Nous sommes ici face à un arrêt du Conseil d'Etat, rendu le 28 novembre 1975, opposant l'Office Nationale des Forêts (ONF) au Sieur Abamonte.
Le 17 octobre 1971, le jeune Georges Abamonte fut victime d'une chute de quinze mètres dans une carrière désaffectée, se situant dans la forêt domaniale de Banney à Luxeuil. Ce dernier fut grièvement blessé et demeurera par suite, atteint d'une incapacité permanente à 100%.
Le Sieur Abamonte, père de la victime, engagea une action en responsabilité contre l'ONF, concernant les conséquences dommageables de la chute de son fils. Le litige fut porté devant le tribunal administratif de Besançon.
Par un jugement du 7 février 1973, le Tribunal administratif se déclara incompétent et conclut à la responsabilité de l'office. L'ONF saisira donc le Conseil d'Etat, qui rendit son arrêt le 28 novembre 1975.
Le problème de l'espèce est de savoir si la juridiction administrative est compétente pour régler un litige concernant la forêt domaniale, qui appartient à la Commune de Luxeuil.
Le Conseil d'Etat estime que la forêt domaniale de Banney doit être considérée comme appartenant au domaine privé de l'Etat. Il estime que les mesures prises par l'ONF pour ouvrir cette forêt au public, ne font pas parti d'une mission de service public administratif.
Par conséquent, le juge administratif a annulé le jugement du Tribunal administratif de Besançon, car ce dernier était incompétent pour statuer sur ce litige, qui relevait des juridictions judiciaires.
Le Conseil d'Etat, pour trancher ce litige concernant la domanialité privée des forêts publiques, va tout d'abord qualifier le domaine de la forêt du Banney (I), avant d'affirmer la compétence du juge judiciaire (II).
[...] Une solution contestable L'arrêt ONF contre Abamonte fut un arrêt très contesté, principalement parce que la section du contentieux du Conseil d'Etat n'a pas retenu la solution de son commissaire du gouvernement, Madame Aubin. Cette dernière estimait qu'il peut exister, dans la lignée de l'arrêt Dauphin, une mission de service public d'ordre touristique et de loisirs assurée par l'ONF, pour les visiteurs de certaines forêts ou certaines parties de forêt domaniale. Selon Madame Aubin, la responsabilité de l'ONF ne pourrait être engagée malgré cela, puisqu'elle n'était pas tenue d'aménager toute la forêt. [...]
[...] Ce dernier fut grièvement blessé et demeurera par suite, atteint d'une incapacité permanente à 100%. Le Sieur Abamonte, père de la victime, engagea une action en responsabilité contre l'ONF, concernant les conséquences dommageables de la chute de son fils. Le litige fut porté devant le tribunal administratif de Besançon. Par un jugement du 7 février 1973, le Tribunal administratif se déclara incompétent et conclut à la responsabilité de l'office. L'ONF saisira donc le Conseil d'Etat, qui rendit son arrêt le 28 novembre 1975. [...]
[...] Le Sieur Abamonte voulait se fonder sur cet arrêt, en disant que la forêt du Banney a été mise à la disposition directe du public et que celle- ci faisait l'objet d'aménagements spéciaux en vu de son utilisation par le public, comme la présence de sentiers banalisés, par exemple. Le problème pour le Sieur Abamonte, est que aucune jurisprudence n'avait encore admis la domanialité publique concernant les forêts domaniales, puisqu'il existait un mouvement tendant à éviter une trop grande extension du domaine public. Le Conseil d'Etat ne retiendra pas la thèse du Sieur Abamonte. Selon lui, la disposition directe du public et la réalisation d'aménagement spéciaux ne sont pas des conditions suffisantes pour affirmer que la forêt du Banney fait partie du domaine public. [...]
[...] De plus, si le Conseil statuait sur ce litige qu'au regard du lieu de l'accident, il verrait que la carrière n'était pas ouverte au public et ne disposait pas d'aménagement spécial. Elle se situait donc dans le cadre classique des forêts domaniales vouées à l'exploitation forestière, donc soumise au droit privé et à la compétence du juge judiciaire. Nous verrons donc, que le Conseil d'Etat va affirmer la compétence du juge judicaire, en déterminant que la forêt domaniale du Banney appartient au domaine privé de la commune de Luxeuil. [...]
[...] La solution peut également être contestable au regard des jurisprudences antérieures. En effet, le Conseil d'Etat a donné à ce litige, une solution contraire aux arrêts Dauphin et Berthier. La doctrine reproche donc beaucoup au Conseil d'Etat de ne pas avoir assez motivé son arrêt, notamment en raison de ces divergences. Malgré cela, avec cet arrêt, on peut se demander si le Conseil d'Etat n'a pas créé une nouvelle catégorie de biens domaniaux : les biens insusceptibles de faire partie du domaine public. [...]
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