Dans l'arrêt rendu le 30 décembre 2003 par le Conseil d'État, Comité contre la guerre en Irak et a..., ce dernier requiert l'annulation d'une décision des autorités françaises autorisant les avions militaires américains et britanniques accomplissant des missions en Irak à emprunter l'espace aérien français, et ce, en se basant sur l'article 6 de la Convention Européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales disposant en son premier paragraphe que « toute personne à droit à ce que sa cause soit entendue équitablement... ».
Cependant, pour le Conseil d'État, la décision remise en cause n'est pas « détachable de la conduite des relations internationales de la France », ce qui pose le problème de savoir si l'absence de tout contrôle juridictionnel conduit à méconnaître l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme. Dans sa décision, la juridiction suprême répond par la négative en rejetant sa compétence concernant ce litige.
[...] Dans l'hypothèse où le Conseil d'Etat se prononcerait, il interférait et serait obligé de s'immiscer dans ces relations internationales dans la mesure où sa décision, quelle qu'elle soit, aurait de lourdes conséquences. La décision étant un acte de gouvernement, elle bénéficie d'une immunité juridictionnelle dans la mesure où pour les actes de gouvernement stricto sensu, l'irresponsabilité reste la règle. Il est important de remarquer que, parfois, le Conseil Constitutionnel accepte de connaître d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre la décision du chef de l'Etat agissant en tant qu'organe politique (Ccl juillet 2000 Hauchemaille) et alors que le Conseil d'Etat y voit un acte de gouvernement Ass octobre 1962 Brocas). [...]
[...] Dans sa décision, la juridiction suprême répond par la négative en rejetant sa compétence concernant ce litige. Il faut rappeler que si l'administration devait s'affranchir de toute règle, les administrés seraient alors exposés à l'arbitraire de l'administration. C'est parce que cet arbitraire est possible que l'abus de pouvoir est alors possible, d'où la nécessité de règles par lesquelles il sera alors possible de sanctionner un tel excès de pouvoir. Ces règles sont incluses dans le principe de légalité qui constitue l'obligation faite au sujet de droit de respecter le droit. [...]
[...] Néanmoins, en fonction de la nature de certains actes et en fonction de certaines circonstances particulières, le législateur et la jurisprudence prévoient des mécanismes destinés à atténuer les régimes de l'application du principe de légalité, parmi lesquels il faut distinguer les actes de gouvernement. Sans nécessairement mentionner les termes acte de gouvernement l'arrêt du 30 décembre 2003 y fait référence pour justifier l'incompétence de la juridiction administrative. Il faut alors se demander si la décision mise en cause par le comité contre la guerre en Irak constitue bien un acte de gouvernement. Pour cela, il faudra appréhender la théorie des actes de gouvernement par rapport au principe de légalité tout en étudiant le fondement juridique de l'arrêt du 30 décembre 2003 (II.). I. [...]
[...] On a alors fini par admettre l'idée de la dénomination d'actes de gouvernement. Ainsi, quand le Conseil d'Etat devint juge, il reprit cette conception selon laquelle les actes de gouvernement ne relèvent pas de sa compétence 1er mai 1822 LAFFITTE, le refus de paiement d'une rente cédée au banquier Laffitte par la princesse Borghèse est un acte de gouvernement). Ensuite, à partir du Second Empire, une théorie jurisprudentielle d'ensemble de l'acte de gouvernement est entreprise à la suite de l'arrêt du 18 juin 1852, Prince d'Orléans (des biens ayant faits l'objet d'une donation au profit de la famille de Louis Philippe de la part de l'Etat firent restituer à l'Etat, cette décision fut contestée mais le CE dit que cette dernière était un acte de gouvernement en vertu du but politique poursuivi par les autorités). [...]
[...] Ainsi, c'est parce que la décision des autorités françaises est un acte de gouvernement que l'article 6 de la CEDH ne peut s'appliquer, mais le fait de refuser tout contrôle juridictionnel ne revient pas non plus à méconnaître cet article 6. Dans notre espèce, c'est donc le fait de ne pouvoir appliquer l'article 6 de la CEDH sans pour autant le méconnaître qui conduit à en déduire que la décision est un acte de gouvernement, et par voie de conséquence, conduit le Conseil d'Etat à se déclarer incompétent pour recevoir le recours pour excès de pouvoir déposé par le comité contre la guerre en Irak. [...]
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