Conseil d'État 8 juin 2020, ordonnance Association Elena France, principe de collégialité, juridictions administratives, ordonnance du 25 mars 2020, Covid-19, coronavirus, ordonnance du 13 mai 2020, droit d'asile, référé-suspension, CNDA Cour Nationale du Droit d'Asile, état d'urgence sanitaire, OFPRA Office Français de Protection des Réfugiés et Apatrides, crise sanitaire, commentaire d'arrêt
Le 8 juin 2020, le Conseil d'État a rendu une ordonnance rappelant l'importance du principe de collégialité au sein des juridictions administratives. En l'espèce, plusieurs associations contestaient une disposition de l'ordonnance du 13 mai 2020 relative à la modification de l'ordonnance du 25 mars 2020, autrement dit portant sur l'adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif suite à la propagation du virus nommé "Covid-19". La disposition litigieuse se trouvait être l'article premier de l'ordonnance du 13 mai 2020, insérant un article 4-1 dans l'ordonnance du 25 mars 2020. Elle consistait en la généralisation du recours au juge unique afin de statuer sur les litiges relatifs au droit d'asile, aux fins de lutter contre la propagation du nouveau coronavirus, telle que l'indiquait l'habilitation donnée par la loi du 23 mars 2020.
[...] Le référé-suspension, institué à l'article L.521-1 du CJA, en fait partie. Il existe trois conditions principales afin d'obtenir la suspension de l'acte administratif attaqué, ainsi il faut démonter un doute sérieux quant à sa légalité, l'urgence de la situation et le dépôt préalable d'un recours au fond. En effet, les pouvoirs du juge sont limités à la suspension temporaire des dispositions attaquées, puisque le véritable contrôle de légalité sera opéré lors du recours de droit commun, le référé étant une procédure incidente. [...]
[...] Un contrôle efficace des atteintes au principe de collégialité par le juge administratif Le contrôle opéré par le juge des référés peut être qualifié d'efficace sous deux angles différents. D'un point de vue substantiel, le Conseil d'État a réaffirmé le principe de collégialité en limitant strictement les exceptions qui lui sont apportées et d'un point de vue procédural, le référé-suspension a permis un contrôle rapide en interrompant l'exécution de la disposition litigieuse bien qu'il existe quelques réserves sur l'action de la justice administrative en cette période de crise. [...]
[...] La question posée au Conseil d'État est donc de savoir s'il existe un doute sérieux quant à la légalité de l'article 4-1 de l'ordonnance du 25 mars 2020 et si la suspension de cette disposition est justifiée par l'urgence de la situation. La solution apportée par la juridiction suprême de l'ordre administratif suit les conclusions du requérant. En effet, le juge des référés relève d'une part qu'il existe des difficultés inhérentes au fonctionnement normal de la CNDA, tel que l'âge moyen des juges qui les rendrait plus vulnérables à la maladie et que la durée de la disposition posée par l'ordonnance est subordonnée au maintien de l'état d'urgence sanitaire. [...]
[...] Or, ce principe n'est pas absolu et il fait l'objet de nombreuses dérogations au sein des juridictions administratives, notamment en ce qui concerne la CNDA. B. La formation collégiale, un standard juridictionnel mis en danger par l'état d'urgence sanitaire. Le principe de collégialité souffre de nombreuses exceptions de droit commun. L'article L.3 du CJA l'annonce très clairement : « Les jugements sont rendus en formation collégiale, sauf s'il en est autrement disposé par la loi ». Ainsi, l'article R.122-12 du même code permet à un juge unique de statuer par ordonnance pour le Conseil d'État. [...]
[...] Cette décision tranche avec l'action globale du juge administratif lors de cette crise. Confronté à de nombreuses procédures de référé contestant les décisions du pouvoir réglementaire, le juge de l'urgence ne s'est que trop peu attaché à son devoir de contrôle. En témoignent les nombreux recours écartés pour un défaut de la condition d'urgence pour une multitude de référés-suspension ou de référés-liberté, une procédure très largement utilisée pendant la crise. C'est ce que dénonce notamment Nil Symchowicz (Avocat au barreau de Paris, État d'urgence sanitaire et contrôle juridictionnel des mesures de police, AJDA), qui explique que « le défaut d'urgence a joué un rôle de filtre massif » des référés pendant le confinement. [...]
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