Cour administrative d'appel de Bordeaux 3e chambre 21 juin 2018, maintien de l'ordre public, autorité administrative, prostitution, mesure restrictive de libertés, article L2212-2 du Code général des collectivités territoriales, police administrative, arrêt Benjamin
La Cour administrative d'appel de Bordeaux a été amenée à se prononcer sur cette question du maintien de l'ordre public par une autorité administrative. En effet, le 29 novembre 2013, le maire de la ville d'Albi a pris un arrêté interdisant l'activité de prostitution sur les espaces de stationnement des véhicules, sur les trottoirs et les voies de circulation dans des secteurs de la ville déterminés de jour comme de nuit et sans limitation dans le temps. En effet, l'autorité de police administrative qu'est le maire considère que la prostitution dans ces différents secteurs provoque des troubles à l'ordre public justifiant sa mesure.
[...] Un risque avéré de trouble à l'ordre public est un risque certain, imminent et grave. Le risque doit donc exister et avoir de grandes chances de se réaliser, il doit aussi se situer sur une période assez précise et prochaine et enfin il doit mettre sérieusement en péril le maintien de l'ordre public. Le maire d'Albi considère que la prostitution va à l'encontre de la sûreté publique avec la possibilité de rixes et la possible perturbation routière, de la salubrité publique avec l'abandon d'objets de pollution en lien direct avec l'activité de prostitution tels que des préservatifs usagés, de la tranquillité publique avec d'éventuels conflits bruyants ou de nuisances sonores dues à l'activité de prostitution et enfin de moralité publique du fait de la présence très régulière d'enfants dans le secteur de la gare. [...]
[...] L'arrêt Benjamin de 1933 du Conseil d'État a officialisé le contrôle de proportionnalité fait par le juge. La proportionnalité d'un acte de police administrative correspond au fait que la mesure restrictive de liberté ne doit pas être excessive par rapport au risque de trouble à l'ordre public encouru. Le juge doit donc déterminer si une mesure moins attentatoire aux libertés n'aurait pas pu être employée pour prévenir un éventuel trouble à l'ordre public. Il faut trouver la mesure la plus efficace et la moins attentatoire aux libertés des individus. [...]
[...] La Cour administrative d'appel de Bordeaux a considéré la mesure prise par le maire d'Albi comme étant justifiée et légale en annulant le jugement du tribunal administratif de Toulouse. Tout d'abord, le juge administratif rappelle la compétence de police administrative du maire puis démontre la proportionnalité de la mesure restrictive de libertés (II). La compétence réaffirmée du maire dans le maintien de l'ordre public Le maire a une obligation d'agir en cas de troubles à l'ordre public mais ne peut agir que s'il y a un risque avéré de troubles à l'ordre public L'intervention obligatoire du maire pour le maintien de l'ordre public La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique , explique l'article L.2212-2 du Code général des collectivités territoriales. [...]
[...] En 2020, le Conseil d'État a jugé qu'un arrêté interdisant la vente d'alcool à emporter dans la ville de Montpellier dans des secteurs déterminés et à des dates précises n'était pas proportionné. Le juge administratif avait ici réclamé des limites temporelles à l'interdiction. Celle-ci ne pouvait pas toucher tous les jours de la semaine et être illimitée. Pour l'arrêté du 29 novembre 2013, le juge a été moins sévère en le déclarant proportionné alors qu'il n'était pas limité temporellement avec une interdiction de jour comme de nuit et illimité dans le temps. [...]
[...] En effet, l'autorité de police administrative qu'est le maire considère que la prostitution dans ces différents secteurs provoque des troubles à l'ordre public justifiant sa mesure. Le syndicat du travail sexuelSTRASS a fait une demande d'annulation de l'arrêté du 29 novembre 2013 au tribunal administratif de Toulouse. Ce syndicat considère en effet que la prostitution dans les différents secteurs visés par la mesure de police administrative ne provoquait pas de risques suffisants d'atteinte à l'ordre public pour une interdiction tous les jours, toutes les nuits et sans limites de temps. [...]
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