L'arrêt rendu par le Conseil d'Etat en date du 22/01/2007, dit Association Les Amis des Tuileries fournit un exemple d'application du régime de l'autorisation d'occupation privative du domaine public parmi un contentieux abondant dans la matière.
En l'espèce, il s'agit d'un arrêté (et de son rectificatif) du ministre de la Culture et de la communication, autorité gestionnaire du jardin des Tuileries, fixant les règles générales afin de délivrer des autorisations d'occupation privative du domaine public. L'acte réglementaire est une sorte de cadre général permettant à l'établissement public du Grand Louvre, qui s'est vu confier la gestion du domaine par convention avec le ministre, de délivrer des autorisations d'occupation privative du domaine public à des tiers dans le respect de ces impératifs.
L'Association Les amis des Tuileries, attaque directement l'acte au moyen d'un recours pour excès de pouvoir et demande l'annulation, devant le Conseil d'Etat saisi en premier ressort, de l'arrêté en question. En effet, l'Association a pour motivation d'empêcher l'occupation du jardin par une fête foraine, cas d'espèce pourtant prévu spécialement par l'arrêté dans le respect de certaines conditions.
[...] Le juge administratif, qui a pour compétence d'apprécier au cas par cas la compatibilité de l'utilisation du domaine avec la destination principale de ce dernier a ainsi jugé que l'installation temporaire d'une fête foraine dans le jardin des Tuileries était conforme aux usages du jardin et donc rendait l'activité compatible avec la destination du jardin, dans un arrêt rendu par le Conseil d'Etat en date du 23/06/1995 dit Association Défense Tuileries. Dans l'arrêt nous concernant, le Conseil d'Etat, qui traite de faits identiques, adopte une approche sensiblement différente afin d'envisager la validité du rapport entre l'utilisation du jardin et sa destination propre. En effet, il parle ici de compatibilité de l'utilisation à la destination principale du domaine et non plus de conformité. Il semblerait que cette distinction marque un assouplissement dans le rapport : utilisation du jardin et destination principale de ce domaine. [...]
[...] Cette solution se justifie par le fait que l'arrêté litigieux a pour seul objet de fixer les règles générales d'occupation et de ce fait n'a pas à justifier des mêmes contraintes formelles que l'autorisation d'occupation privative du domaine public elle-même. D'une façon globale, cette solution, plutôt pragmatique, permet d'une part de protéger le domaine public en rappelant la valeur des principes applicables au régime de l'autorisation même en leur absence formelle au sein de l'arrêté fixant les règles générales d'occupation et d'autre part de simplifier le contenu formel d'un tel acte réglementaire sans encourir l'annulation. [...]
[...] L'arrêt du 22/01/2007 qui nous intéresse, réaffirme la force de ce principe et précise qu'il se concilie avec l'impératif de fixation d'un délai maximal d'occupation (nécessaire à la légalité de l'autorisation d'occupation du jardin par la fête foraine). Pour cette raison, la durée limitative fixée n'a pas de force obligatoire, elle ne lie pas l'autorité gestionnaire du domaine qui peut se prévaloir du principe de précarité comme garantie de sa liberté de gestion. La durée n'est que condition de la légalité de l'autorisation sans ouvrir de droits acquis. [...]
[...] En effet, cette situation éventuelle est susceptible de permettre une forme d'occupation privative du domaine public incompatible avec la destination principale du jardin. En conséquence, le juge se livre à l'appréciation concrète de la destination du domaine sans oublier les obligations qui lui sont attachées et consacrées au-delà des propriétés premières de celui-ci. En effet le juge s'intéresse à la durée maximale d'occupation comme un indice déterminant pour juger de la compatibilité de l'activité d'une fête foraine annuelle dans le jardin des Tuileries. [...]
[...] Cette solution s'explique par le fait que l'appréciation de la compatibilité de l'utilisation du domaine à sa destination principale doit être précise afin qu'une lacune réglementaire (le défaut de précision de la durée maximale de l'occupation dans l'arrêté du ministre en l'espèce) ne permette de légaliser une activité, bien que compatible par nature à la destination du domaine, qui ne le serait pas en fait. En l'espèce, la fête foraine est une activité susceptible de recevoir une autorisation d'occupation privative sur le domaine public de l'esplanade des Feuillants (possibilité prévue par l'article 5 de l'arrêté du ministre fixant les conditions générales). [...]
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