Le 8 novembre 2006, l'association locale pour le culte des témoins de Jéhovah a demandé à la mairie de Lyon, la location d'une salle municipale pour le 2 avril de la même année. Celle-ci a produit une décision de refus le 9 janvier et l'a justifiée le 23 février 2006 par le caractère sectaire de l'association des témoins de Jéhovah. La municipalité lyonnaise a également considéré que le tarif de la salle était plus favorable que celui des salles privées et qu'en conséquence la location d'une telle salle à ladite association relevait de la subvention d'un culte, subvention interdite par la loi de 1905.
L'association des témoins de Jéhovah saisit le juge des référés du tribunal administratif en vue d'obtenir la location par la ville de Lyon d'une salle municipale. Celui-ci dans une ordonnance du 15 mars suspend l'exécution de la décision de refus et enjoint à la ville de louer une salle à l'association pour le 2 avril et cela pour sauvegarder la liberté fondamentale de réunion, victime selon lui d'une « atteinte grave et manifestement illégale ». La ville de Lyon interjette appel devant le Conseil d'Etat qui remplit le rôle de juge d'appel lors de la demande d'annulation d'ordonnances émises par le juge de référés. Le Conseil d'Etat doit ici statuer sur la régularité de l'ordonnance et sur la légalité de la décision de refus.
[...] A ce stade les juges du Conseil d'Etat ne statuent pas sur la décision de refus, ils vérifient uniquement que la décision a été justifiée par le juge des référés. L'atteinte grave à la liberté fondamentale de réunion semble réelle puisqu'une l'interdiction faite aux témoins de Jéhovah de louer une salle municipale s'apparente à un refus de la tenue de leur réunion. Une telle interdiction avait déjà été annulée par le juge administratif pour atteinte à la liberté fondamentale de réunion lors de l'arrêt du 19 août 2002 Front national relatif à la tenue de l'université du front national refusée par le maire d'Annecy pour un motif d'ordre public qui ne justifiait pas ledit refus. [...]
[...] Cet argument étant lui aussi écarté, les juges de cassation ont conclu logiquement au rejet de la requête de la ville de Lyon. Plus généralement, comme l'ont souligné les différents commentateurs, c'est un problème plus global sur les difficultés rencontrées par les communes pour lutter contre les dérives sectaires qui est posé aux juges et surtout au législateur. [...]
[...] Le caractère cultuel de l'association des témoins de Jéhovah rappelé par le Conseil d'Etat est établi depuis longtemps (arrêt du Conseil d'Etat du 1er février 1985, association chrétienne les témoins de Jéhovah) et ne fait pas ici débat. La loi de 1905 lui est opposable. En l'espèce, le Conseil refuse de voir dans la location à une association d'une salle municipale dont le tarif est inférieur, une quelconque subvention puisque la municipalité n'a pas démontré que les témoins de Jéhovah avaient la possibilité de louer une salle privée à la date qu'ils avaient demandée. [...]
[...] Par ailleurs, le Conseil d'Etat constate également que la municipalité lyonnaise ne fait pas état de motifs relatifs aux nécessités de l'administration des propriétés communales ou du fonctionnement des services Globalement le Conseil d'Etat s'est attaché à vérifier si les deux critères jurisprudentiels pour arguer d'un refus de location à une association étaient réels. En l'espèce l'un n'est même pas invoqué et l'autre l'est de manière injustifiée. Dès lors c'est logiquement que le Conseil d'Etat a reconnu l'atteinte grave et l'illégalité manifeste constatées par le juge des référés. Les juges de cassation ont également refusé d'admettre le second argument de la ville de Lyon relatif à la prohibition de la subvention des cultes. [...]
[...] En l'espèce le Conseil d'Etat a confirmé la décision du juge des référés, en considérant que la mairie de Lyon ne faisait Etat d'aucune menace à l'ordre public Dès lors, uniquement lié au caractère sectaire de l'association, le motif d'ordre public est inexistant . Le Conseil d'Etat s'est probablement appuyé sur la décision du tribunal administratif de Paris du 13 mai 2004 association cultuelle des témoins de Jéhovah et autres relative à l'opposition de la mairie de Paris au contrat passé entre le stade Charlety et les témoins de Jéhovah qui se justifiait là aussi par un motif d'autre public inexistant. [...]
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