Cour administrative d'appel de Marseille 26 juin 2015, arrêt Association de défense de Réaltor, expropriation pour cause d'utilité publique, atteinte à la propriété privée, intérêt général, article 17 de la DDHC, sécurité routière, arrêt Malardel, arrêt Tête, arrêt Ville de Nouvelle-Est, environnement, commentaire d'arrêt
En l'espèce, après la constitution du dossier d'enquête effectué par le département des Bouches-du-Rhône afin d'exproprier une section du Réaltor ainsi que divers terrains privés non bâtis, on souhaite mettre en oeuvre un aménagement de la RD 9. Après la saisine de la commission nationale du débat public et postérieurement à l'enquête publique, l'ensemble du dossier a été transmis au préfet des Bouches-du-Rhône pour que celui-ci rende possible l'expropriation, par le biais d'une déclaration d'utilité publique. C'est ce que va faire le préfet par le biais d'un arrêté, le 10 janvier 2011, en déclarant d'utilité publique les travaux nécessaires à la mise à 2x2 voies de la RD 9 (section du Réaltor) sur le territoire de la commune de Cabriès et emportant mise en comptabilité du plan d'occupation des sols de la commune de Cabriès.
[...] Cependant, cette notion d'intérêt général reste insaisissable et n'est pas définie dans le code de l'expropriation malgré son importance. C'est pourquoi il appartient aux juges du fond d'apprécier s'il y a ou non un but d'intérêt général et de définir quels sont les buts que l'expropriation peut servir. Généralement, le juge administratif adopte une notion large et accueillante de l'intérêt général, c'est ainsi qu'il a admis qu'une expropriation pouvait être poursuivie, par exemple, pour la construction d'une salle de fête (CE 1932 Roch), ou pour la construction d'un parc de loisirs (CE 1994 Mainguy). [...]
[...] Il est ainsi possible de dire que la théorie du bilan s'apparente plutôt à un « contrôle a priori en tant que moyen de pression sur l'autorité expropriante qu'à un réel moyen de censure juridictionnelle ». Cette théorie du bilan permet à l'administration de mener à bien la préparation de leurs dossiers d'expropriation, par crainte d'encourir une annulation. Pour les opérations importantes, les cas dans lesquels le bilan est jugé négatif sont exceptionnels. Cette menace de l'annulation est en réalité théorique. Malgré cette critique, le juge administratif a considéré que la mise à 2x2voies de la RD 9 n'emportait pas d'atteinte excessive au droit de propriété et n'avait pas également un coût financier excessif. [...]
[...] Ainsi, il est possible de dire que le juge administratif ne fait qu'un contrôle partiel de la nécessité de l'expropriation puisqu'il refuse de contrôler la pertinence du choix de l'administration. Il serait possible d'aller même jusqu'à dire que cela porte atteinte au droit de propriété, car le juge devrait avoir l'obligation de refuser les expropriations qui ne s'imposent pas juridiquement, lorsque l'administration dispose d'une procédure moins attentatoire à la propriété pour mener à bien son projet. Néanmoins, la position du Conseil d'État, sur ce contrôle de la nécessité de l'expropriation, semble évoluer, puisque dans un arrêt Collectif contre les nuisances du TGV de Chasseneuil-du-Poitou et de Migné-Auxances en date du 28 mars 2011, il fait une comparaison entre le projet présenté par l'administration et des solutions alternatives notamment un autre projet qui prévoit également une expropriation. [...]
[...] En effet dans l'arrêt à commenter, la Cour considère ainsi que « ni les inconvénients inhérents aux atteintes portées à l'environnement et à la propriété, ni ceux subis par les personnes résidant à proximité du tracé en termes de nuisances sonores et de qualité de l'air ni le cout financier de l'opération ne sauraient être regardé comme excessifs et de nature à retirer au projet de mise à 2x2 voies de la section du Réaltor de la RD 9 son caractère d'utilité publique ». Ainsi, il est possible de dire que les inconvénients de l'opération peuvent être supérieurs aux avantages, mais tant qu'ils ne sont pas déraisonnables, le juge admet l'utilité publique de la déclaration et déclare le projet d'expropriation licite. C'est un contrôle de la proportionnalité de l'expropriation qui est insuffisant et limité. C'est pourquoi une partie de la doctrine comme B. Seillier, estime que le juge administratif devrait faire un contrôle extrinsèque de la déclaration d'utilité publique. [...]
[...] Ainsi la réalisation d'une infrastructure de transport, quand bien même elle est une source de pollution et contient des particules fines et quand bien même le nouveau tracé entrainera la retombée de particules toxiques émises par les véhicules directement dans le plan d'eau du bassin de Réaltor, cela n'est pas, au sens de l'arrêt, un risque grave et irréversible pour l'environnement de nature à justifier l'application du principe de précaution. Ainsi l'expropriation, autorisée par l'arrêté contesté, ne justifie pas l'application du principe de précaution et apparait, au regard du contrôle de la Cour, absolument nécessaire pour l'intérêt général. Les deux premières conditions du contrôle du juge sont bien remplies, c'est pourquoi le juge administratif va pouvoir continuer sa quête, afin de savoir maintenant si cette expropriation est proportionnelle au but poursuivi (II). II. [...]
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