Le dualisme existant entre les juridictions administrative et judiciaire est la cause de l'existence de critères de compétence qui permettent de déterminer qui du juge administratif ou du juge judiciaire est à même de connaître un litige. Un critère essentiel de la compétence administrative est celui du service public. On constate en effet que la plupart des établissements reconnus comme étant gestionnaires de service public vont se voir rattachés à la justice administrative. Néanmoins, on observe qu'il existe au sein même du critère de service public une distinction entre deux types de services : d'une part, les services publics administratifs (SPA) et d'autre part les services publics industriels et commerciaux (SPIC), qui ne sont pas soumis aux mêmes règles de compétence. En effet, si les litiges résultant de l'activité des SPA sont de la compétence du juge administratif, ceux découlant des actes des établissements gérant des SPIC sont (la plupart du temps) de la compétence du juge judiciaire.
Néanmoins, on constate à travers les deux décisions étudiées que ces critères ne permettent pas toujours de déterminer une nature unique du service public. En l'espèce, l'établissement public duquel la responsabilité est mise en cause n'effectue pas une activité qualifiable uniquement de SPIC ou de SPA, mais un plutôt un entremêlement de ces deux types de services. La question étudiée par le Conseil d'Etat est donc bien une question de compétence. Nous allons observer en quoi l'activité de l'établissement étudié peut être qualifiée de SPIC ou de SPA, et quel est l'avis de la jurisprudence quant à la compétence des juges administratifs et judiciaires.
[...] Ainsi, on observe que le Conseil d'État choisit de ne pas appliquer la loi de façon stricte, mais va détourner son sens en partie en établissant une règle contraire à celle énoncée par la loi. Il va ainsi distinguer deux prérogatives de Voies navigables de France, qu'il va rendre déterminante quant à la nature administrative ou commerciale du service fourni. La distinction opérée par le Conseil d'État entre la nature administrative et sa nature commerciale du service Le Conseil d'État ne fait tout de même pas figure de mauvais élève. Il est de toute façon soumis à la définition du service établie par la loi. [...]
[...] Nous allons observer en quoi l'activité de l'établissement étudié peut être qualifiée de SPIC ou de SPA, et quel est l'avis de la jurisprudence quant à la compétence des juges administratifs et judiciaires. Des décisions présentant de nombreux points communs L'établissement en cause dans les deux affaires Dans ces deux arrêts, le Conseil d'État est confronté à la question de la compétence administrative ou judiciaire concernant un litige résultant de l'activité de l'établissement Voies Navigables de France. Celui-ci est défini par l'article 176 du Code du domaine fluvial et de la navigation intérieure, tel que résultant de la loi du 31 décembre 1991, comme un ‘établissement public industriel et commercial' ; de ce fait, une application stricte de la loi ordonnerait que l'on classe les services fournis par cet établissement dans la catégorie des SPIC et que les litiges résultant de leur mise en œuvre soient de la compétence du juge judiciaire. [...]
[...] Nul besoin ici d'être un membre du Conseil d'État pour constater que l'acte d'encourager un particulier à conclure un contrat de vente peut être facilement effectué par une personne privée s'apparentant à un particulier et non à un gestionnaire de service public, et que cet acte n'exprime en rien la mise en œuvre de prérogatives de puissance publique. Ainsi, il est naturel que cet acte soit considéré comme un simple acte commercial régit par le droit privé et soit de ce fait destiné à être étudié par les juges judiciaires. [...]
[...] Dans le premier arrêt, la question de droit pourrait être de savoir si les litiges résultant de la mise en œuvre de prérogatives de puissance publique par un établissement public définissent par la loi comme ‘industriel et commercial' sont tout de même de la compétence du juge judiciaire ; question à laquelle le CE répond que non. Dans le second arrêt au contraire, la question de droit est celle de savoir si l'existence d'une règle jurisprudentielle contredisant la loi quant à la compétence du juge administratif concernant les litiges issus de l'activité d'un établissement industriel et commercial signifie que le juge administratif est compétent même lorsque la prestation qui a causé le litige est de nature commerciale ; ici encore, le CE répond par la négative. [...]
[...] Néanmoins, il corrige celle-ci, ce qui, on le constate aisément, permet d'opposer un compromis au fait que les SPIC sont soustraits à la compétence du juge administratif. Ce compromis a la nature suivante : en observant l'objet même du service et la nature des prestations qu'il offre, le CE différencie les missions de nature industrielle et commerciale de Voies navigables de France et ses missions purement administratives En effet, il établit dans l'arrêt Houté que les relations de Voies navigables de France avec ses usagers, telles que la traction ou le tonnage sont de natures industrielles et commerciales, et sont donc de la compétence judiciaire, tandis que ses activités tendant à donner aux bateaux de navigation intérieure, dans le cadre des pouvoirs dévolus aux bureaux d'affrètement, une utilisation conforme aux exigences de l'intérêt public sont des activités de nature administrative et relèvent donc de la compétence du juge administratif. [...]
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