S'estimant concurrencé dans son activité de conseil juridique, L'Ordre des avocats au barreau de Paris exerce un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation du décret du 19 octobre 2004 portant création d'un de ces organismes experts, la « Mission d'appui à la réalisation des contrats de partenariat » qui dispose en son article 2 que cet organisme expert fournit aux personnes publiques qui le demandent un appui dans la préparation, la négociation et le suivi des contrats de partenariat. On précise que l'obligation de recourir à cette mission d'appui ne s'applique qu'à l'Etat et ses établissements publics. S'agissant des collectivités locales et des leurs établissements publics, il ne s'agit que d'une faculté.
Le Conseil d'État écarte dans un premier temps le moyen selon lequel le décret aurait illégalement étendu la compétence de la Mission d'appui. L'Ordre soutenait ensuite que le décret méconnaissait le principe de la liberté du commerce et de l'industrie, le principe qu'il qualifiait de « loyale concurrence » et les principes généraux du droit de la commande publique. S'estimant concurrencé dans son activité de conseil juridique, l'Ordre des avocats au barreau de Paris exerce un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation du décret du 19 octobre 2004.
Le Conseil d'Etat ne s'attardera par sur la commande publique pour se centrer sur la question (récurrente) de la légalité voire de la légitimité de l'initiative publique en matière économique : Est-il possible pour une personne publique de créer un service, alors que des personnes privées le rendent déjà ? Dans l'affirmative, quelles doivent être les modalités de cette intervention ?
[...] Casas les deux questions ne se situent pas sur le même plan. L'une est au niveau des principes (liberté du commerce et de l'industrie), l'autre des modalités (concurrence) Après avoir, comme on l'a déjà dit, réaffirmé sa jurisprudence relative au principe de la liberté du commerce et de l'industrie, il précise ensuite la manière dont il entend appliquer les modalités de la libre concurrence à cette intervention publique. Ainsi, une fois admise dans son principe, une telle intervention ne doit pas se réaliser suivant des modalités telles qu'en raison de la situation particulière dans laquelle se trouverait cette personne publique par rapport aux autres opérateurs agissant sur le même marché, elle fausserait le libre jeu de la concurrence sur celui-ci Ainsi la personne publique pourrait renoncer à ses avantages susceptibles de fausser la concurrence ? [...]
[...] Ainsi, le principe de liberté du commerce et de l'industrie demeure mais n'interdit plus l'interdiction publique qui est cependant soumise à condition. Par la suite, la condition de carence de l'initiative privée et la conception des besoins à satisfaire ont été assouplies et élargies. La société s'est montrée favorable à une extension des initiatives publiques quasiment en toutes circonstances comme en témoigne plusieurs jurisprudences, CE 1964, Ville de Nanterre Légalité d'initiatives publiques même en présence d'activités privées comparables et ce au motif d'intérêt général et en fonction de circonstances d'espèce Elles peuvent aussi agir pour d'autres collectivités publiques en se portant candidates à l'attribution de leurs contrats (MP ou DSP) : CE Avis Société Jean Louis Bernard Consultants aucun texte ni aucun principe n'interdisent en raison de sa nature, à une personne publique, de se porter candidate à l'attribution d'un marché public ou d'un contrat de délégation de service public Ainsi, le CE rappelle ici le principe de la possible intervention des personnes publiques et les conditions de cette intervention tenant au respect de la liberté du commerce et de l'industrie : pour intervenir sur un marché, elles doivent, non seulement agir dans la limite de leurs compétences mais également justifier d'un intérêt public, lequel peut résulter notamment de la carence de l'initiative privée (Position classique du CE depuis la jurisprudence Ville de Nevers) La possibilité pour les personnes publiques de prendre de telles initiatives les met donc à égalité avec les personnes privées. [...]
[...] Suivant ces conclusions, le CE affirme que l'article 2 du décret contesté s'est borné à mettre en œuvre la mission d'intérêt général, qui relève de l'Etat, de veiller au respect, par les personnes publiques et les personnes privées chargées d'une mission de service public, du principe de légalité Interprétation neutralisante de la notion de négociation qui aurait pu laisser penser que le décret allait jusqu'à donner à la Mission le pouvoir d'assister concrètement les personnes publiques pendant la phase dite de dialogue compétitif de passation des contrats de partenariat. [...]
[...] Cependant, les principes juridiques ainsi rappelés qui protègent l'initiative privée et les conditions de la concurrence connaissent les limites qui sont celles du marché lui-même. Dès lors qu'une activité n'a pas de caractère marchand, l'invocation de ces règles et principes, (tout comme l'argumentation tiré du droit communautaire) devient sans portée (D. Casas) Partie 2 : Le refus d'appliquer les règles concurrentielles au conseil juridique délivré par l'Etat Considérant que l'activité de conseil en cause relève de la mission d'intérêt général de l'Etat, le CE refuse de considérer que l'Etat intervient à ce titre dans le cadre du marché Cette solution qui se veut pragmatique est cependant critiquable dans certains de ces effets A : Le conseil juridique de l'Etat : une activité hors du commerce Dans le cadre de cette Mission d'appui, l'Etat donne des conseils à des personnes publiques et à des personnes privées chargées d'une mission de service public sur la façon d'appliquer les textes. [...]
[...] De plus cette mission doit être rattachée au rôle traditionnellement dévolu à l'Etat de prendre, dans l'intérêt public, les dispositions nécessaires au respect des lois. L'idée étant de considérer que parce que l'Etat souverain dispose du monopole de l'édiction de la norme juridique, il est aussi le garant ultime de la bonne application de celle-ci. Ainsi, lorsque l'Etat prodigue des conseils, même s'il le fait en réponse à des demandes, il ne s'inscrit pas dans une logique de commande publique. Il ne fait que remplir sa mission régalienne. [...]
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