Conseil d'État 24 décembre 2019 arrêt société Paris Clichy, responsabilité sans faute, article L442-9 du Code du travail, Conseil constitutionnel, lois inconstitutionnelles, responsabilité de l'État, question prioritaire de constitutionnalité, juge administratif
Pour René Chapus, la responsabilité de l'État du fait des lois et des conventions internationales est « un produit de luxe : on ne s'en sert pas tous les jours ». Plus généralement, la responsabilité de l'État sans faute, si elle est largement admise, et ce, depuis longtemps, a largement évolué ces trente dernières années. La volonté du juge administratif est en effet de garantir à l'administré une réparation de l'ensemble des dommages qui ne résulteraient pas directement de lui. Progressivement donc, la responsabilité de l'État est devenue admissible dans un certain nombre de cas où des lois avaient des effets néfastes imprévus sur des administrés. La décision société Paris Clichy, du 24 décembre 2019, vient justement étendre une nouvelle fois le régime de la responsabilité sans faute de l'administration du fait des lois devenues inconstitutionnelles.
[...] Dans sa décision du 24 décembre 2019, décision confirmée le même jour par deux autres arrêts, le Conseil d'État reconnaît la possibilité d'engager la responsabilité de l'État du fait d'une loi déclarée inconstitutionnelle. En revanche, il rejette le pourvoi formé par la société Paris Clichy, au motif de l'inexistence d'un lien de causalité direct et suffisant entre le préjudice prétendument subi et sa prétendue source, à savoir l'article inconstitutionnel. Cette décision est donc particulièrement fondamentale et intéressante à plusieurs égards. [...]
[...] La notion de responsabilité sans faute de l'administration est de plus en plus proche de la notion de responsabilité sans faute en droit civil. On le remarque notamment avec la naissance progressive depuis les années 1990 d'une responsabilité pour garde de la part de l'administration, mais aussi pour le regard de plus en plus pointu qui est posé sur le lien de causalité. En effet, c'est bien au juge administratif de regarder s'il existe un lien direct et établi entre le préjudice prétendument subi et l'inconstitutionnalité déclarée d'une loi. [...]
[...] Le Conseil d'État, seul, ne peut pas déclarer sur cette base l'administration responsable. La procédure est donc nécessairement plus complexe que pour une affaire habituelle, car elles nécessitent de présenter au Conseil constitutionnel une QPC. Par ailleurs, la forme de la réponse du Conseil constitutionnel est aussi prise en compte, l'arrêt société Paris Clichy retient à ce stade, que la déclaration d'inconstitutionnalité ne doit pas exclure l'indemnisation. Ces critères viennent donc faire la démonstration de l'existence d'un dialogue intense et nécessaire entre le Conseil constitutionnel et le Conseil d'État. [...]
[...] La reconnaissance progressive de la responsabilité de l'administration du fait des lois étendues Il convient tout d'abord de rappeler que la responsabilité sans faute de l'administration est largement admise, et ce depuis 1895, avec la décision Cames du Conseil d'État. Comme dans bon nombre de domaines, l'évolution de la jurisprudence, et c'est d'autant plus vrai depuis les années 1960, a poussé le Conseil d'État à reconnaître l'administration de plus en plus fréquemment responsable. Cette évolution est inhérente à la création et au développement d'un État davantage providentiel. La reconnaissance de la responsabilité de l'administration du fait des lois avait déjà été actée dans une décision de 1938 la fleurette. [...]
[...] Ce point sera très sans doute l'un des points d'évolution majeure de la nouvelle jurisprudence. Il ne nous est pour le moment pas permis à ce stade de connaître l'évolution d'une jurisprudence qui n'a que trois ans, mais il est probable qu'elle évolue sur ce point. B. Le juge administratif : juge uniquement de la responsabilité de l'administration En effet, le juge administratif est considéré tout au long de la décision société Paris Clichy comme étant le juge de la responsabilité de l'administration. [...]
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