- Cependant, considérant que la hausse était, en l'espèce, plus important que toutes les prévisions les plus pessimistes que le cocontractant aurait pu effectuer préalablement à son consentement au contrat, il n'y a pas lieu d'appliquer le cahier des charges prévu initialement compte tenu de l'ampleur exceptionnelle de l'imprévision. Le Conseil d'État décide donc que la compagnie devra assurer le service malgré tout en supportant la part de déficit qu'elle aurait pu raisonnablement anticiper, tandis que la ville lui versera des indemnités d'imprévision couvrant le reste du déficit. (...)
[...] Si la création d'une telle théorie par la jurisprudence semble s'être accompagnée d'un regard abondant du Conseil d'Etat sur la conjoncture dans laquelle elle s'inscrirait pour garantir des aides au cocontractant qui subit le préjudice ( A il n'en reste pas moins que le Conseil a assorti cette théorie de conditions de mise en œuvre ( B A - Une création conjoncturelle. - Les juges du Conseil d'Etat rappellent en premier lieu qu'en principe, le contrat de concession règle de manière définitive les obligations des parties jusqu'à son expiration, et que la variation du prix des matières premières n'est que l'un des aléas du contrat, considéré comme accepté et inséré au consentement des contractants. [...]
[...] B - Les limites apportées au champ d'application de la théorie de l'imprévision. - En effet, une première limite tient à ce que l'indemnité doit rester provisoire: étant uniquement destinée à permettre au cocontractant de maintenir son activité pendant les imprévisions concernées, si elles ont entraîné une situation nouvelle propice à ce que les indemnités de la puissance publique deviennent définitives, la situation nouvellement créée constitue alors un cas de force majeure et autorise aussi bien l'un que l'autre des contractants à demander la résiliation de l'acte ( CE décembre 1932, Compagnie des tramways de Cherbourg - Par ailleurs, cette théorie a perdu de son utilité par l'introduction dans de très nombreux contrats de clauses de révision du prix, qui consistent à définir à l'avance les conditions dans lesquelles le prix sera remanié, en fonction notamment d'indices tenant à décrire l'évolution de la situation économique et financier relativement au contrat. [...]
[...] En conséquence du refus de la ville de Bordeaux d'accéder à la demande de ladite Compagnie, cette dernière saisit le conseil de préfecture de la Gironde, qui rejette, à son tour, la demande par une décision du 30 juillet 1915. La compagnie générale d'éclairage de Bordeaux décide donc de faire appel de cette décision devant le Conseil d'Etat, qui rendra la présente décision. La question posée au Conseil d'Etat était donc celle de savoir si les modalités de prix prévues dans le cadre d'un contrat de concession, lors de la survenue d'évènements imprévisibles ( tels que les guerres ) créant un préjudice pour le cocontractant de l'Administration, pouvaient être modifiée au bénéfice dudit concessionnaire ? [...]
[...] II - Les incidences de la théorie de l'imprévision sur le droit postérieur. Si la nouvelle théorie créée par le Conseil d'Etat semble bien avoir eu les effets escomptés en assurant la pérennité des contrats administratifs même en cas de bouleversement de leur économie ( A il n'en reste pas moins que cette dernière fût par la suite partiellement vidée de son utilité par plusieurs limites apportées à son champ d'application ( B A - Une volonté de continuité du service public. [...]
[...] La théorie de l'imprévision fût dégagée dans l'arrêt du Conseil d'État du 30 mars 1916 Compagnie générale d'éclairage de Bordeaux ayant pour principale vocation la défense de l'intérêt général. En l'espèce, la compagnie générale d'éclairage de Bordeaux cherchait à obtenir de la ville de Bordeaux une compensation financière, étant donné qu'elle maintenait son service de distribution de gaz malgré la très forte augmentation du prix du charbon, matière première de la fabrication de gaz, multiplié par cinq entre la signature de la concession d'éclairage et l'année 1916. [...]
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