Conseil d'État 1er juillet 2016, arrêt Société Groupama Grand Est, responsabilité de l'administration, garde d'un mineur, ASE Aide Social à l'Enfance, préjudice, indemnités, arrêt Axa Courtage, article 1242 du Code civil, arrêt Mr Lauze, commentaire d'arrêt
En l'espèce, un mineur pris en charge par les services de l'Aide Sociale à l'Enfance (ASE) du département du Jura est reconnu coupable d'un crime et de plusieurs délits par la cour d'assises des mineurs. Cette dernière le condamne solidairement avec son père à réparer le préjudice subi par les victimes en leur versant une indemnité qui sera réglée par le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions. Cet organisme assigne le père du mineur et son assureur, la société Groupama Grand Est devant le Tribunal de grande instance, afin de se voir verser la somme en question à titre d'intérêts civils, et obtient gain de cause. La société Groupama Grand Est intente alors une action en garantie contre le département du Jura, afin de se voir indemniser les frais déboursés.
[...] On comprend alors que la garde exercée par l'administration est une garde juridique, et non matérielle. L'administration reste responsable du mineur où qu'il soit et peu importe la durée de son éloignement. Des similarités avec les règles de droit civil sont là aussi remarquables, puisque ce n'est pas sans rappeler la notion de garde juridique qui lie les parents à leurs enfants, même si ce dernier n'est pas physiquement avec eux. Le Conseil d'État poursuit en dressant la liste des seuls actes pouvant mettre un terme à l'engagement de la responsabilité administrative : « [ ] dès lors qu'il n'a pas été mis fin à cette prise en charge par le service d'aide à l'enfance par décision des titulaires de l'autorité parentale ou qu'elle n'a pas été suspendue ou interrompue par l'autorité administrative ou judiciaire ». [...]
[...] Le Conseil d'État se conforme ainsi à sa jurisprudence antérieure rendue en 2005 par l'arrêt « AXA COURTAGE » dont l'espèce traitait du même sujet. On y mentionnait déjà la nécessité d'une prise en charge durable et globale d'un mineur transférant ainsi sa responsabilité à l'administration. Cette responsabilité semble s'inspirer grandement des règles de droit civil, puisqu'on retrouve ici les conditions de la responsabilité générale du fait d'autrui dégagée par la jurisprudence et fondée sur l'alinéa 1er de l'article 1242 du Code civil. [...]
[...] Le régime de la responsabilité administrative des faits du mineur qu'elle a sous sa garde La responsabilité du mineur ainsi transférée à l'administration ne peut être interrompue, témoignage de son caractère continu menant l'administration à ne pouvoir se soustraire à sa responsabilité que si les faits incriminés répondent aux conditions des causes d'exonération A. Le caractère continu du transfert de responsabilité des faits du mineur Le Conseil d'État, après avoir posé les conditions nécessaires à l'engagement de la responsabilité administrative du fait du mineur qu'elle a sous sa garde, est amené à en expliquer les modalités d'application. [...]
[...] Afin d'analyser la réponse du Conseil d'État à cette problématique, il conviendra d'abord de s'intéresser à la nature de la responsabilité administrative des faits du mineur qu'elle a sous sa garde avant d'en étudier le régime (II). I. La nature de la responsabilité administrative des faits du mineur qu'elle a sous sa garde Afin d'engager la responsabilité du département du Jura, le Conseil d'État rappelle d'abord que la prise en charge du mineur par l'administration doit revêtir les caractères durable et global permettant ainsi d'engager une responsabilité administrative sans faute, fondée sur la garde A. [...]
[...] Une responsabilité administrative sans faute fondée sur la garde. Dès lors que le placement du mineur présente les caractères d'une prise en charge globale et durable, le transfert de responsabilité est effectif et l'administration s'engage à réparer les préjudices qui pourraient être causés par le mineur. La particularité de cette responsabilité administrative tient en ce qu'elle ne suppose aucune faute de la part de l'administration, comme le rappelle le Conseil d'État à la suite de son considérant 2 : « sa responsabilité est engagée, même sans faute ». [...]
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