Conseil d'État, 7 octobre 1994 - les conséquences de l’annulation d’un acte détachable pris avant la formation du contrat

Extraits

[...] A la suite de cette annonce les époux Lopez ont fait connaître leur intention de se porter acquéreurs du bâtiment au prix fixé par la commune. Entre temps, le Conseil municipal par une délibération, autorisé la cession de l'immeuble à un employé municipal présenté par le maire comme le seul acquéreur déclaré. Un contrat de vente a donc été passé entre le maire de la ville et la mère de cet employé municipal. Les époux locataires de cette propriété, et dont les propositions d'acquisition n'avaient pas été portées par le maire à la connaissance du Conseil municipal, décident de saisir le Tribunal administratif compétent, celui de Clermont-Ferrand, pour obtenir l'annulation de la délibération qui serait, selon eux, entachée de détournement de pouvoir. [...]

[...] Dans cette affaire, il s'agit pour la section du contentieux du Conseil d'Etat de s'interroger sur les conséquences de l'annulation d'un acte détachable pris avant la formation du contrat sur le contrat lui-même. Autrement dit, le juge administratif s'est posé la question de savoir si l'annulation par le juge de l'excès de pouvoir d'un acte détachable autorisant la passation d'un contrat doit avoir, ou non, comme conséquence une obligation pour les parties de saisir le juge du contrat afin que celui- ci se prononce sur la validité de l'acte litigieux ? [...]

[...] Cependant, il est faux de dire que l'annulation d'un acte détachable sera toujours sans effet, la saisine du juge de l'astreinte est envisageable pour lutter contre l'effet platonique du recours B. La saisine du juge de l'astreinte pour lutter contre cet effet platonique Les solutions mises à la disposition du juge de l'astreinte. Le juge de l'astreinte doit au cas par cas apprécier l'annulation d'un acte détachable, il peut en tirer cinq conséquences principales (cf. : notes de Rémy SCHWARTZ D.RFDA 1994 p.1090-1097). [...]

[...] Après l'obtention de l'annulation pour excès de pouvoir (juge de l'excès de pouvoir), au terme d'instances dont la durée est rarement brève, le tiers au contrat devra saisir le Conseil d'Etat à fin d'astreinte (le juge de l'astreinte), lequel condamnera le cas échéant l'administration à engager une procédure devant le juge du contrat Une procédure qui est donc longue et complexe. S'il n'y a aucun tiers qui saisit le juge de l'astreinte la décision administrative annulant un acte détachable est souvent inefficace. En effet, l'annulation de l'acte détachable n'a pas d'effets directs sur la validité du contrat. [...]

[...] Obliger les parties à saisir le juge du contrat. La solution adoptée en l'espèce par le juge de l'astreinte saisi par les époux. Obliger les parties au contrat à saisir le juge judiciaire. Dans certains cas, à défaut d'accord amiable avec son cocontractant, l'administration se voit dans l'obligation de saisir le juge du contrat pour que celui tire les conséquences de l'annulation pour excès de pouvoir de l'acte détachable. Et c'est l'astreinte qui va venir contraindre l'autorité administrative à respecter cette obligation. [...]