Conseil d'État 2 mars 1962, arrêt Rubin de Servens, commentaire d'arrêt, article 16 de la Constitution, pouvoirs exceptionnels du Président, Général de Gaulle, principe de légalité, intégrité du territoire national, acte de gouvernement, tribunal militaire spécial, zone de non-droit, article 34 de la Constitution
Georges Clemenceau (1841-1929) considérait que "[l]orsque les armes parlent, les lois sont silencieuses". Cette citation implique l'existence de circonstances tout à fait exceptionnelles. C'est en ce sens que dans le cadre de la théorie des circonstances exceptionnelles, le principe de légalité se voit impacté par de nombreuses atténuations. En effet, le droit n'existe pas pour lui-même, mais existe pour régir les relations qu'entretiennent les individus entre eux, de même qu'avec l'État. Or des circonstances impliquent et obligent le droit à s'adapter ; par voie de conséquence, le principe de légalité, lui aussi, est amené à s'adapter aux circonstances de temps et de lieu.
Ces circonstances exceptionnelles sont irriguées par des textes, mais aussi des créations jurisprudentielles. Dans le cas d'espèce ici jugé et rapporté par le Conseil d'État en date du 2 mars 1962, Rubin de Servens, il a été question d'un litige suite à une tentative de putsch à Alger, en Algérie, intervenue en 1961. L'article 16 de la Constitution du 4 octobre 1958 instituant la Ve République fut mis en place, et, a confié au Président de la République des pouvoirs exceptionnels en la matière législative et en la matière réglementaire, à savoir : les pleins pouvoirs.
[...] Cela fait alors l'objet de vives critiques du fait d'un pouvoir fort et étendu attribué au Président de la République d'autant plus que la décision de mettre en œuvre cet article 16, étant constitutif d'un acte de gouvernement est dépourvue de tout contrôle. Est- ce alors véritablement une zone de non-droit ? A. L'article 16 de la Constitution du 4 octobre 1958 : des critiques à l'encontre de cette décision au bénéfice d'un pouvoir fort du Président de la République Dans le cadre de l'article 16 de la Constitution, comme le relève le Conseil d'État, le Président de la République est le détenteur d'un principe relativement étendu. [...]
[...] Cet acte est par nature insusceptible de recours devant les juridictions administratives. L'acte de gouvernement échappant à tout contrôle, les conditions de fond de mise en œuvre de cet article 16 de la Constitution ainsi que sa durée échappent purement et simplement à tout contrôle juridictionnel effectif. Aucun contrôle des décisions présidentielles n'est effectué. Sur le plan strictement légal, juridique, il est extrêmement grave de constater qu'aucun recours n'est possible, qu'il s'agit en effet d'une certaine zone de non-droit, pourtant force est de constater qu'il n'aura été mis en œuvre qu'une seule et unique fois. [...]
[...] Il apparait alors opportun de se demander dans quelle mesure la jurisprudence Rubin de Servens, du Conseil d'État, en date du 2 mars 1962, a participé à une évolution jurisprudentielle au regard de la nature de ces différentes décisions ? Les juges du Conseil d'État reconnaissent la constitutionnalisation des circonstances exceptionnelles en droit français et donc la possibilité d'apporter des atténuations plus ou moins prononcées à l'encontre du principe de légalité Ces derniers se sont également prononcés au regard du contrôle des mesures qui sont en effet prises par le Président de la République en application des dispositions de l'article 16 de la Constitution du 4 octobre 1958 (II). [...]
[...] La reconnaissance prétorienne d'une immunité jurisprudentielle au regard des actes de nature législative Les juges du Conseil d'État ont retenu dans le cas de l'espèce que les décisions qui interviennent en effet dans le domaine législatif, et sur le fondement de l'article 16 de la Constitution de 1958, ne sont pas susceptibles d'un recours devant une juridiction. Donc, les dispositions législatives qui sont prises en application de cette disposition constitutionnelle ne sont pas soumises au principe de légalité : elles échappent à tout contrôle, quel qu'il soit. [...]
[...] Dans le cas d'espèce, tel que reporté par les juges du Conseil d'État, l'article 16 de la Constitution fut mis en œuvre par le Président de la République alors que quelques jours à la suite de cette mise en place, les pouvoirs publics refonctionnaient de façon tout à fait normale. C'est en ce sens que le requérant considère que la durée (aussi infime soit-elle) était manifestement abusive au regard de sa durée. C'est durant cette période que le Président de la République décidera de la création du tribunal militaire spécial qui condamnera le sieur Rubin de Servens. [...]
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