Conseil d'Etat 21 février 2011, arrêt Société Ophrys, société Ophrys et communauté d'agglomération de Clermont-Ferrand, annulation d'un acte détachable du contrat administratif, déliaison de l'annulation, juge du contrat, arrêt Tropic, arrêt Martin, recours pour excès de pouvoir, arrêt Commune de Levallois-Perret, recours de plein contentieux, arrêt Département de Tarn-et-Garonne, commentaire d'arrêt
Deux tendances jurisprudentielles, au début du XXe siècle, contribuent ensemble au déclin du contentieux de l'acte détachable : la première d'entre elles est celle élargissant progressivement les titulaires d'un recours de pleine juridiction à l'encontre d'un contrat administratif. La seconde, illustrée par cet arrêt, s'attaque directement au recours pour excès de pouvoir dirigé contre des actes détachables, en diminuant significativement son intérêt.
En l'espèce, une société (la société Onyx, aux droits de laquelle vient la société Ophrys) est choisie par la communauté d'agglomération de Clermont-Ferrand comme délégataire de service public en vue de l'exploitation d'un centre d'enfouissement. Le président de la communauté d'agglomération est autorisé à signer la convention projetée par une délibération en date du 29 février, le contrat étant finalement conclu le 4 mars 2008. Ces actes font l'objet d'une double contestation, d'abord, par le biais d'un recours de plein contentieux pas le candidat évincé (recours prévu dans l'arrêt Tropic), ensuite par le biais d'un recours pour excès de pouvoir contre la délibération en tant qu'acte détachable du contrat (recours prévu par l'arrêt Martin), par un syndicat prétendument exclusivement compétent en matière de gestion des déchets.
[...] Cette déliaison entre annulation d'un acte détachable et injonction est doublée d'une seconde. B. La déliaison de l'injonction et de l'annulation du contrat principal par le juge du contrat Un deuxième apport de l'arrêt soumis à notre étude est moins visible à première lecture, mais tout aussi important dans la mesure où il constitue un revirement de jurisprudence extrêmement net. En effet, il tient dans la formule du Conseil d'État selon laquelle le juge du contrat, saisi à la suite du juge de l'exécution, devra apprécier « si la résolution peut être une solution appropriée ». [...]
[...] La question de droit à laquelle est soumis le Conseil d'État porte sur la détermination des pouvoirs du juge de l'exécution soumis à un recours pour excès de pouvoir dirigé contre un acte détachable d'un contrat administratif. La solution rendue par le Conseil d'État, si elle n'est pas inédite, est restée célèbre : « L'annulation d'un acte détachable d'un contrat n'implique pas nécessairement la nullité dudit contrat ». La constatation, en l'espèce, de l'illégalité de la délibération pouvait dès lors amener les juges du fond à enjoindre les parties à saisir le juge du contrat, comme ils l'ont fait en l'espèce. [...]
[...] Ce dernier juge, pourra à son choix, décider de la poursuite de l'exécution du contrat, enjoindre la personne publique de le résilier, inviter les contractants à la résolution ou à saisir le juge du contrat à défaut d'accord. La résolution du contrat n'est donc pas automatique, mais soumise, au contraire, à une non-excessivité de l'atteinte à l'intérêt général. Il est dit, enfin, que ce soit en fonction de la nature de l'illégalité commise que le juge choisira entre l'une ou l'autre de ces solutions. [...]
[...] Cette tendance jurisprudentielle s'achèvera finalement le 4 avril 2014 avec l'arrêt Département de Tarn-et-Garonne, dans lequel le Conseil d'État abandonnera définitivement le contentieux des actes détachables, en élargissant à l'ensemble des tiers lésés le recours de plein contentieux exercé contre les contrats administratifs. L'arrêt Société Ophrys et Communauté d'agglomération de Clermont-Ferrand constitue donc dans ce contexte l'un des derniers arrêts précisant le régime du recours pour excès de pouvoir exercé à l'encontre d'un acte détachable du contrat, achevant de témoigner de son infériorité par rapport au recours de pleine juridiction, voué à devenir la voie classique de contestation par un tiers d'un contrat administratif. [...]
[...] On assiste ainsi à la création de ce qu'un auteur a appelé une « seconde soupape de sécurité » (Noguellou, RDI 2 ?011 ?277) dans le contentieux des actes détachables : le juge du contrat, quand bien même il serait saisi par le biais d'une injonction, n'a désormais aucune obligation de procéder à l'annulation du contrat. La combinaison de ces deux principes amène ainsi à l'affirmation d'une indépendance totale entre annulation d'un acte détachable et d'un contrat : le contentieux de l'acte détachable, ainsi largement complexifié, subit de ce fait un net déclin. II. Le déclin du contentieux de l'acte détachable L'arrêt Société Ophrys marque le déclin progressif du contentieux de l'acte détachable, largement complexifié et subissant la concurrence d'un recours de plein contentieux en plein développement A. [...]
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