"Il est plus facile de récupérer le mercure échappé d'un vieux baromètre que de saisir la notion de service public dans une définition", disait le professeur Waline.
Il s'avère, en effet, que les références au service public (SP) sont très nombreuses dans la jurisprudence, mais le juge n'en donne aucune définition. C'est donc la doctrine qui, au début du XXème siècle, s'est attachée à définir cette notion. Elle résulterait ainsi de l'association de trois éléments: un élément organique qui se traduit par le fait que le SP est une composante de l'administration; un élément fonctionnel, c'est-à-dire que le SP a pour but la satisfaction de l'intérêt général; et un élément matériel, c'est-à-dire qu'il est soumis à un régime exorbitant du droit commun. Or il s'avère que dans les années 1920, ces critères vont être remis en question. On parlera alors de "crise du SP". Les critères organiques et matériels vont notamment être remis en cause avec l'arrêt du Tribunal des conflits "Bac d'Eloka" de 1921 et plus particulièrement avec l'apparition des Services Publics Industriels et Commerciaux (SPIC). Quant au critère fonctionnel, il le sera du fait que certains services d'intérêt général ne sont pour autant érigés en services publics. Cela dit, il n'en demeure pas moins que si toutes les activités de SP ne sont pas soumises au droit public, elles demeurent pour partie soumises à un régime exorbitant du droit commun. D'une part, tous les SP sont, à des degrés variables, soumis à un certain nombre de règles de droit public. D'autre part, ils sont absolument tous soumis aux principes dégagés par Louis Rolland dans les années 1930: les lois de continuité, de changement et d'égalité. Le changement signifie que le SP doit pouvoir s'adapter aux besoins qu'il a pour but de satisfaire. La continuité signifie qu'il doit fonctionner de façon continue, sans interruption. Et enfin, l'égalité implique qu'aucun traitement différencié ne doit être donné en fonction de convictions politiques ou religieuses des usagers ou du personnel.
Dans l'arrêt de la CAA de Lyon du 13 avril 2000, "Commune de Saint-Sorlin-d'Arves", un litige s'était élevé entre la commune et l'association de défense des intérêts des propriétaires et résidants temporaires de la commune. En effet, le conseil municipal avait fixé les tarifs des remontées mécaniques à des prix différents selon la situation de l'usager. Le prix des forfaits était fixé à tarifs réduit (400 francs) pour les résidents permanents; à 650 francs pour les résidents temporaires et à 980 francs pour ceux qui étaient originaires de la commune, mais non résidents. Or une telle mesure semble porter atteinte au principe d'égalité de tous devant le SP. La commune avait alors demandé à la Cour d'Appel de réformer le jugement du Tribunal Administratif de Grenoble du 10 septembre 1996 qui avait annulé la délibération du Conseil Municipal.
Mais en quoi consiste véritablement le principe d'égalité devant le service public? Quelle est sa portée? Ne connaît-il aucune atténuation? La CAA de Lyon a jugé qu'il y avait discrimination et atteinte au principe d'égalité entre les usagers du SP et a ainsi rejeté la requête de la commune.
Il convient donc d'analyser plus en détail en quoi consiste ce principe d'égalité de tous devant le SP (I), avant de voir par la suite qu'il n'est pas dépourvu d'exceptions (II).
[...] C'est le corollaire du principe d'égalité. Si un agent du service poursuit ou favorise un individu en raison de ses opinions politiques, religieuses ou sa couleur de peau, il porte atteinte au principe d'égalité entre les usagers du SP. Ce principe s'applique en particulier dans certains secteurs comme le domaine audiovisuel où il convient de respecter "dans l'expression pluraliste, les divers courants de pensée", et notamment en ce qui concerne les émissions à caractère politique. Mais là où il s'applique également fortement, étant de plus en plus au coeur de l'actualité, c'est dans le domaine de l'enseignement. [...]
[...] Le 12 juillet 1979, le principe d'égalité a été érigé comme ayant valeur constitutionnelle, ce qui interdit, au sens de la Constitution, "l'institution de discriminations légales, non -fondées sur une différence objective de situation". Il semble donc, à la vue de ces premiers éléments, que la commune de Saint-Sorlin-d'Arves ait pris une décision allant à l'encontre du principe d'égalité devant le SP. Il convient maintenant d'analyser un autre principe, corollaire de la loi d'égalité, à savoir le principe de neutralité. [...]
[...] Le 29 décembre 1997, le CE dans l'arrêt "commune de Gennevilliers-commune de Nanterre" a affirmé que "l'intérêt général apparaît dans l'utilisation par la personne publique de certains services publics afin de réduire les inégalités sociales" (différences de tarifs . En effet, le CE affirme que de telles différences sont désormais admises au nom de l'intérêt général "qui s'attache à ce que le conservatoire [ . ] puisse être fréquenté par les élèves qui le souhaitent, sans distinction, selon leurs possibilités financières". Le critère des revenus est donc désormais pris en compte. [...]
[...] Dans l'arrêt de la CAA de Lyon du 13 avril 2000, "Commune de Saint- Sorlin-d'Arves", un litige s'était élevé entre la commune et l'association de défense des intérêts des propriétaires et résidants temporaires de la commune. En effet, le conseil municipal avait fixé les tarifs des remontées mécaniques à des prix différents selon la situation de l'usager. Le prix des forfaits était fixé à tarifs réduit (400 francs) pour les résidents permanents; à 650 francs pour les résidents temporaires et à 980 francs pour ceux qui étaient originaires de la commune, mais non résidents. [...]
[...] Ceci a été confirmé par le CE dans un arrêt du 5 octobre 1984, "Commissaire de la République de l'Ariège" où le commissaire du gouvernement Delon déclarait que "le principe d'égalité n'interdit [ . ] nullement d'établir une différence de traitement pour des usagers d'un même service public entre lesquels existent des différences de situations appréciables". Toutefois, cette différence de situation doit être significative. Il faut, pour accepter ces différences de traitement qu'existe une différence de situation et qu'elle soit en liaison avec le but poursuivi par le service. [...]
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