« Il ne faut pas se dissimuler que, depuis quelque temps, le Conseil d'Etat se trouve à l'étroit dans ses pouvoirs d'annulation que lui confère le recours pour excès de pouvoir ».Tel était déjà la réflexion de Maurice HAURIOU, en 1908 concernant la position du juge administratif vis-à-vis de son pouvoir d'annulation.
Au cours de ses jurisprudences ultérieures, le juge administratif aménagea l'application de son pouvoir en le modulant dans l'espace, puis récemment, dans le temps. En l'espèce, lors d'un recours pour excès de pouvoir, le comité de recherche et d'information indépendante sur le génie génétique souhaite l'annulation d'un décret relatif à l'application du droit concernant la demande d'autorisation de mise sur le marché de produits génétiquement modifiés, disposition réglementaire prise à la suite d'une directive communautaire. Lors de cette affaire, le ministre concerné demandant toutefois, si l'annulation était accordée, que celle-ci soit différée dans le temps.
Le Conseil d'Etat donne raison au requérant tout en modulant cette acceptation : en annulant que partiellement et à date différé ce décret pour ainsi respecter les normes européennes. Cet arrêt porte aussi sur la répartition des compétences en la matière entre le pouvoir réglementaire et législatif, montrant une appréciation stricte du juge administratif sur cette dernière.
Ce point devra être écarté pour se focaliser sur la question reposant sur l'évolution du pouvoir de la modulation temporelle des effets de l'annulation, étant celle du pragmatisme du juge lors de son office permettant l'utilisation de son pouvoir comme un protecteur des obligations constitutionnelles.
Cette décision prise pas la section du contentieux du Conseil d'Etat est innovante dans la possibilité de modulation dans le temps de ses décisions lui permettant une application renforcée. Cette modulation montrant le côté pragmatique du juge administratif, son utilisation lui permettant de concilier différents principes constitutionnels.
[...] Cette décision prise par la section du contentieux du Conseil d'Etat est innovante dans la possibilité de modulation dans le temps de ses décisions lui permettant une application renforcée(I). Cette modulation montrant le côté pragmatique du juge administratif, son utilisation lui permettant de concilier différents principes constitutionnels.(II) une application renforcée du pouvoir de modulation temporelle de l'annulation Cette évolution fut permise par l'arrêt, d'une part du fait qu'il assouplit les conditions d'application de cette procédure dérogatoire et d'autre part considérant le respect des exigences communautaires comme assimilé à l'intérêt général. [...]
[...] -En annulant de manière pure et simple le décret, il n'aurait pas pu faire respecter l'obligation émanant de l'article 88-1 de la constitution, obligation de transposition des directives . -En considérant que ce décret n'était qu'un simple décret de transposition d'une directive communautaire et en ne l'annulant pas, il aurait bafoué la séparation entre pouvoir réglementaire et législatif émanant de l'article 7 de la charte de l'environnement, ayant force constitutionnelle depuis la réforme constitutionnelle de l'année 2005 et plus précisément l'article 34 de la constitution. [...]
[...] Cette possibilité accrue de l'utilisation du pouvoir de modulation fut critiquée par une partie de la doctrine : à quelques mois de l'application de la Question Prioritaire de Constitutionnalité, elle semble pour certains superflue. En effet, dorénavant le juge administratif pourra ainsi surseoir à statuer au profit du juge constitutionnel sur une question de ce type. Toutefois, le pouvoir de modulation a donc en l'espèce permis une résolution de ce dilemme juridique par la possibilité de moduler son pouvoir d'annulation et ainsi respecter les obligations communautaires françaises : Cependant, il peut aussi en être un farouche obstacle. un pouvoir de modulation perpétuellement au service des exigences communautaires ? [...]
[...] Mais il peut aussi être la simple constatation du pragmatisme du juge concernant l'application de son pouvoir de modulation, celui-ci cherchant, pour le respect de l'équilibre entre la sécurité juridique et le droit au recours, une application collant très précisément aux faits. Cette décision met en exergue l'évolution subie du fait du juge de la possibilité de pouvoir user de la modulation, cette évolution ayant un but crucial : permettre une certaine harmonie des exigences constitutionnelles et notamment celle de transposition des directives européennes. [...]
[...] En l'espèce la condition de conséquences manifestement excessives en raison des effets que cet acte a produits est évincée en partie et permet ainsi d'ouvrir la possibilité de moduler l'impact de la décision de manière plus fréquente. En effet, Cette condition aurait pu être remplie du fait des sanctions pécuniaires considérables du juge communautaire lorsque la France ne remplit pas son obligation de transposition des directives en tant voulu, sommes pouvant atteindre 10 millions d'euros, mais il n'en est en aucun cas fait mention dans la décision. Concernant la quantification de l'impact de l'annulation vis-à-vis de la situation antérieure, elle aurait été bien plus ardue. [...]
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