Arrêt du 8 mars 2023, décision administrative, recours pour excès de pouvoir, fonctionnaire, agent public, harcèlement moral, recours en annulation, droit au recours juridictionnel, arrêt Caillol, arrêt Hardouin et Marie, arrêt Planchenault, arrêt Payet, arrêt Boussouar, recevabilité de recours, arrêt Bourjolly, statut général des fonctionnaires, article L 133-2 du Code général de la fonction publique, mesure d'ordre intérieur, jurisprudence administrative, fonction publique
En l'espèce, une fonctionnaire (Mme B.), titulaire du grade d'attaché d'administration de l'État, exerçant ses fonctions à la préfecture de Corse-du-Sud, a été affectée d'office au secrétariat général de la préfecture au poste de « cheffe de la mission de pilotage des politiques partenariales et de l'appui territorial » par une décision du préfet en date du 25 janvier 2017.
Mme B. a souhaité contester cette affectation d'office d'abord dans le cadre d'un recours gracieux formulé auprès du préfet de la Corse-du-Sud. De l'absence de réponse de ce dernier est née une décision implicite de rejet. Ce sont ces deux décisions - d'affectation d'office et de rejet de son recours gracieux - que Mme B. a ensuite souhaité déférer au tribunal administratif Bastia en vue d'obtenir leur annulation.
[...] Avec la décision commentée, le Conseil d'État se prononce spécifiquement sur la question du harcèlement moral et sur la place à lui donner au sein de la grille de lecture qu'il perfectionne régulièrement dans sa délimitation du champ des mesures d'ordre intérieur. II. Un contexte de harcèlement moral rendant recevable un recours juridictionnel contre des mesures prises en lien avec celui-ci Le Conseil d'État consolide ici sa position sur la façon dont il entend intégrer la notion et le contexte de harcèlement moral à son analyse du champ des mesures d'ordre intérieur. [...]
[...] Le Conseil d'État, sur les conseils de son rapporteur public, prend donc le parti, dans cette décision, de raccrocher l'existence d'une situation de harcèlement moral non pas aux exceptions tirées des motifs dans les mesures (en ce qu'ils constitueraient une discrimination ou une sanction déguisée) mais, plus traditionnellement aux effets. Pour justifier cette position, il a considéré, tout d'abord, que contrairement au critère de la sanction ou de la discrimination, le harcèlement moral est un processus plus long et plus insidieux, qui s'inscrit dans la durée et se caractérise par des « agissements répétés » (tel que le dispose au demeurant l'article L. [...]
[...] Au contraire, le ministère de l'Intérieur soutenait qu'il ne s'agissait là que d'une simple mesure d'ordre intérieur non susceptible de recours devant le juge de l'excès de pouvoir en vertu du régime juridique qui leur est propre. - En présence d'une situation de harcèlement moral effectivement établie, une décision d'affectation d'office d'un fonctionnaire échappe-t-elle à la qualification de mesure d'ordre intérieur et devient-elle ainsi une décision administrative faisant grief susceptible de recours pour excès de pouvoir devant le juge administratif ? Avec cette décision du 8 mars 2023, rendue en chambres réunies et conformément aux conclusions du rapporteur public, la Haute Assemblée a admis la recevabilité de l'instance introduite par Mme B. [...]
[...] De ce fait, le fondement juridique pour intégrer le harcèlement moral parmi les exceptions à des mesures qui, normalement, sont considérées comme d'ordre intérieur est le statut général des fonctionnaires et son ancien article 6 et donc davantage le critère des effets que la mesure est susceptible de produire sur la situation du fonctionnaire (en l'espèce, les effets sur les libertés et droits fondamentaux que le fonctionnaire - ou l'agent public contractuel - tient de son statut). Comme l'indique le rapporteur public, Vincent Pez-Lavergne, dans ses conclusions sous l'arrêt commenté, il semblait en effet « inutile d'élargir au harcèlement moral la brèche que vous avez ainsi ouverte en créant une seconde catégorie d'exception au principe que nous vous avons rappelé. [...]
[...] et Mme José et par la considération que les mesures d'ordre intérieur ne font pas suffisamment grief aux agents publics, ou aux personnes qui en sont les destinataires, contrairement à une sanction disciplinaire par exemple. Néanmoins, depuis les années 1990, la politique de juge administratif est celle d'un développement substantiel du recours contre des décisions qui, jusqu'alors, étaient considérées comme des mesures d'ordre intérieur. La présente décision rappelle effectivement cet état du droit avant de prolonger le raisonnement au cas spécifique du harcèlement moral mais, avant cela, de rappeler l'évolution notable de l'état du droit sur la question au considérant 2. [...]
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