Conseil d'État, 2015, AGRIF et Société La Plume, dignité humaine, ordre public, jurisprudence, Commune de Ville-sur-Illon, 1995, circonstances locales particulières, lancé de nains, haine raciale, Dieudonné, discrimination, juifs, police administrative, liberté d'expression
L'ordre public traditionnel était composé de la tranquillité, la salubrité et la sécurité publique. Celles-ci visent donc les troubles, les agitations, la prévention des risques d'accident ou encore de la transmission des maladies et ne concernaient en aucun cas la personne humaine et son for interne.
Ainsi une simple représentation de comédie ne heurte pas à la conception primitive de l'ordre public puisque comme toute représentation de comédie peut porter des paroles qui soient rattachées à une certaine catégorie de la société : hommes/femmes/enfants/policiers/avocats/médecins, mais pour autant il n'y a pas une atteinte à l'ordre public en général, à l'ordre public de tout le monde, de l'ordre public de chacun des citoyens, de la société en entier. Ainsi la représentation de Dieudonné quant aux juifs pourrait en quelque mesure être assimilée à une simple comédie, même si cela porte sur des éléments de l'histoire des juifs.
[...] En l'espèce Dieudonné a déjà fait l'objet d'une sanction de la part du préfet de Loire-Atlantique, confirmé par le Conseil d'État (Conseil d'État, ordonnance de Dieudonné, 2014) justifiant un risque réel de trouble du spectacle à l'ordre public. Il s'agit ici des « gestes à caractère antisémite, incitant à la haine raciale » et donc provocateurs des troubles moraux, à la dignité humaine, alors même qu'il ne s'agit pas d'un trouble matériel, tel que la conception classique de l'ordre public le perçoit. [...]
[...] Ainsi, dans le présent arrêt, le ministre précise que l'interdiction du spectacle peut avoir lieu seulement lorsque cela porte atteinte à la dignité humaine et s'il existe un degré suffisant de certitude du trouble que cela peut causer. Le juge administratif initie à ce sens un triple test de proportionnalité, qui a été détaillé en premier dans Conseil d'État, Association pour la promotion de l'image et autres : la mesure doit être adaptée, nécessaire et proportionnée, dont l'arrêt en cause fait précisément référence. [...]
[...] Une mesure d'interdiction strictement proportionnée au risque et gravité de trouble à l'ordre public Comme l'a précisé l'arrêt Benjamin, il faut s'en tenir de l'élément que la liberté c'est le principe et que l'interdiction d'une conférence, d'un spectacle doit être particulièrement motivé puisqu'il s'agit ici de porter atteinte à la liberté fondamentale, qui est à l'essence même de la société française. Le juge fait donc un contrôle maximal pour déterminer si la mesure est proportionnée au risque de trouble à l'ordre public, qui est déjà constitué. Il faut en effet reprendre la question de la gravité du trouble à l'ordre public pour savoir quelle mesure doit être prise plus précisément. [...]
[...] Autrement dit, à priori, il n'y a pas de trouble à l'ordre public. Le problème de la représentation comique au regard de la dignité de la personne humaine, nouvelle composante de l'ordre public Un premier élargissement de l'ordre public a été vers la moralité publique (Conseil d'État, Société « Les films Lutétia », 1959) et en l'espèce cela signifierait que les maires seraient autorisés d'interdire la représentation comédique du Dieudonné seulement lorsqu'il y a une forte concentration de la population juive dans la localité, pareil que l'a été pour le film qui avait le visa ministériel, mais qui pouvait être préjudiciel pour la population communale, ou aussi pour la population d'une ville d'un film reposant sur un crime qui a eu lieu dans la commune. [...]
[...] Il y a lieu à ce sens d'un véritable traitement inhumain et dégradant des personnes d'origine juive, en l'absence de circonstances particulières et même en absence d'un préjudice corporel, physique, mais par les seules paroles prononcées. D'autant plus que dans son arrêt, Conseil d'État, GISTI le Conseil d'État a renforcé le statut de la dignité humaine non pas d'une seule composante de l'ordre public, qui est simplement limitatrice des droits et libertés, mais d'un véritable droit, d'un principe à valeur constitutionnelle, que les autorités de police administrative sont en charge et dans l'obligation d'assurer, de sorte que nulle personne ne soit soumise à toute forme de traitement inhumain et dégradant, et qui est d'autant renforcée par l'article 3 CEDH qui prohibe ce type de comportement. [...]
Bibliographie, normes APA
Citez le doc consultéLecture en ligne
et sans publicité !Contenu vérifié
par notre comité de lecture