement être considérée comme légale. En ce sens, on peut considérer que la décision de 2005 est étonnante. D'ailleurs, le juge précise clairement que le maire ne tient pas ( ) du principe de valeur constitutionnelle que constitue la sauvegarde de la dignité de la personne humaine le pouvoir de s'opposer aux coupures d'eau. Il insiste donc sur le fait que malgré la valeur du principe, la mesure ne peut être considérée légale. [...]
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