Droit de la Fonction publique, sanction disciplinaire, devoir d'obéissance, devoir de désobéissance, Pouvoir hiérarchique, Contrôle du juge administratif.
La question du devoir d'obéissance des fonctionnaires à l'égard de l'administration et des sanctions disciplinaires qui peuvent les viser en cas de méconnaissance de ce devoir est forcément sensible. Le rôle du juge administratif, à cet égard, est particulièrement important : ne s'est-il pas construit en contrôlant l'administration, tant dans ses rapports avec les administrés qu'avec ses fonctionnaires, tout en prenant en compte l'intérêt général ? L'arrêt commenté est en ce sens particulièrement intéressant en ce qu'il est relatif à des sanctions disciplinaires contre lesquelles le fonctionnaire invoquait la possibilité légale de refuser d'obéir à un ordre manifestement illégal et de nature à compromettre gravement un intérêt public.
En l'espèce, le Maire de Paris a prononcé la mise à pied pendant deux jours d'un fonctionnaire pour son refus d'assurer la permanence du standard téléphonique pendant cinq jours. Un refus similaire ultérieur sera sanctionné par son déplacement d'office décidé par une lettre du directeur du bureau d'aide sociale de la ville de Paris. Le fonctionnaire engage alors un recours à l'encontre de ces deux sanctions.
La tribunal administratif accueille son recours et annule les sanctions qui lui sont infligées au motif que l'ordre donné serait contraire à son statut d'agent de service tel qu'il résulte d'une délibération du conseil d'administration du bureau d'aide sociale de la ville de Paris, et qu'il était ainsi fondé d'avoir refusé de déférer à cet ordre. L'administration a alors fait appel de l'annulation de la mise à pied et du déplacement d'office.
Aussi peut-on se demander dans quel cadre le devoir d'obéissance du fonctionnaire s'exerce-t-il, et plus précisément dans quelle mesure le fonctionnaire peut-il désobéir à un ordre donné par son supérieur hiérarchique ?
Le Conseil d'État annule le jugement du tribunal administratif au motif que le fonctionnaire a commis une faute en refusant d'obéir au directeur du bureau d'aide sociale de la ville de Paris. Il estime qu'il n'y a pas lieu de considérer que ce refus d'obéir se justifiait, car l'ordre donné n'avait pas un caractère manifestement illégal et il n'y avait pas une compromission grave d'un intérêt public.
Dès lors, le Conseil d'État a rendu un arrêt intéressant en ce qui concerne le devoir d'obéissance hiérarchique du fonctionnaire. En effet, la sanction disciplinaire infligée par l'administration peut se fonder sur une désobéissance du fonctionnaire, mais elle est étroitement contrôlée. Le fonctionnaire peut quant à lui légalement désobéir, sous certaines conditions, mais celles-ci peuvent prêter à confusion.
[...] Le juge administratif a ainsi progressivement développé son contrôle sur ce point. De fait, la procédure disciplinaire est exigeante pour les administrateurs[5] car le contrôle juridictionnel effectué par le juge est approfondi. Premièrement, le Conseil d'État vérifie que la règle Non bis in idem (une même faute ne doit pas être sanctionnée plusieurs fois ; règle issue de CE avril 1958, Commune de Petit-Quevilly) n'a pas été violée. En l'espèce, il constate que le fonctionnaire n'est pas fondé à soutenir qu'il a été l'objet de sanctions successives à raison des mêmes faits puisque les différentes sanctions réprimaient des faits de même nature (car répétés), mais bien autonomes. [...]
[...] En l'espèce, la sanction du déplacement d'office se motivait seulement par un refus d'obéissance délibéré et persistant Le Conseil d'État estime en se bornant à motiver sa lettre ainsi, sans préciser dans quelles circonstances et à quelles dates avaient lieu les manquements invoqués le directeur du Bureau d'aide sociale de la ville de Paris n'a pas satisfait aux prescriptions de la loi du 11 juillet 1979 sur la motivation des actes administratifs Ainsi Francis Mallol a-t-il expliqué que la motivation était stéréotypée et ne pouvait donc qu'être condamnée[6] On remarquera que par la suite, le Conseil d'État a également admis l'application de l'article de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales (CE février 2000, L'Hermitte suite à CEDH 8 décembre 1999 M. Pellegrin France), soumettant ainsi la sanction disciplinaire aux dispositions exigeantes de cet article (droit à un procès équitable). Le fonctionnaire est donc soumis au devoir d'obéissance à l'égard de ses supérieurs hiérarchiques. Il peut, en cas de refus d'obéissance de sa part, recevoir une sanction disciplinaire. Mais celle-ci est étroitement contrôlée par le juge administratif. De surcroît, le fonctionnaire peut et doit désobéir si certaines conditions sont réunies, ce qui ne va pas sans difficulté. [...]
[...] Un refus similaire ultérieur sera sanctionné par son déplacement d'office décidé par une lettre du directeur du bureau d'aide sociale de la ville de Paris. Le fonctionnaire engage alors un recours à l'encontre de ces deux sanctions. La tribunal administratif accueille son recours et annule les sanctions qui lui sont infligées au motif que l'ordre donné serait contraire à son statut d'agent de service tel qu'il résulte d'une délibération du conseil d'administration du bureau d'aide sociale de la ville de Paris, et qu'il était ainsi fondé d'avoir refusé de déférer à cet ordre. [...]
[...] On se rappellera, en ce sens, que le Général de Gaulle avait méconnu les ordres de son supérieur hiérarchique, et qu'il fut condamné pour cela. [1]F. Melleray, Droit de la fonction publique, Paris, Economica p [2]C. Moniolle, La subordination dans la fonction publique, AJDA p [3]Ibid. [4]F. Mallol, Devoir d'obéissance des fonctionnaires et contrôle des sanctions disciplinaires, La semaine juridique Edition générale, avril 1996 [5]Ibid. [6]Ibid. [...]
[...] En l'espèce, le Bureau d'aide sociale de la ville de Paris avait demandé au fonctionnaire d'assurer la permanence du standard téléphonique. Ces permanences téléphoniques allaient au-delà des heures de sortie des agents, mais elles étaient accompagnées d'une récupération des heures supplémentaires accomplies. Or, à plusieurs reprises, le fonctionnaire a refusé d'assurer ces permanences au motif que la fonction de téléphoniste n'entre pas dans ses attributions statutaires et pour des raisons à caractère familial (ces faits sont tirés de la note sur l'arrêt de Francis Mallol[4]). [...]
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