Conseil d'État, 28 novembre 2018, SNCF Réseau, ECR Euro Cargo Rail, entreprise ferroviaire, établissements publics industriels et commerciaux, impôt, taxe, redevances pour service rendu, tarif des redevances, financements de l'État, intérêt général, contrepartie directe, prestation de sûreté, compétence administrative, sécurité juridique
En l'espèce, les gouvernements français et britanniques ont fixé des règles de sûretés aux entreprises ferroviaires, en vertu de l'article 6 du règlement de la Commission intergouvernementale pour la liaison du tunnel sous la Manche. L'entreprise Réseau ferré de France, devenue SNCF Réseau, a mis en place une redevance pour la mise en place de ces prestations de sûreté visant à contrôler la présence d'éventuelles personnes non autorisées à bord des trains.
La société Euro Cargo Rail (ECR) a saisi le tribunal administratif de Paris pour demander l'annulation des dispositions de la société SNCF Réseau pour la redevance pour prestation complémentaire et a demandé le remboursement des sommes qu'elle a précédemment versées. Le tribunal administratif de Paris a rejeté les demandes de la société ECR. Cette dernière a interjeté appel à la cour administrative d'appel de Paris qui a annulé le jugement du tribunal administratif, a accueilli ses demandes et a condamné RFF, nouvellement SNCF Réseau, à rembourser les sommes versées par la société ECR dans le cadre de la redevance de sûreté. La SNCF Réseau s'est pourvue en cassation et a saisi le Conseil d'État.
[...] En l'espèce, les opérations doivent être des missions de particuliers, d'entreprises et non de l'État. Le juge manque alors de clarté quant à cette notion « par nature ». Le juge administratif prend une décision irréfragable, mais il ne parvient pas à démontrer, de manière rigoureuse, son raisonnement juridique. Il aurait fait preuve de plus de clarté en remplaçant la notion « par nature » avec la notion de compétence exorbitante. En mettant ce critère en place, la légalité de la redevance pour service est admise dans des cas très strictes lorsqu'elles relèvent d'opérations de personnalité privée, à savoir un individu ou une entreprise. [...]
[...] En d'autres termes, cette compétence exorbitante permet de réaliser « des actes étrangers à ceux qui sont au pouvoir des particuliers ». Une compétence exorbitante est exercée par l'État. Pour ne pas relever, par nature, d'une mission de l'État, on retient alors le sens inverse : la compétence ne devra pas être exorbitante. Si les particuliers ou entreprises disposent de pouvoir, alors il ne s'agira pas d'une compétence exorbitante et cela ne relèvera pas d'une mission exercée par l'État (par nature). [...]
[...] La légalité de la redevance pour service rendu soumise à des conditions Le Conseil d'État, pour retenir la légalité d'une redevance pour service rendu, retient deux critères selon lesquels la redevance est une opération qui sert à financer des missions qui n'incombent pas à l'État, par nature et qui est une contrepartie directe des prestations rendues au bénéfice propre des entreprises qui veulent faire circuler des trains de marchandises La redevance comme financement d'opérations ne relevant pas de missions "par nature" de l'État Le Conseil d'État, pour retenir la légalité d'une redevance pour service rendu, retient un premier critère selon lequel la redevance est censée financier des opérations qui ne relèvent pas « par nature » de l'État. La redevance doit alors financier des opérations n'étant pas encadré « par nature » par l'État. En effet, les prestations de contrôle, de surveillance et de gardiennage des trains relèvent uniquement des entreprises ferroviaires. [...]
[...] Il revient uniquement aux entreprises ferroviaires de prendre en charge ce service : aucune intervention de l'État n'est admise et n'est le cas en l'espèce. Par ailleurs, il apparaît que ces missions sont effectuées dans l'intérêt général des usagers et des entreprises ferroviaires pour permettre l'accès des trains au tunnel sous la Manche. La Cour d'appel a fait une erreur en assimilant le but d'intérêt général de la prévention et de la recherche d'infractions aux lois et règlements à une mission incombant uniquement à l'État. [...]
[...] En effet, ces différentes qualifications juridiques d'impôt, taxe ou redevance pour service rendu retiennent l'attention des juges. Par exemple, depuis la loi de finances de 1990, l'enjeu a été de savoir si la Contribution Sociale Généralisée (CSG) était une cotisation sociale ou un impôt. La Cour de Justice de l'Union européenne et la juridiction administrative se sont affrontées sur la question de la nature juridique durant de nombreuses années. Par ailleurs, cela peut aussi concerner la redevance pour service rendu pour laquelle le domaine règlementaire a de l'affronté le domaine législatif. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture