Conseil d'état 9 novembre 2015, décision d'une retenue de matériel d'un détenu, mesure d'ordre intérieur, objet d'un recours, CEDH cour européenne des droits de l'homme, droits et libertés des détenus, juge administratif, acte administratif, arrêt Bruneaux, arrêt Remli, arrêt Boussouar, arrêt Planchenault, arrêt Payet, décision Charbonnel, commentaire d'arrêt
Dans le domaine pénitencier, les décisions prises à l'égard des détenus n'ont pas toutes la même nature, et par conséquent ne peuvent pas toutes être susceptibles de recours devant le juge administratif. Ce sujet de contentieux est assez récurrent devant le juge administratif, qui doit préciser si les décisions prises par les établissements pénitenciers constituent des mesures d'ordre intérieur insusceptible de recours, ou non. Cette clarification du juge reste néanmoins assez lacunaire, comme l'illustre cette décision du Conseil d'État du 9 novembre 2015.
En l'espèce, un détenu s'est vu retirer son ordinateur par les autorités du centre pénitencier de Caen. En effet, lors d'un contrôle de ce matériel, une corde a été retrouvée à l'intérieur de l'ordinateur ce qui a motivé cette décision. Le détenu a alors intenté une action en justice devant le tribunal administratif de Caen en demandant l'annulation pour excès de pouvoir de la décision des autorités pénitentiaires.
[...] Conseil d'État novembre 2015 – La décision d'une retenue de matériel d'un détenu est-elle une mesure d'ordre intérieur, insusceptible de faire l'objet d'un recours ? Dans le domaine pénitencier, les décisions prises à l'égard des détenus n'ont pas toutes la même nature, et par conséquent ne peuvent pas toutes être susceptibles de recours devant le juge administratif. Ce sujet de contentieux est assez récurrent devant le juge administratif, qui doit préciser si les décisions prises par les établissements pénitenciers constituent des mesures d'ordre intérieur insusceptible de recours, ou non. [...]
[...] La décision de retenue du matériel informatique d'un détenu constitue-t- elle une mesure d'ordre intérieur, insusceptible de faire l'objet d'un recours ? Par un arrêt en date du 9 novembre 2015, le Conseil d'État a annulé l'arrêt rendu par la Cour administrative d'appel de Nantes, et a considéré que cette dernière avait basé ses conclusions sur le contrôle du matériel informatique et non sur la décision de saisir l'ordinateur. Or seul le contrôle du matériel constitue une mesure d'ordre intérieur, la saisine de celui-ci étant un acte administratif susceptible de recours devant le juge administratif. [...]
[...] On peut comprendre en ce sens qu'une mesure d'ordre intérieur en est une, tant que les droits et libertés du détenu ne sont pas en jeu. Cet arrêt s'inscrit parfaitement dans cette jurisprudence. La détention de matériel informatique par un détenu étant un droit, toute atteinte à ce droit est susceptible d'un recours devant le juge administratif. Le juge administratif semble ici apporter un élément de définition assez déterminant des mesures d'ordre intérieur, l'amenant à diminuer considérablement le champ de celles-ci. [...]
[...] Dans cette décision, le juge administratif estime que la punition mettant un détenu en isolement constitue un acte administratif faisant grief. Il rompt alors avec sa précédente jurisprudence. À partir de ce moment, le juge administratif va évaluer la situation des détenus in concreto, et prendre en compte divers facteurs, comme les conditions de vie, la situation familiale, etc. Par la suite, sa jurisprudence évoluera en ce sens, avec l'arrêt Remli en 2003 relatif également à une sanction prise à l'égard du détenu. [...]
[...] Il est certes vrai que ces condamnations étaient relatives au nombre élevé de détenus dans les prisons, et ne se rapportaient en aucun cas aux mesures d'ordre intérieur, mais le système carcéral français est dans la ligne de mire de la Cour européenne des droits de l'Homme. Cette situation n'a pas échappé au Conseil d'État. En effet, dans un arrêt du 13 novembre 2013, afin de justifier sa décision de considérer comme une mesure d'ordre intérieur la décision de refuser la demande de transfert d'un détenu dans un autre établissement pénitencier, le Conseil d'État s'appuie sur des textes tels que la Convention européenne de sauvegarde des Droits de l'Homme et des libertés fondamentales. [...]
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