Le juge administratif, avec l'essor quantitatif du droit communautaire et sa reconnaissance qualitative depuis l'arrêt Nicolo notamment, est de plus en plus confronté aux normes d'origines communautaires. Celles-ci peuvent prendre différentes formes, la directive étant sans doute la plus originale et la plus fréquente. C'est d'ailleurs à la directive 92/43/CEE du 21 mai 1992 qu'est confronté le juge administratif à travers l'arrêt rendu par la 6e et la 1ere sous-sections du Conseil d'Etat le 20 avril 2005.
En l'espèce, cédant à la pression des éleveurs de bétail et des élus locaux, le ministre de l'Environnement et le ministre de l'Agriculture prennent conjointement le 12 août 2004 un arrêté autorisant l'abattage de quatre loups. En conséquence, plusieurs associations demandent au Conseil d'Etat l'annulation pour excès de pouvoir dudit arrêté au motif principal que celui-ci méconnaitrait la directive "Habitats" du 21 mai 1992 relative à la conservation des habitats naturels ainsi que de la faune et de la flore sauvage, la Convention de Berne relative à la conservation de la vie sauvage et du milieu naturel du 19 septembre 1979, ainsi que de l'arrêté du 17 avril 1981.
[...] Il faudra pour contester cela qu'elle néglige la réglementation nationale intervenue pour la transposition de la directive. Cette solution traduit le fait que les effets des directives sur les administrés et les particuliers sont subordonnés à l'existence d'une transposition en droit interne de la directive. En d'autres termes, il découle de cet arrêt que contrairement aux règlements communautaires, les directives sont dépourvues d'effets directs à l'égard des administrés, donc irrecevables à l'appui d'un recours formé contre un acte individuel si elles ne font pas l'objet d'une transposition interne. [...]
[...] Ce principe est désormais constitutionnalisé et d'application directe depuis l'entrée en vigueur de la Charte de l'environnement en mars 2005, consacrée dans l'arrêt récent de cette année. [...]
[...] Depuis, il est usuel que le Conseil d'Etat annule des actes réglementaires contrariant un traité international. Cependant, l'autorité supérieure de ces traités et conventions internationales sur le droit interne ne peut être invoqué par les administrés que s'ils sont dotés à leur égard d'un "effet direct", créateur de droits et obligations à leur profit ou à leur charge, et pas seulement d'obligations entre les Etats signataires. C'est ce principe que rappelle en l'espèce le Conseil d'Etat en estimant que cette convention "crée seulement des obligations entre les Etats parties à la convention" et qu'en conséquence, ne produit pas "d'effets directs dans l'ordre juridique interne". [...]
[...] La directive Habitats s'impose sans discussion à l'arrêté du 12 mars 2004. Il revient alors au juge de vérifier si l'autorité administrative en établissant un décret autorisant la destruction de quatre loups n'a pas mal interprété les conditions requises à une telle destruction posée par la directive Habitats. La conformité de l'arrêté du 12 mars 2004 à la directive Habitats constatée par le juge administratif En estimant qu'il appartient aux autorités administratives, "sous le contrôle du juge", d'agir conformément au droit communautaire, le juge définit son office. [...]
[...] Il se proclame ipso facto gardien de la légalité administrative au regard du droit communautaire. Le problème posé au juge est alors de vérifier s'il n'y a pas eu erreur de droit et si les faits de l'espèce ont reçu une qualification juridique correcte, ce qui requiert une interprétation des textes de la directive Habitats. Comme vu précédemment, l'arrêt prend soin de rappeler que les autorités administratives françaises, lorsqu'une règle communautaire est en cause, doivent respecter l'interprétation conforme au droit communautaire. [...]
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