« Ouvrage mal planté ne se détruit pas ». Ce célèbre adage consacre le principe d'intangibilité des ouvrages publics, règle prétorienne consacrée par le juge administratif dans l'arrêt Robin de la Grimaudière du 7 juillet 1853 et justifiée par la sauvegarde de l'intérêt général auquel l'ouvrage est affecté. Cependant, le Conseil d'État, par un arrêt du 29 janvier 2003, Syndicat départemental de l'électricité et du gaz des Alpes-Maritimes, opère un revirement en admettant la « tangibilité » des ouvrages publics.
Par un arrêté du 14 août 1996, le préfet des Alpes-Maritimes a approuvé le tracé d'une ligne électrique aérienne basse tension destinée à desservir le quartier « Le Pouet » dans la commune de Clans. Saisi par Mme G., le Tribunal administratif de Nice a annulé cet arrêté par un jugement du 31 décembre 1996 au motif que la création de cette ligne électrique, destinée à desservir une seule habitation, au demeurant déjà desservie en électricité, était dépourvue d'utilité publique.
Le Conseil d'État, par cet arrêt, a eu à traiter de la question de l'utilisation par le juge administratif de ses pouvoirs d'injonction pour ordonner la démolition d'un ouvrage public. Il s'agit donc de savoir si cet arrêt consacre un véritable abandon du principe d'intangibilité des ouvrages publics ou s'il n'en constitue qu'une atténuation s'inscrivant dans le prolongement de la jurisprudence antérieure.
[...] Par conséquent, le transfert de propriété ne peut intervenir qu'à la suite d'une procédure régulière d'expropriation si aucun accord amiable n'a été trouvé entre l'administration et le propriétaire privé évincé. En ayant prise cette décision, la Cour de cassation prive le principe d'intangibilité des ouvrages publics de l'un de ses effets les plus intéressants pour l'administration, mais aussi le plus critiquable du point de vue des administrés qui est celui de permettre un transfert forcé de propriété sans avoir à respecter la procédure de l'expropriation. Le principe d'intangibilité des ouvrages publics est donc atteint. [...]
[...] Par ces deux arrêts qui constituent des atteintes au principe de l'intangibilité des ouvrages publics, le Conseil d'État et la Cour de cassation avaient pour but de protéger le droit de propriété et in fine les administrés. Le législateur et le Tribunal des conflits portent eux aussi des atteintes à ce principe, mais en opérant un renforcement des pouvoirs du juge administratif. B. Un renforcement des pouvoirs du juge administratif Le juge administratif a reçu de la loi du 8 février 1995, sur la réforme des procédures d'urgence, le pouvoir d'adresser des injonctions à l'administration lorsque la chose jugée implique nécessairement qu'elle prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé. [...]
[...] Il s'agit donc de savoir si cet arrêt consacre un véritable abandon du principe d'intangibilité des ouvrages publics ou s'il n'en constitue qu'une atténuation s'inscrivant dans le prolongement de la jurisprudence antérieure. Pour se faire, il convient de souligner que depuis le début années 90, des atteintes au principe d'intangibilité des ouvrages publics ont ou être constatées, allant jusqu'à la tangibilité des ouvrages publics consacrée sous conditions par cet arrêt. I. Des atteintes au principe d'intangibilité des ouvrages publics . [...]
[...] Entre temps, la ligne électrique avait été déposée, mais le Conseil d'État a tout de même considéré que cette circonstance n'était pas de nature à priver de son objet le litige engagé relatif aux mesures d'exécution impliquées par le jugement ayant annulé l'arrêté approuvant le tracé de la ligne électrique. Le Conseil d'État a rejeté la requête qui lui a été soumise dans une décision du 29 janvier 2003, au motif que la Cour administrative d'appel n'a commis aucune erreur de droit et qu'elle n'a pas méconnu les pouvoirs qu'elle tenait de l'article L. [...]
[...] Cela étant, la haute juridiction prend soin de préciser les deux conditions requises. En effet, le juge administratif peut ordonner la démolition d'un ouvrage irrégulièrement édifié lorsqu'une mesure de régulation n'est pas possible et lorsque la démolition n'entraîne pas une atteinte excessive à l'intérêt général A. Une régularisation impossible quant à l'ouvrage public irrégulièrement édifié La première condition pour que le juge administratif puisse ordonner la démolition d'un ouvrage public irrégulièrement édifié est que la régulation soit impossible. En effet, le considérant de principe de la décision du Conseil d'État est clair : lorsque le juge administratif est saisi d'une demande d'exécution d'une décision juridictionnelle dont il résulte qu'un ouvrage public a été implanté de façon irrégulière il lui appartient, pour déterminer, en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date à laquelle il statue, si l'exécution de cette décision implique qu'il ordonne la démolition de cet ouvrage, de recherche d'abord, si eu égard notamment aux motifs de la décision, une régularisation appropriée est possible Dans le cas de l'affaire soumise au Conseil d'État donnant lieu à cet arrêt, le Tribunal administratif de Nice, par un jugement du 31 décembre 1996, a annulé l'arrêté du Préfet autorisant le tracé d'une ligne électrique aérienne à basse tension destinée à desservir un quartier dans une commune, son utilité publique n'étant pas démontré puisqu'elle ne desservait qu'une seule habitation déjà desservie en électricité. [...]
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