Conseil d'État 9 juillet 2015, arrêt Football club des Girondins de Bordeaux et autres, pouvoir réglementaire, acte administratif réglementaire, principe de l'impossibilité, LFP Ligue de Football Professionnel, mission de service public, décision Société commerciale de l'Ouest Africain, jurisprudence Monpeurt, arrêt Madame Pascau, arrêt F.I.F.A.S, arrêt France Nature Environnement
Par un arrêt n°375542 du 9 juillet 2015, le Conseil d'État en ses 2e et 7e sous-sections réunies à l'occasion d'identifier comme acte administratif réglementaire une délibération émanant d'une personne morale de droit privé, ainsi que de contrôler l'exercice du pouvoir réglementaire conféré à ladite personne. Ce contrôle permettra au Conseil de découvrir le principe de l'impossibilité, pour une personne chargée d'une mission de service public, de conclure un contrat par lequel elle s'engage à faire usage dans un sens déterminé de son pouvoir réglementaire.
En effet, le 23 janvier 2014, la Ligue de football professionnel (LFP) a mené une délibération en vue d'obtenir l'autorisation pour le Président de la Ligue de signer une transaction ayant pour objet de mettre un terme définitif au litige opposant la Ligue au club de football monégasque, ce via la modification de son propre règlement administratif. Cette modification avait pour finalité de permettre à l'AS Monaco de participer aux compétitions de Ligue 1 et de Ligue 2 organisées par la LFP sans déplacer le siège de sa direction effective sur le territoire français, ce que prohibait le règlement initial de la LFP.
[...] Cet arrêt revêt alors un caractère préventif, les personnes morales de droit privé détentrices d'un pouvoir réglementaire spécialisé étant sans doute plus tentées de détourner l'usage de leur pouvoir réglementaire que les personnes publiques. Ce détournement de l'intérêt général est facilement envisageable par l'outil du contrat, outille de l'échange des consentements parfois d'intérêts privés, devant donc être encadrés. B. La découverte d'un principe offrant un contrôle adapté de l'outil contractuel en matière administrative Dans cet arrêt, les juges exercent un contrôle adapté en utilisant une méthode particulière aux transactions pour qualifier le contrat qui en découle d'administratif. [...]
[...] La LFP, créée par la Fédération française de football (fédération délégataire), chargée d'organiser, de gérer et de réglementer le football professionnel, possède un pouvoir réglementaire spécialisé, dont le régime est fixé par le droit administratif. S'il est aujourd'hui évident qu'un régime juridique de droit public peut s'appliquer aux personnes de droit privé chargées d'une mission de service public, l'intérêt de cet arrêt reste sensible. Il explicite les critères selon lesquels un acte d'un organisme de droit privé, telle une délibération, peut répondre du régime administratif. En l'espèce, ceci permettra d'appliquer à la délibération des principes relatifs à l'exercice du pouvoir réglementaire. [...]
[...] Ainsi, le Conseil d'État rappelle péremptoirement que selon « les principes qui régissent l'action des collectivités publiques et des personnes chargées d'une mission de service public », il leur revient « d'exercer cette compétence [réglementaire] dans l'intérêt général au regard des divers intérêts dont elle a la charge ». Ceci est affirmé avec d'autant de force qu'il est précisé que le respect de ces principes est d'ordre public, entrainant ainsi pour les actes qui ne les respecteraient pas la sanction de l'annulation. Cette sanction est très sévère, ce qui est justifié par le détournement de la nature même du pouvoir réglementaire. [...]
[...] L'administration, même au sein d'organismes très spécialisés, est soumise au principe de légalité, et se doit donc de respecter la loi comme les principes généraux du droit administratif. Le Conseil d'État précise néanmoins que le principe d'intérêt général que doit respecter l'organisme de droit privé édictant un règlement administratif est « celui d'exercer cette compétence dans l'intérêt général au regard des divers intérêts dont elle a la charge ». Le respect de l'intérêt général est donc adapté : le règlement respecte l'intérêt général relatif à l'objet de son pouvoir réglementaire spécialisé. [...]
[...] Depuis la jurisprudence Monpeurt (Conseil d'État juillet 1942), le critère organique servant à apprécier la finalité de service public est suppléé par un critère matériel relativement aux personnes de droit privé. On s'intéresse à la mission poursuivie par l'organisme, et non à la personne qui le gère. Peu à peu la jurisprudence a étendu la liste des organismes se voyant reconnaître cette spécificité. Particulièrement, par un arrêt F.I.F.A.S. du 22 novembre 1974, le Conseil d'Etat a reconnu qu'un acte administratif pouvait émaner d'organismes sportifs chargés d'organiser des compétitions nationales ou régionales. [...]
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