Conseil d'Etat 6 septembre 2020, Ministre de la santé et des solidarités, association Les Essentialistes, Auvergne-Rhône-Alpes, police administrative, crise sanitaire, conciliation, liberté, ordre public, contrôle de proportionnalité, commentaire d'arrêt
"Nous sommes en guerre". S'il était encore à caractériser le caractère exceptionnel des circonstances liées à la crise sanitaire qui s'est abattu sur l'ensemble de la planète à l'aube de cette nouvelle décennie, les mots du président de la République seraient de taille à définitivement entériner l'idée de circonstances hors du commun par cet atticisme métaphorique assimilant la lutte contre cet ennemi invisible à un véritable conflit armé.
[...] Le Conseil d'État répond par la positive. En effet, la juridiction administrative suprême considère que la gravité de la situation sanitaire est en mesure de justifier l'édiction de telles mesures, qui sont dès lors proportionnées face aux enjeux d'ordre public, tout en admettant une atteinte sur une mesure particulière, en ce que le port du masque était imposé à l'occasion de la pratique d'une activité sportive. Cette décision des pensionnaires du Palais Royal de Paris amène à procéder à une étude de la conciliation entre liberté et ordre public ainsi qu'au contrôle de proportionnalité opéré par le Conseil d'État, particulièrement imprégné des circonstances exceptionnelles liées à la crise sanitaire (II). [...]
[...] Ce sont précisément ces circonstances exceptionnelles qui conduisent la haute juridiction à consentir à l'établissement de mesures particulièrement restrictives de liberté. En effet, il serait inenvisageable de prendre de telles mesures liberticides sans la particulière inusitée de la situation. Très rapidement reconnues par le Conseil d'État, notamment dans son arrêt de 1919 Dames Dol et Laurent, les autorités de polices administratives peuvent disposer de pouvoirs étendus permettant de porter une atteinte bien plus notable qu'à l'accoutumée en cas de circonstances exceptionnelles. [...]
[...] Ces deux facteurs sont en mesure de justifier l'action de la préfecture rhodanienne d'aggravation de mesures nationales en ce que des circonstances particulières locales sont clairement décelables. À la lumière de ces éléments, la compétence du préfet, ainsi que sa capacité à agir ne semblent faire aucun doute quant à la possibilité de prendre de telles mesures restrictives de liberté. Cela dit, l'association requérante conteste l'opportunité de ces mesures, conduisant le juge administratif à opérer un contrôle de la proportionnalité. [...]
[...] L'interrogation qui reste cependant en suspens, et dont il est question dans cette prise de position du juge administratif suprême, relève de l'atteinte grave et manifestement illégale d'une mesure de police administrative à l'une de ces libertés fondamentales. Avant même l'étude de la proportionnalité de la mesure, il convient d'emblée de rappeler la décision du Conseil d'État de 1917 Baldy, et plus exactement les conclusions de Corneille qui y définit la liberté comme la règle et la restriction de police comme l'exception. Pour ce qui est de l'opportunité de la requête de l'association, un arrêt récent et tout à fait en lien avec cette problématique convient d'être porté au débat. [...]
[...] Des libertés sont ainsi donc bel et bien mises en péril par la production de telles mesures par le préfet rhodanien. Il n'en demeure pas moins, que la sauvegarde de l'ordre public reste la préoccupation principale de l'autorité administrative à l'occasion de l'édiction de ces actes. B. La sauvegarde de l'ordre public, la prise en compte d'une réalité locale L'arrêté préfectoral est adopté dans une période où l'expectative est de mise, avec d'une part l'assouplissement des mesures nationales lié à la sortie de l'état d'urgence sanitaire, mais avec une présence tout aussi pesante de la menace d'une ré aggravation de la situation sanitaire. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture