En l'espèce, le ministre de la Solidarité, de la Santé et de la Protection sociale a pris 28 décembre 1988 un arrêté relatif à "la détention, la distribution, la dispensation et l'administration de la spécialité Mifégyne 200 mg". Les requérants demandent l'annulation de cet arrêté et seulement l'annulation, il s'agit donc d'un recours pour excès de pouvoir.
L'acte administratif litigieux émane d'un ministre et possède une portée réglementaire générale. En vertu de l'article R311-1 2° du Code de justice administrative, le Conseil d'État est compétent en premier et en dernier ressort pour connaître des recours en annulation dirigés contre les actes réglementaires des ministres.
Le Conseil d'État pouvait-il admettre de contrôler la conformité de dispositions législatives à des principes ayant une valeur constitutionnelle, mais également protégés par les engagements internationaux de la France ?
[...] Sans nous attarder sur une éventuelle trop grande déférence qu'aurait le Conseil d'Etat envers le Conseil constitutionnel, on peut avancer que le débat sur l'avortement est un débat de société qui passionne bien au-delà des frontières du monde juridique, et la loi de 1975 a été perçue dans la majorité de l'opinion comme un progrès notable dans le droit des femmes à disposer de leur corps. On imaginait très mal le Conseil d'Etat écarter l'application de cette loi en droit français. Cette décision, s'il en était besoin, démontre à quel point le juge fait aussi (voire exclusivement) des choix politiques dans l'orientation de sa jurisprudence. [...]
[...] L'article 1er de la loi garantit le respect du corps humain ; cependant ce terme, dépourvu finalement de toute portée normative susceptible de garantir effectivement le respect du corps humain, s'inscrit dans un cadre plus général dans lequel les lois tendent à devenir des déclarations d'intention voire des programmes électoraux, ce que sanctionne le Conseil constitutionnel. Le Conseil d'Etat, se fondant sur le seul article 1er de la loi de 1975 et sans examiner les conditions et limites qu'apporte la loi, la déclare compatible avec les textes internationaux. [...]
[...] Certes le Conseil d'Etat n'a jamais éprouvé de difficulté à faire prévaloir l'application d'un traité sur une loi contraire mais antérieure à ce traité (CE mars 1972, Sadok Ali), mais en revanche il estimait qu'écarter l'application d'une loi contraire à un traité et postérieure à ce traité posait un problème de constitutionnalité qui échappait à la connaissance de la juridiction administrative Sect, 1er mars 1968, Syndicat général des fabricants de semoule de France). Empreint d'une certaine déférence envers le législateur, le Conseil d'Etat est cependant revenu sur cette jurisprudence avec l'arrêt Nicolo de 1989, en acceptant d'écarter l'application d'une loi contraire à un traité et postérieure à ce traité. Le Conseil d'Etat procède donc bien en l'espèce à un contrôle de conventionnalité en acceptant de contrôler la conformité de la loi avec la CESDH et le pacte de New-York. [...]
[...] Conseil d'État décembre 1990 - la hiérarchie des normes Le document que nous allons commenter est un arrêt rendu par l'assemblée du contentieux du Conseil d'Etat (sa formation contentieuse la plus solennelle) en date du 21 décembre 1990 concernant la hiérarchie des normes du droit administratif. Les faits de l'espèce étaient les suivants : le ministre de la Solidarité, de la Santé et de la Protection sociale a pris 28 décembre 1988 un arrêté relatif à la détention, la distribution, la dispensation et l'administration de la spécialité Mifégyne 200 mg Les requérants demandent l'annulation de cet arrêté et seulement l'annulation, il s'agit donc d'un recours pour excès de pouvoir. [...]
[...] La densification de la jurisprudence du Conseil constitutionnel a conduit le Conseil d'Etat à recevoir un nombre croissant de moyens fondés sur la méconnaissance d'une disposition constitutionnelle, fût-ce une disposition intégrée au bloc de constitutionnalité Ass décembre 1978, GISTI où le Conseil d'Etat se fonde sur le préambule de la Constitution de 1946 ayant valeur constitutionnelle). Notre étude s'attardera donc préalablement sur l'ordre juridique interne (normes nationales et internationales) et dans un second temps sera étudiée l'interprétation des traités internationaux (II). [...]
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