Madame Perreux, Conseil d'État, 30 octobre 2009, acte non-réglementaire, actes règlementaires, droit communautaire, ordre juridique français, directives européennes, Union européenne, Conseil constitutionnel, économie numérique, loi relative au droit d'auteur, arrêt Arcelor, jurisprudence Cohn-Bendit, arrêt Van Duyn, pouvoir souverain, invocabilité de substitution, arrêt Mme Lévèque, arrêt Mme Montaut
En l'espèce, Mme P., magistrate judiciaire a remis sa candidature pour le poste de chargé de formation à l'ENM. À l'issue du concours Mme D., juge de l'application des peines au tribunal de grande instance de Périgueux, a emporté ce poste.
Dans sa requête introductive d'instance, Mme P. a demandé l'annulation du décret du 24 août 2006 portant sur sa nomination dans la magistrature en tant que vice-présidente au TGI de Périgueux et de l'autre part de Mme D. au sein de l'administration centrale, mais aussi l'arrêté du 29 août 2006 par lequel le ministre de la Justice a nommé Mme D. en qualité de chargée de formation à l'ENM à compter du 1er septembre 2006. Le 17 janvier 2007, la requérante s'est désistée de ses conclusions portant sur l'annulation du décret du 24 août 2006, ce qui a amené la juridiction administrative à statuer seulement sur l'arrêté.
[...] Dans cette décision, après avoir précisé le support nécessaire, le Conseil d'État effectue un revirement de sa jurisprudence Cohn-Bendit élargissant l'invocabilité des directives à l'égard des actes non-réglementaires une invocabilité qui n'est pas pour autant absolue et qui demeure soumise à certaines conditions La consécration de l'invocabilité des directives à l'égard des actes non-réglementaires - un abandon attendu de la jurisprudence Cohn-Bendit Dans son arrêt Van Duyn de 1974, la CJCE admet l'invocabilité exceptionnelle d'une directive, en effectuant le rapprochement entre les règlements, qui produisent des effets directs dans le droit interne, et les directives qui pouvaient à certaines conditions, précisés dans son arrêt ministère public Ratti en 1979, avoir des effets directs dans les relations entre les États membres et les particuliers. En premier le Conseil d'État dans son arrêt Cohn-Bendit de 1978 portant sur un acte individuel d'extradition juge qu'une directive ne peut pas créer des droits à l'égard des particuliers. Par la suite, il juge qu'une directive ne saurait pas être invoquée à l'appui d'un recours dirigé contre un acte non-réglementaire « quelles que soient d'ailleurs les précisions qu'elles contiennent ». [...]
[...] L'invocabilité de la directive contre un acte administratif semblerait une mesure juste et équilibrée. Une autre conséquence de la non-transposition c'est l'impossibilité pour les autorités de se prévaloir d'une directive non transposée (Conseil d'État, Lilly France, 1995) et la responsabilité de l'État en paiement des dommages-intérêts (Conseil d'État, Arizona Tobacco Product et SA Philip Morris France, 1992). L'invocabilité des directives à l'égard des seuls actes règlementaires - une garantie insuffisante de l'intégration juridique à l'Union européenne Résultant du fait que les autorités françaises n'auraient pas respecté leur engagement de transposer la directive, il demeure nécessaire d'instituer des mécanismes pour que ces directives puissent produire des effets de droit dans le droit interne (« de garantir l'effectivité des droits que toute personne tient de cette obligation à l'égard des autorités publiques ») C'est le juge, celui qui est responsable de garantir l'efficacité du ce « pacta sunt servanda » (« il appartient au juge national, juge de droit commun de l'application du droit communautaire ») et puisqu'il y a deux ordres juridiques en France, c'est autant le juge judiciaire de droit commun que le juge administratif de droit commun qui sont compétents. [...]
[...] Dans l'hypothèse où les deux conditions sont réunies est consacrée une « invocabilité de substitution » puisque la directive permet non seulement d'écarter le droit national, mais au contraire d'appliquer directement les dispositions inconditionnelles et précises de la directive invoquée. C'est le cas notamment de l'arrêt Mme Lévèque de 2011 dont le Conseil d'État a reconnu une telle discrimination ou encore l'arrêt Mme Montaut de 2011 où le Conseil d'État a adopté le même raisonnement en matière de charge de la preuve des faits constitutifs de harcèlement moral. [...]
[...] Le Conseil constitutionnel a tiré les conséquences nécessaires de l'article 81-1 de la Constitution et a consacré à cette obligation une valeur constitutionnelle dans sa décision de 2004 dite Loi portant sur la confiance dans l'économie numérique et l'a réitéré en 2006 dans une autre décision dite Loi relative au droit d'auteur. Selon l'article 288 TUE, ancien article 189, la directive européenne est un acte de droit dérivé qui précise une date jusqu'à laquelle l'État a l'obligation de la transposer par un acte interne. Cela veut dire que jusqu'à l'expiration du délai, un particulier ne peut pas se prévaloir des dispositions de cette directive puisque l'État demeure encore responsable de la transposer en choisissant souverainement sa mise en œuvre. Elle peut être faite seulement de manière exceptionnelle. [...]
[...] À l'issue du concours Mme D., juge de l'application des peines au tribunal de grande instance de Périgueux, a emporté ce poste. Dans sa requête introductive d'instance, Madame P. a demandé l'annulation du décret du 24 août 2006 portant sur sa nomination dans la magistrature en tant que vice-présidente au TGI de Périgueux et de l'autre part de Mme D. au sein de l'administration centrale, mais aussi l'arrêté du 29 août 2006 par lequel le ministre de la Justice a nommé Mme D. en qualité de chargée de formation à l'ENM à compter du 1[er] septembre 2006. [...]
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