Conseil d'Etat, ordonnances des 11 janvier 2014 et 13 novembre 2017, interdiction de représentations de Dieudonné, troubles à l'ordre public, article L 2212 2 du Code général des collectivités territoriales, arrêtés municipaux, liberté d'expression, article 11 de la DDHC, respect de la dignité humaine, arrêt Morsang sur Orge, arrêt Benjamin, arrêt Baldy, arrêt Commune de Dammarie-les-Lys, commentaire d'arrêt
En l'espèce, il est question dans ces deux ordonnances de deux arrêtés pris par les maires d'Orléans et de Marseille en 2014 et 2017 visant à interdire la reproduction d'un spectacle de M. Dieudonné M'Bala M'Bala. Ces maires estimaient en effet que le spectacle pouvait entraîner des troubles à l'ordre public. Dieudonné va alors contester la légalité de ces arrêtés devant le juge des référés. Dans la première espèce, le juge des référés du tribunal administratif d'Orléans va rejeter la demande du requérant. La société "Les Productions de la Plume" et M. Dieudonné M'Bala M'Bala vont alors former un pourvoi devant le Conseil d'État afin de contester cette ordonnance.
Ils soutiennent notamment que les propos litigieux incriminés ne seraient pas repris dans le spectacle d'Orléans. Dans la seconde espèce, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a fait droit à la demande des requérants et va enjoindre au maire de Marseille de laisser s'y dérouler le spectacle. Le maire va alors former un pourvoi au motif que la tenue de ce spectacle était susceptible d'engendrer des risques de troubles à l'ordre public en ce que l'annonce de la programmation de ce spectacle avait suscité de vifs émois parmi la population locale.
[...] Le Conseil d'État n'a de ce fait, jamais réitéré cette jurisprudence, comme le démontre son ordonnance rendue le 13 novembre 2017. C'est un point sur lequel l'on peut se réjouir : le Conseil d'État s'est affiché en véritable protecteur des libertés en ce qu'il s'est à chaque fois interrogé sur le bien-fondé de la mesure et n'a pas simplement interdit la représentation du spectacle, car cette interdiction avait déjà été admise. [...]
[...] À quelles conditions est-il possible d'annuler la reproduction d'un spectacle au nom de la protection de l'ordre public ? Autrement dit et de façon opposée dans quels cas le Conseil d'État estime-t-il que l'interdiction d'un spectacle n'est pas justifiée ? Le Conseil d'État dans ces deux ordonnances avait à répondre à la difficile question de la conciliation entre la liberté d'expression et le respect de l'ordre public Si le respect de ces deux notions est indispensable dans une démocratie, il s'agit de voir quand elles se contredisent laquelle prévaut sur l'autre et à quel motif. [...]
[...] Cependant dans l'ordonnance du 13 novembre 2017 le Conseil d'État fait fi de cette notion et déclarer à nouveau illégal l'interdiction de reproduction d'un spectacle. Il est ainsi intéressant de voir en quoi la protection de la dignité humaine a pu justifier, un temps, une atteinte à la liberté d'expression. La protection de la dignité humaine, composante de l'ordre public, pouvant justifier une atteinte à la liberté d'expression De façon innovante, le Conseil d'État dans son ordonnance du 9 janvier 2014 va justifier l'interdiction de reproduction d'un spectacle au nom de la protection de la dignité humaine. [...]
[...] De façon corrélative cette interdiction porte également atteinte à la liberté de réunion, c'est-à-dire la possibilité pour chaque individu se réunir temporairement dans un lieu à des fins pacifiques. Or comme le rappelle systématiquement le Conseil d'Etat dans les ordonnances des 11 janvier 2014 et 13 novembre 2017 : « L'exercice de la liberté d'expression est une condition de la démocratie et l'une des garanties du respect des autres droits et libertés ». La liberté d'expression étant d'ailleurs une liberté constitutionnelle établie à l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. [...]
[...] C'est en l'espèce ce principe que le Conseil d'État va appliquer dans les ordonnances du 11 janvier 2014 et du 13 novembre 2017. De plus, le maire de la commune de Marseille avait tenté de défendre sa mesure visant à interdire le spectacle de Dieudonné par le fait que l'affiche de ce spectacle revêtait une connotation antisémite. Ici encore le Conseil d'État vient faire un contrôle de proportionnalité : il affirme qu'une mesure d'interdiction générale d'un spectacle ne peut pas être justifiée par le seul fait que son affiche serait litigieuse. [...]
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