Le 8 février 1873, le Tribunal des Conflits rendait une décision majeure et innovante en ce sens qu'elle permettait que soit engagée la responsabilité de l'administration, et donc celle de l'Etat « pour les dommages causés aux particuliers par le fait des personnes qu'il emploie dans le service public ». Cependant dans le domaine de la justice, la personne publique jouissait d'une certaine irresponsabilité. Ce n'est qu'avec l'arrêt Darmont du 29 décembre 1978, que cette responsabilité va s'étendre, de façon restrictive toutefois, aux juridictions administratives en ne gardant que la faute lourde comme motif exclusif de contestation. Cette notion peu définie par la suite a connu récemment une évolution déterminante dont l'origine se trouve dans l'affaire Garde des Sceaux c/ Magiera, du 28 juin 2002.
En l'espèce, M. Magiera qui a subi un préjudice du fait de travaux publics réclame réparation à l'administration. Celle-ci lui sera accordée après 7 ans et demi de procédure. Considérant cette durée excessive et pénalisante M. Magiera attaque le Ministère de la Justice devant la juridiction administrative en raison du préjudice né du délai excessif de jugement.
Cet arrêt semble poser la question des conditions et fondements de l'engagement de la responsabilité de l'État. La responsabilité de l'État peut-elle être engagée pour faute simple en raison du retard de la justice administrative ? En d'autres termes, un justiciable peut-il engager la responsabilité de l'État sur la question de la lenteur de la justice et obtenir réparation du préjudice causé de ce fait ?
[...] Pologne du 12 octobre 2000 : ce dernier avait alors prescrit la condamnation de tout État ne pouvant justifier l'existence d'un recours effectif en droit interne. Le Conseil d'État reprend donc à son compte ce raisonnement en posant d'abord le principe de la célérité de la justice, et ensuite en validant logiquement en l'espèce le fondement d'un recours sur la question. Les Conseils d'État trouvent par ailleurs un autre fondement en droit interne qui est l'invocation des principes généraux qui gouvernent le fonctionnement des juridictions administratives Pour appuyer son premier fondement tiré du droit externe, le Conseil d'État ajoute celui des principes généraux qui gouvernent le fonctionnement des juridictions administratives pour poser le droit pour le justiciable au délai raisonnable de jugement. [...]
[...] La nécessité de caractériser un préjudice Le juge retient ici une acception assez large de la notion de préjudice qui amène néanmoins une réparation nécessaire. L'existence du préjudice est ici appréciée selon une définition assez large et commune de la notion qui se présente alors pour M. Magiera comme l'ensemble des dommages tant matériels que moraux, directs et certains qui ont pu lui être causés et dont la réparation ne se trouve pas assurée par la décision rendue sur le litige principal De plus, ces désagréments causés par la durée excessive d'une procédure doivent aller au-delà des préoccupations habituellement causées par un procès Ce serait ici en quelque sorte des externalités négatives. [...]
[...] L'engagement de la responsabilité de l'État conditionné par des critères objectifs Pour qu'une telle action soit fondée, il faut naturellement qu'une procédure contentieuse ait fait l'objet d'une durée excessive qui a porté un préjudice au justiciable A. L'appréciation objective de la durée de la procédure contentieuse Pour caractériser le caractère excessif de la durée de la procédure concernée ici le Conseil d'État expose plusieurs critères objectifs et retient celui qui se manifeste en l'espèce. La Conseil d'État prescrit une double appréciation de la durée des délais de jugement. [...]
[...] Arrêt du Conseil d'État juin 2002 : Garde des Sceaux Magiera Le 8 février 1873, le Tribunal des Conflits rendait une décision majeure et innovante en ce sens qu'elle permettait que soit engagée la responsabilité de l'administration, et donc celle de l'État pour les dommages causés aux particuliers par le fait des personnes qu'il emploie dans le service public Cependant dans le domaine de la justice, la personne publique jouissait d'une certaine irresponsabilité. L'article 11 de la loi du 5 juillet 1972 qui viendra admettre que l'État est tenu de réparer le dommage causé par le fonctionnement défectueux du service de la justice pour une faute lourde ou un déni de justice ne s'appliquait en effet qu'à l'ordre judiciaire. [...]
[...] En d'autres termes, un justiciable peut-il engager la responsabilité de l'État sur la question de la lenteur de la justice et obtenir réparation du préjudice causé de ce fait ? Le Conseil d'État tend à répondre par l'affirmative en validant le fondement de l'engagement de la responsabilité de l'État sur la question de la lenteur de la célérité de la justice administrative avant de caractériser en l'espèce un délai excessif de jugement portant préjudice à l'administré. La décision de la haute juridiction crée un nouveau type de recours dans l'intérêt des administrés conditionné par des critères objectifs d'appréciation (II). [...]
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