Arrêt Mégret, acte administratif, acte de gouvernement, parlementaire, premier ministre, actes détachables, légalité, arrêt Papon, Greenpeace, arrêt Prince Napoléon, décret du 10 février 1998
En l'espèce, le Premier ministre a chargé un député parlementaire d'une mission temporaire auprès du secrétaire d'État à l'industrie, à travers un décret du 10 février 1998. Le requérant, homme politique, demande l'annulation du décret au Conseil d'État en premier et dernier ressort.
Selon lui, le décret n'aurait eu d'autre but que de permettre au député de se faire remplacer à l'Assemblée nationale par son suppléant et de créer des conditions dans lesquelles il pourrait être candidat lors des élections sénatoriales sans que son élection comme sénateur implique une élection législative partielle. Le député estime que le juge administratif est incompétent à statuer du fait que ce décret est un acte de gouvernement, donc insusceptible d'aucun recours.
[...] Conseil d'État, Section septembre 1998, n° 195499, Mégret - La nomination d'un parlementaire en mission par un décret du Premier ministre constitue-t-elle un acte de gouvernement ? Selon le principe de légalité, tous les actes faits par l'administration sont soumis au Droit et s'il y a manquement à celui-ci, on peut demander l'annulation au juge. Or, il existe des actes de gouvernement qui sont des actes pris par le pouvoir exécutif, mais qui ne sont susceptibles d'aucun recours contentieux devant le juge administratif. [...]
[...] Il est possible qu'il considère que la "mission" ne met pas en cause les pouvoirs législatifs et exécutifs et pourrait ne pas constituer un acte de gouvernement. Il a donc jugé que l'acte était "détachable des rapports entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif tels qu'ils sont organisés par la Constitution". Ainsi, sont détachables, des rapports entre l'exécutif et le législatif, le décret par lequel le Premier ministre charge un parlementaire d'une mission. Un objectif de renforcement du respect du principe de légalité Du point de vue du respect de la légalité, il résulte de ces caractéristiques que les actes de gouvernement constituent des actes soustraits à la légalité. [...]
[...] Les caractéristiques de l'acte devraient suffire à qualifier le décret du Premier ministre comme étant un acte du gouvernement. Or, le juge administratif semble vouloir éviter d'avoir à qualifier des actes de gouvernement puisqu'elle refuse de qualifier le décret ainsi. Une intention de délimiter les catégories d'actes de gouvernement Le juge administratif a transposé la théorie des actes détachables afin de réduire les actes susceptibles de recours et ainsi renforcer le principe de légalité La transposition de la théorie des actes détachables La théorie des actes détachables était utilisée dans le champ d'élection des actes de gouvernement dans l'ordre international, précisément aux actes liés aux relations diplomatiques, mais qui s'en détachent du fait que l'acte apparaît plus tourné vers l'ordre interne, comme des décisions administratives internes. [...]
[...] Le Conseil d'État décide d'être un peu plus explicite sur ce que sont les actes de gouvernement. Il va élaborer de grandes catégories d'actes qu'il va rattacher à la notion d'actes de gouvernement. La délimitation jurisprudentielle des catégories d'actes de gouvernement La théorie du mobile politique donnait un critère permettant d'identifier les actes de gouvernement. Elle expliquait également leur immunité juridictionnelle : en tant qu'acte politique, il relevait du contrôle politique et non du contrôle juridictionnel. Depuis l'arrêt Prince Napoléon, le juge a distingué plusieurs catégories d'actes dans lequel le juge entend respecter l'autonomie du gouvernement et éviter de s'immiscer dans des conflits dont il considère qu'ils ne relèvent pas du droit administratif: les actes non détachables des relations internationales de la France par exemple la décision du président de la République de reprendre les essais nucléaires (Conseil d'État septembre 1995, association Greenpeace/France); les actes qui concernent les rapports entre les organes constitutionnels par exemple la décision du Premier ministre de dissoudre l'Assemblée National (Conseil d'État février 1989, Allain); et les actes du Parlement et du Conseil constitutionnel non détachables de l'exercice de leur fonction constitutionnelle par exemple le régime de fixation des pensions parlementaires (Conseil d'État avril 2003, Papon). [...]
[...] La question que le Conseil d'État se pose est la suivante : la nomination d'un parlementaire en mission par un décret du Premier ministre constitue-t-elle un acte de gouvernement ? Le Conseil d'État a jugé que le décret de nomination d'un député en mission par le Premier ministre ne constituait pas un acte de gouvernement et qu'elle était donc susceptible d'un recours. En déterminant que l'acte du Premier ministre n'était pas un acte de gouvernement le Conseil d'État dévoile son intention de restreindre les bénéficiaires de l'immunité juridictionnelle que sont les actes politiques (II). [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture