Conseil d'Etat 30 juin 2004, arrêt Département de la Vendée, utilisation du domaine public maritime, liberté du commerce, mission de service public, actes de puissance publique, collectivités territoriales, ordonnance du 1er décembre 1986, droit de la concurrence, arrêt Société Million et Marais, arrêt Ville de Palmiers, principe d'égalité, commentaire d'arrêt
En l'espèce, le Conseil d'État était saisi d'un recours pour excès de pouvoir formé à l'encontre d'un arrêté du président du Conseil Général de la Vendée, dont l'objet tendait à réglementer l'utilisation des installations portuaires de Fromentine, faubourg de la commune de La Barre-de-Monts. Le requérant, un opérateur privé dénommé Vedettes Inter-Îles Vendéennes, assurait depuis ce port la desserte de l'île d'Yeu et reproche donc à l'arrêté de lui imposer des restrictions d'accès non justifiées, notamment au regard de la liberté accordée aux vedettes de la régie départementale.
Afin d'obtenir l'annulation de cet acte, ladite société a d'abord saisi le tribunal administratif de Nantes, qui l'a déboutée de sa demande par un jugement rendu le 6 janvier 2000. L'appel a été interjeté devant la Cour d'appel de Nantes qui a infirmé la décision prise en première instance, par un arrêt rendu le 28 juin 2002, prononçant l'annulation de plusieurs articles de l'arrêté. Le département de la Vendée s'est donc pourvu en cassation devant le Conseil d'État.
[...] Cette inférence est toutefois critiquable, en ce qu'elle fait véritablement douter de la réelle réception du droit de la concurrence dans le domaine public. Elle sera toutefois consacrée par la jurisprudence Ordre des avocats au barreau de Paris, rendu par le Conseil d'État le 21 mai 2006, soit 2 ans après la présente décision, et qui dispose que « les personnes publiques sont chargées d'assurer les activités nécessaires à la réalisation des missions de service public dont elles sont investies et bénéficient à cette fin de prérogatives de puissance publique ». [...]
[...] Dès lors, la mission du Conseil d'État, au-delà de celle visant à reconnaître la légitimité des facilités, s'étend également à en apprécier la régularité. Ce rôle est notamment celui consacré par la jurisprudence Société Eda rendue par le Conseil d'État le 26 mars 1999, qui disposait « qu'il appartient aux juges de l'excès de pouvoir [ . ] de s'assurer que ces actes ont été pris compte tenu de l'ensemble de ces principes et de ces règles et qu'ils en ont fait, en les combinant, une exacte appréciation ». [...]
[...] C'est notamment ce que constate le rapport public du Conseil d'État Collectivité publique et concurrence publié en 2002. Ce rapport dispose que « L'idée de concurrence, porteuse des valeurs sociales de liberté et de rationalité économique, s'est en fait propagée comme une onde et a heurté d'autres valeurs telles que l'égalité, la solidarité et la sécurité portées par les collectivités publiques dans tous les pays de la Communauté européenne, fût-ce de façon non homogène, et traditionnellement résumées en France dans l'idée de service public ». [...]
[...] En ce sens, la présente décision procède au rappel du principe qui s'applique en la matière : « considérant que s'il appartient aux collectivités et personnes morales publiques, auxquelles sont affectées ou concédées les installations des ports maritimes, de permettre l'accès aussi large que possible des armements à ces installations, elles n'en sont pas moins corollairement en charge de fixer [ ] des conditions d'utilisation de ces installations propres à assurer la sécurité des usagers et la protection des biens du domaine public maritime ». Le Conseil d'État dresse ainsi un constat évident : si les installations portuaires sont à la disposition des armements, la gestion du domaine public maritime n'en reste pas moins la compétence des autorités administratives concernées, qui peuvent donc en réglementer l'utilisation. Cette réglementation, unilatérale et jouissant des avantages inhérents aux prérogatives de puissance publique, doit cependant agir dans le cadre des besoins spécifiques des ports, en matière de sécurité notamment. [...]
[...] D'une manière plutôt classique, le service public jouit ainsi d'un régime particulier, avantageux, octroyé par l'administration en vertu de ses prérogatives de puissance publique, son apanage le plus discutable. La gestion inégalitaire du domaine public ne semblait pouvoir ne souffrir d'aucun recours, en ce que l'administration disposait de ce moyen exorbitant. C'était sans compter la récente réception des principes économiques en matière administrative, obligeant le Conseil d'État à conditionner l'octroi de ces facilités au respect de la liberté du commerce et de l'industrie, ainsi qu'au droit de la concurrence. B. [...]
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