Conseil d'État, liberté fondamentale, droit fondamental, arrêt du 13 novembre 2017, pouvoirs de police, police administrative, police administrative d'un maire, libertés publiques, interdiction d'un spectacle, Dieudonné, ordonnances Dieudonné, atteinte à la dignité humaine, dignité humaine, ordre public, maintien de l'ordre public, juge des référés du Conseil d'Etat, référé-liberté, compétence du juge administratif, liberté d'expression, mesure de police, respect des libertés, Etat de droit, CEDH Convention Européenne des Droits de l'Homme, DDHC Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen
En l'espèce, le maire de Marseille avait résilié un contrat de mise à disposition d'une salle municipale dans laquelle devait se produire, un spectacle humoristique qui portait, selon lui, atteinte à la dignité humaine et incitait à la haine et à la discrimination raciale.
Le juge des référés du tribunal administratif avait fait droit à la demande du requérant en ordonnant à ladite commune de laisser s'y dérouler le spectacle.
Le maire va alors former un pourvoi au motif que le spectacle pourrait engendrer des risques de troubles à l'ordre public, car, selon lui, l'annonce du spectacle pourrait engendrer "une profonde émotion parmi les Marseillais et au-delà, de nombreuses réactions de nature à créer de réelles menaces de trouble à l'ordre public", que la ville " ne veut pas être confrontée sur le parvis du Dôme, ni à l'intérieur de celui-ci, à de violentes réactions et manifestations susceptibles de se produire du fait des tensions provoquées par la tenue même de ce spectacle " et que " Marseille ne peut donc pas accepter un spectacle qui, au prétexte d'humour divise, fracture et oppose [...] proposé par un homme déjà condamné pour incitation à la haine raciale et antisémitisme ".
Le Conseil d'État devait alors répondre à la question suivante : un maire peut-il interdire la tenue d'un spectacle qui serait susceptible de troubler l'ordre public alors que d'autres mesures moins attentatoires à la liberté de réunion auraient pu être prises ? Autrement dit, dans quelles limites, le maire peut-il prendre les mesures qu'exige le maintien de l'ordre ?
[...] Conseil d'État, juge des référés, formation collégiale novembre 2017, Commune de Marseille, n° 415400 - Un maire peut-il interdire la tenue d'un spectacle qui serait susceptible de troubler l'ordre public alors que d'autres mesures moins attentatoires à la liberté de réunion auraient pu être prises ? Le Conseil d'État, protecteur des libertés et droits fondamentaux, est venu dans un arrêt, rendu le 13 novembre 2017, faire un point sur la conciliation des pouvoirs de la police administrative d'un maire avec le respect des libertés publiques et droits fondamentaux (notamment la liberté d'expression, de réunion ou encore de travail) garantis par la loi. [...]
[...] Il semble, tout de même important, de préciser que dans l'arrêt à commenter (et dans les autres affaires concernant l'humoriste controversé Dieudonné), ce n'est pas le trouble à l'ordre public, établi et contesté (par exemple, une manifestation qui dégénère) qui motive l'interdiction du spectacle, mais bien le seul risque de trouble à l'ordre public c'est-à-dire la simple annonce d'un spectacle, à venir, destiné à troubler la représentation. Les libertés publiques et droit fondamentaux, représentant juridiquement, l'ensemble des droits ou libertés essentielles, pour chaque individu (recouvrant, ainsi, au sens large, les droits de l'homme de chacun) sont assuré(e)s dans un État de droit et dans une démocratie. [...]
[...] Surtout que, selon le juge, le maire aurait pu, afin d'éviter tout risque de trouble à l'ordre public, prendre de simples mesures de sécurité nécessaires à l'exercice de la liberté de réunion (qui est une liberté publique et politique constituant le droit de se rassembler pacifiquement et temporairement dans un même lieu, sans armes, dans toute finalité licite et conforme à la loi). Même si chaque individu dispose de plusieurs droits fondamentaux et libertés individuelles, garanties par la loi, par l'État, ces libertés ne sont ni générales ni absolues ; elles connaissent des limites puisque, selon l'article 4 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : " la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui Ainsi, conformément à son pouvoir de police administrative (prévu à l'article L2122-24 du Code général des collectivités territoriales) - lui permettant de mener à bien des missions de maintien de l'ordre, de sécurité, de tranquillité et de salubrité publiques, un maire peut décider d'interdire la tenue d'un spectacle qui serait susceptible de troubler l'ordre public. [...]
[...] En l'espèce, le maire de la commune a refusé que soit maintenu le spectacle, afin d'éviter, tout d'abord, tout risque de trouble à l'ordre public. Et ensuite, pour empêcher la tenue d'un spectacle " qui, au prétexte d'humour divise, fracture et oppose [ . ] proposé par un homme déjà condamné pour incitation à la haine raciale et antisémitisme Cette ultime justification du maire est assez étonnante puisqu'elle témoigne, en premier lieu, du jugement personnel que se fait le maire sur la nature, la caractérisation humoristique du spectacle. [...]
[...] D'ailleurs, l'arrêt à commenter vient rappeler quelques conditions d'application de la procédure d'urgence qui s'apprécient objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de chaque espèce en faisant bien la distinction entre les deux procédures prévues par les articles L. 521-1 et L. 521-2 du Code de justice administrative : pour le premier article, il dit que le demandeur " doit justifier des circonstances particulières caractérisant la nécessité pour lui de bénéficier à très bref délai d'une mesure de la nature de celles qui peuvent être ordonnées sur le fondement de cet article " et pour le second, il "doit justifier de circonstances caractérisant une situation d'urgence qui implique, sous réserve que les autres conditions posées par cette disposition soient remplies, qu'une mesure visant à sauvegarder une liberté fondamentale doive être prise dans les quarante-huit heures Ainsi, en l'espèce, la procédure d'urgence était nécessaire, au motif que l'annonce de la décision du maire a interrompu les réservations effectuées pour aller voir le spectacle faisant, ainsi, " obstacle, dès sa prise d'effet, à la vente du plus grand nombre possible des places de la salle louée pour cette date Ensuite, le juge relève qu'aucune autre salle avec un plafond équivalent n'était disponible à cette période-là à Marseille ou aux environs, pour accueillir un grand nombre de personnes, " de sorte que cette décision entraînait l'annulation du spectacle Et enfin, l'urgence était nécessaire, car il y avait déjà un grand nombre de personnes qui avaient déjà réservé leurs places. [...]
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