Une directive, d'après la définition qu'en donne l'article 249 du traité de l'Union européenne, est « un acte qui lie Etat membre quant aux résultats à atteindre, en laissant aux instances nationales la compétence quant à la forme et aux moyens ». La directive est donc une norme obligatoire, mais sans effet direct, et elle nécessite une transposition par l'Etat. Reste à savoir, quelle est la place accordée à cet acte du droit communautaire, par rapport au droit interne. Le Conseil d'Etat, dans un arrêt de section du contentieux, en date du 3 décembre 1999,y a apporté quelques éléments de réponse.
En l'espèce, les associations ornithologique et mammalogique de Saône-et-Loire, et France nature environnement avaient demandé au ministre chargé de la chasse de fixer « les dates d'ouverture anticipée et de clôture temporaire de la chasse au gibier d'eau », conformément à sa compétence réglementaire qu'il tient de l'alinéa 1er de l'article L.224-2 du code rural, disposant que « Nul ne peut chasser en dehors des périodes d'ouverture de la chasse fixées par l'autorité administrative » et de l'article R-224-6 de ce même code disposant que « Le Ministre chargé de la chasse peut […] autoriser la chasse au gibier d'eau avant la date d'ouverture générale ». Ce dernier a refusé d'exercer sa compétence réglementaire, en matière de fixation des dates d'ouverture et de clôture de la chasse, par les décisions du 30 juillet et 20 août 1998, au motif qu'il n'en a plus la compétence. En effet, il invoque la loi du 3 juillet 1998, qui modifie l'article L 224-2 en introduisant les dispositions de l'alinéa 2 (de cet article), entendant fixer elle-même ces dates. Toutefois, les associations évoquent l'incompatibilité de cette loi, avec la directive du 2 avril 1979.
A la suite de quoi, les associations ont saisi le Conseil d'Etat en recours pour excès de pouvoir. Elles demandent l'annulation des dispositions ministérielles de 1998, en invoquant le moyen que l'incompétence du Ministre, chargé de la chasse, ne pouvait être légalement justifiée, car la loi du 3 juillet 1998 n'avait pas abrogé les articles L. 224-2 et R. 224-6 du code rural. Elles ajoutent, en outre, que les dispositions de l'alinéa 2 de l'article L. 224-2 ne pouvaient s'appliquer, en raison de leur incompatibilité avec la directive de 1979 (objectifs de préservation des espèces).
Le problème juridique, en l'espèce, était donc le suivant : une norme de droit interne, qui est postérieure et incompatible à une directive européenne, est-elle applicable en droit interne ? Le Conseil d'Etat sur le fondement de l'article 189 du Traité des Communautés Européennes, s'exprimant ainsi dans son arrêt : « Les autorités [administratives] ne peuvent édicter des dispositions qui seraient incompatibles avec les objectifs définis par ces directives », a donné raison aux associations requérantes. Les juges de la Cour suprême ont ainsi annulé les décisions ministérielles de 1998, au motif que, l'alinéa 2 de l'article L. 224-2 étant incompatible avec la directive, n'était pas applicable ; et que par conséquent, le Ministre chargé de la chasse, était compétent pour fixer les dates d'ouverture et de clôture de la chasse.
[...] Après avoir évoqué la nature d'une directive, nous allons maintenant nous attacher à ses efforts en droit interne. II- Les effets d'une directive communautaire en droit interne Si une décision de droit interne est incompatible avec une directive, alors cette dernière est inapplicable ou annulée et la responsabilité (délictuelle) de l'Etat peut être engagée L'inapplicabilité ou l'annulation des décisions incompatibles avec une directive C'est l'administration elle-même qui a élaboré les règles auxquelles elle est soumise. Le juge administratif est donc à l'origine du bloc de légalité, dans lequel il précise la valeur juridique des sources administratives. [...]
[...] Le Conseil d'Etat sur le fondement de l'article 189 du Traité des Communautés Européennes, s'exprimant ainsi dans son arrêt : Les autorités [administratives] ne peuvent édicter des dispositions qui seraient incompatibles avec les objectifs définis par ces directives a donné raison aux associations requérantes. Les juges de la Cour suprême ont ainsi annulé les décisions ministérielles de 1998, au motif que, l'alinéa 2 de l'article L. 224-2 étant incompatible avec la directive, n'était pas applicable ; et que par conséquent, le Ministre chargé de la chasse, était compétent pour fixer les dates d'ouverture et de clôture de la chasse. [...]
[...] 224-2, était incompatible avec les objectifs de la directive de 1979, et a fortiori inapplicable, du fait qu'il s'agit d'une loi. Si le texte incompatible avait été un règlement, il aurait été annulé. (cf. arrêt CE Fédération française des sociétés de protection de la nature). Un règlement est donc annulé, une loi ne pourra être qu'écartée, car l'annulation d'une loi ne relève pas de la compétence du juge administratif. Par ailleurs, il convient de s'attacher aux sanctions de l'Etat qui a été déclaré fautif dans cet arrêt. [...]
[...] arrêt, CE syndicat des commissaires et hauts fonctionnaires de la police nationale). Enfin, il existe une deuxième sanction de l'Etat, au motif que le ministre n'a pas écarté l'application d'une loi inconventionnelle. La loi de 1998, postérieure à la directive n'était pas conforme aux objectifs de cette dernière. C'est pourquoi, dans cet arrêt, le Conseil d'Etat donne raison aux associations requérantes, et condamne l'Etat à annuler les décisions ministérielles de 1998 et à verser des dommages et intérêts à l'association France Nature environnement. [...]
[...] Le contrôle de conventionnalité du juge administratif Les autorités administratives doivent prendre des mesures régulières, c'est-à-dire conformes au droit. C'est le juge administratif, qui vérifie que les actes administratifs sont conformes au droit. Il exerce donc un contrôle de conventionnalité des lois. C'est le cas, en l'espèce, puisque le Conseil d'Etat vérifie que la loi est compatible avec la directive communautaire. Notons que parfois, le rôle du juge administratif se limite à un simple contrôle de compatibilité : la règle inférieure doit simplement ne pas être contraire à la règle supérieure. [...]
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