Le requérant, M. Coulibaly, d'origine ivoirienne, a commencé ses études d'odonto-stomatologie en Côte d'Ivoire avant de les poursuivre en France grâce à un accord de coopération conclu entre cette université et celle de Montpellier. C'est néanmoins l'université d'Abidjan qui lui a délivré son diplôme, et non l'université française de Montpellier.
Le praticien a acquis la nationalité française en 2003, puis a été inscrit, par une décision du conseil départemental, en 2004 au tableau de l'ordre des chirurgiens dentistes de l'Isère en vue de l'exercice de sa profession comme salarié. Désirant s'établir à titre libéral dans l'Isère, il a sollicité un transfert de résidence professionnelle dans ce département.
Or, à cette occasion le conseil départemental de l'Isère a estimé son inscription initiale entachée d'illégalité et a prononcé, en conséquence, sa radiation du tableau de l'ordre, par une décision, équivalant à une abrogation.
M. Coulibaly a contesté cette décision devant le conseil régional de l'ordre, puis son recours ayant été rejeté, devant le Conseil national de l'Ordre qui l'a, par la suite, également débouté de sa demande. Par conséquent, M. Coulibaly a saisi le Conseil d'Etat d'un recours pour excès de pouvoir de la décision du Conseil national de l'Ordre.
Tout d'abord, le requérant conteste sa radiation du tableau de l'ordre au motif que les conditions d'inscription étaient remplies. De plus, il avance le fait que le conseil départemental de l'ordre était tenu par un délai d'abrogation de l'acte d'inscription, créateur de droits, et ne pouvait pas procéder à cette abrogation alors que trois ans s'étaient écoulés depuis l'inscription initiale.
[...] Le choix d'une protection des administrés renforcés. II. Si cet arrêt pose des limites aux pouvoirs de l'administration dans son contrôle de légalité des actes administratifs cela s'explique par une volonté de protéger la sécurité juridique . Au détriment des pouvoirs de l'administration En l'espèce, c'est l'administration qui a commis une faute. En effet, le conseil départemental de l'ordre qui a accordé l'inscription au tableau de l'ordre des chirurgiens-dentistes de l'Isère au requérant, M. Coulibaly alors que certes, la condition de la nationalité française était remplie, mais il possédait un diplôme délivré en Côte d'Ivoire et non en France ou dans les pays de la communauté économique européenne ou de l'espace économique européen comme exigé. [...]
[...] Le conseil départemental de l'ordre était parfaitement informé de l'origine de son diplôme (Côte d'Ivoire) et était donc en possession de tous les documents utiles pour apprécier la condition de diplôme. Le conseil départemental de l'ordre prend, cependant, la décision (confirmer par le Conseil national) de radier le requérant du tableau de l'ordre, c'est-à-dire d'abroger l'acte créateur du droit d'exercer sa profession au motif qu'il est illégal, puisque M. Coulibaly ne remplit pas la condition de diplôme. Or, le Conseil d'Etat juge ici que le conseil de l'ordre n'avait pas le droit de procéder à cette radiation pour l'avenir, plus de deux après qu'il ait été inscrit. [...]
[...] L'arrêt COULIBALY expose au travers de son considérant de principe certaines conditions visant l'abrogation des actes créateurs de droit et étend par la même le régime du retrait à celui de l'abrogation. Les précisions apportées concernant les conditions de validité de l'acte et les conditions d'abrogation d'un acte créateur de droits Dans l'arrêt présenté, les notions d'abrogation et de retrait sont évoquées par le Conseil d'Etat. Les deux notions concernent la disparition des effets émanant d'un acte créateur de droits ; la seule différence réside dans le fait que l'abrogation correspond à une atteinte moindre aux droits résultant de l'acte administratif, car elle ne les remet en cause que pour avenir, tandis que le retrait renvoie à une atteinte plus importante, car il fait disparaitre rétroactivement les droits résultants de l'acte administratif créateur de droit. [...]
[...] On peut y voir une volonté du Conseil d'Etat d'équilibrer le contrôle de légalité de l'Administration tout en protégeant la sécurité juridique des justiciables. En l'espèce, la qualité des soins que prodiguait M. Coulibaly à ses patients n'était pas à remettre en cause, car il n'exposait pas ses patients à un danger grave. La santé publique des patients et donc l'intérêt général ne se voyaient pas porter atteinte. Si le praticien avait été dangereux, la solution aurait en effet été tout autre puisque l'abrogation aurait été possible à n'importe quel moment. [...]
[...] La rétroactivité était alors érigée en principe et l'abrogation n'intervenait alors qu'à titre exceptionnel. Mais cela revenait en d'autres termes à refuser à l'administration un pouvoir dont même le juge administratif disposait à savoir celui de moduler les effets dans le temps de sa décision selon les intérêts à prendre en compte en l'espèce. Désormais avec Coulibaly, l'incertitude de la portée de la jurisprudence SOCIETE NEUF TELECOM a disparu. L'alignement des conditions de l'abrogation sur celui du retrait est désormais consacré. [...]
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