Commentaire d'arrêt du 5 mai 1944, Conseil d'Etat, arrêt Dame veuve Trompier-Gravier, sanction administrative, R.E.P. et droits de la défense, occupation d'un kiosque à journaux, décision préfectorale, retrait-sanction d'une autorisation nominative, arrêt Terry du 20 juin 1913, principe du contradictoire, article 55 de la Constitution du 4 octobre 1958, articles 9 et 16 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme
Sanction nominative par voie de retrait d'une autorisation administrative et respect des droits de la défense : c'est ce dont il est question dans cet arrêt rendu par le Conseil d'État le 5 mai 1944, arrêt dit Dame veuve Trompier-Gravier. Par décision en date du 26 décembre 1939, le préfet de la Seine a retiré l'autorisation d'occupation d'un kiosque à journaux dont était titulaire une personne bénéficiaire, veuve de son état. Cette décision de retrait était motivée par un grief à l'encontre du bénéficiaire, à savoir une faute dont il se serait rendu coupable. Cette décision préfectorale, acte administratif unilatéral individuel et nominatif, avait été prise, selon les termes de l'arrêt, sans que le bénéficiaire ne puisse faire valoir de défense contre celle-ci.
Un recours pour excès de pouvoir a été pratiqué devant le Conseil d'État en vue de l'annulation de cette décision de retrait-sanction. La question qui se posait au Conseil d'État était de savoir si une décision de retrait d'un acte administratif nominatif d'attribution d'une autorisation d'occupation d'un kiosque à journaux, motivée par un grief pris d'une faute de son bénéficiaire, veuf de son état, pouvait être prise, sans autre formalité, au regard des circonstances et de la gravité de la sanction ? Le Conseil d'État prononce l'annulation de la décision de retrait d'autorisation, au motif "qu'eu égard au caractère que présentait dans les circonstances susmentionnées le retrait de l'autorisation et la gravité de cette sanction, une telle mesure ne pouvait légalement intervenir sans que" le bénéficiaire de l'autorisation "eût été mis à même de discuter les griefs formulés contre" lui.
[...] I – Principe de respect des droits de la défense en matière de droit administratif Une pierre nouvelle apportée à l'édifice des droits de la défense en matière administrative Une jurisprudence initiale avait été adoptée par le Conseil d'État, dans un arrêt du 20 juin 1913 (CE 20 juin 1913, n°41854, arrêt Terry, lien), dans laquelle le juge administratif prononçait l'annulation d'une décision de sanction d'un organe disciplinaire, en l'occurrence le Conseil supérieur de l'instruction publique, à l'encontre d'un employé de l'instruction publique, en raison d'un non-tissé en situation du destinataire de pouvoir présenter sa défense à l'ensemble des membres du jury l'ayant prononcée. Le juge administratif consacrait les droits de la défense pour toute personne mise en cause, et ce, dans le cadre d'une sanction prise à son encontre. [...]
[...] Conseil d'Etat mai 1944, Dame veuve Trompier-Gravier – Sanction administrative, R.E.P. et droits de la défense Sanction nominative par voie de retrait d'une autorisation administrative et respect des droits de la défense : c'est ce dont il est question dans cet arrêt rendu par le Conseil d'État le 5 mai 1944, arrêt dit Dame veuve Trompier-Gravier. Par décision en date du 26 décembre 1939, le préfet de la Seine a retiré l'autorisation d'occupation d'un kiosque à journaux dont était titulaire une personne bénéficiaire, veuve de son état. [...]
[...] L'article 9 dispose que « tout homme étant présumé innocent jusqu'à ce qu'il ait été déclaré coupable, s'il est jugé indispensable de l'arrêter, toute rigueur qui ne serait pas nécessaire pour s'assurer de sa personne doit être sévèrement réprimée par la loi », et l'article 16 d'énoncer que « toute Société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n'a point de Constitution ». C'est dans la droite ligne des principes constitutionnels de présomption d'innocence et de garantie des droits que s'inscrit l'arrêt rendu par le Conseil d'État. [...]
[...] Ce n'était pas le retrait pour faute en soi qui était jugé, mais le retrait faisant grief en l'absence d'invitation préalable du bénéficiaire à présenter sa défense. Le principe du respect des droits de la défense est consacré sous forme de principe général du droit, ayant acquis la valeur d'un principe fondamental (II). II – Consécration d'un principe général du droit devenu norme fondamentale Par cet arrêt, le juge administratif a consacré un principe fondamental, devant être étendu à toute décision administrative de sanction de même qu'à la matière contentieuse comme principe directeur du procès ; ce principe a été réitéré au niveau international Une jurisprudence concernant une décision administrative de retrait- sanction a fortiori applicable en matière de recours contentieux devant le juge Le principe du respect des droits de la défense dans l'arrêt rendu par le Conseil d'État le 5 mai 1944 s'inscrivait dans un cadre administratif au sens organique, avant toute phase contentieuse. [...]
[...] Le Conseil d'État prononce l'annulation de la décision de retrait d'autorisation, au motif « qu'eu égard au caractère que présentait dans les circonstances susmentionnées le retrait de l'autorisation et la gravité de cette sanction, une telle mesure ne pouvait légalement intervenir sans que » le bénéficiaire de l'autorisation « eût été mis à même de discuter les griefs formulés contre » lui. L'arrêt rendu par le Conseil d'État le 5 mai 1944 concernant une décision de retrait prise le 26 décembre 1939 pose une pierre nouvelle à l'édifice des droits de la défense en matière de droit administratif. En l'occurrence, cette décision pose le principe du contradictoire en matière de décision administrative-sanction, consistant dans le fait de permettre à son destinataire de présenter une défense préalable. [...]
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