En l'espèce, MM. Nguyen et Jouan avaient tous deux subi des interventions chirurgicales dans des groupes hospitaliers parisiens, le premier à la Pitié Salpetrière le 24 janvier 1985, le second à Cochin deux ans plus tard, le 7 novembre. Ayant eu de graves problèmes hémorragiques, ces deux hommes avaient reçu des poches de sang provenant du centre de transfusion sanguine (CTS). Or par la suite, il s'est avéré que ces deux patients avaient, du fait de ces apparentes salvatrices transfusions contractées le virus de l'immunodéficience humaine (SIDA).
Effectuant tous deux séparément des actions indemnitaires en réparation du préjudice causé par ces contaminations, les anciens patients virent leur cause soutenue par le Tribunal administratif (TA) de Paris sur le même fondement. M Nguyen étant décédé après avoir démarré son action, sa femme se vit accorder une indemnité du fait de la faute dans l'organisation et le fonctionnement du service public hospitalier par un jugement du 6 novembre 1991. M Jouan quant à lui bénéficia sensiblement de la même somme par deux jugements du 11 janvier et 29 novembre 1991, le Tribunal retenant la responsabilité de l'Assistance publique de Paris.
Dès lors, face à un pourvoi en Cassation formé par les victimes (par ricochet) le CE avait à statuer sur la possibilité d'engager une responsabilité hospitalière face à ce fait de contamination dû à la transfusion de poches de sang, considérés par les juridictions d'appel comme non fautif là ou les juges du premier ressort avaient perçus une faute.
[...] D'un point de vue plus juridique, le juge répondit à la question de savoir s'il était possible d'engager une responsabilité administrative de l'hôpital et sur quel fondement précis. Les juges du Palais Royal consacrèrent alors une nouvelle voie d'action inconnue jusqu'alors et amena également une définition au sujet des entités pouvant être perçues comme responsables, et celles ne le pouvant pas (II). I. Un régime de responsabilité sans faute en partie novateur Avant de créer de toutes pièces une nouvelle approche de la responsabilité, il convenait de rechercher si les faits propres à l'espèce pouvaient se rattacher à un schéma déjà connu et établi de responsabilité (I.a). [...]
[...] M Jouan quant à lui bénéficia sensiblement de la même somme par deux jugements du 11 janvier et 29 novembre 1991, le Tribunal retenant la responsabilité de l'Assistance publique de Paris. Ces deux jugements connurent un appel de l'administration générale de l'Assistance publique de Paris devant la Cour administrative d'appel (CAA) de Paris, qui le 20 octobre 1992 censura le tribunal par deux fois en niant l'existence de toute faute dans les deux affaires, exonérant ainsi la demandeuse de sa responsabilité dans la contamination du virus de l'immunodéficience humaine. [...]
[...] Ils ont cependant effectué une extension du domaine traditionnel de la responsabilité pour risque, autorisant l'usager à s'en prévaloir et non plus seulement le tiers. Une troisième affaire quasi similaire avait été jointe à celle de MM. Nguyen et Jouan, celle de M. Pavan, à la différence près que le CTS lui ayant fourni les poches de sang contaminé par le virus de l'immunodéficience humaine, contrairement à ceux des hôpitaux de la Pitié- Salpêtrière et Cochin, ne faisait pas partie intégrante de l'hôpital. [...]
[...] Nguyen un risque exceptionnel. En revanche, depuis la généralisation des tests de dépistage, l'exposition à un tel risque exceptionnel (la probabilité d'y être soumis étant de l'ordre de 0,003%) devait permettre à M. Jouan de bénéficier d'une indemnité. Mais une telle vision, pour le moins alambiquée et inégale du CE aurait conduit à forcer l'outil juridique que représente cette responsabilité hospitalière sans faute pour risque exceptionnel des actes médiaux, ce que les juges ont préféré écarter pour créer, quasi sur mesure, une responsabilité adaptée. [...]
[...] Dès le 22 novembre 1984, le Dr Brenet, épidémiologiste à la Direction Générale de la Santé avait soumis à la Commission consultative de la transfusion sanguine un rapport alarmant au sujet des risques de contamination du virus de l'immunodéficience par le sang, et si antérieurement à cette date les contradictions entre scientifiques formaient un bouclier à l'inaction de certains agents, le CE a jugé dans son arrêt MM. G., D. et B. que postérieurement à cette date, les données acquises par la science permettaient aux CTS comme à l'Etat d'exercer un contrôle sur ces produits sanguins. Ils engagent donc tous deux leur responsabilité par rapport à ces produits sanguins. Afin de faire agir au mieux l'outil qu'est la responsabilité, les juges devaient déterminer quel évènement était considéré comme le fait dommageable de la contamination. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture