La relation entre l'administration et ses administrés est véritablement asymétrique. C'est pourquoi le droit administratif et la jurisprudence ont mis à la disposition des administrés des moyens de contestation. Le recours pour excès de pouvoir en est le parfait exemple. En effet il tend à faire annuler directement par le juge de l'excès de pouvoir, un acte administratif unilatéral illégal, et ce avec effet rétroactif. Néanmoins, ces techniques de défense ont des limites et nécessitent de remplir certaines conditions pour être mises en oeuvre. La jurisprudence a joué un grand rôle dans la détermination de ces conditions. L'arrêt du Conseil d'Etat du 2 juin 2006, “Chauderlot” l'illustre clairement.
En l'espèce, le titulaire d'un plan d'épargne en action depuis plus de 5 ans, décide de transférer son domaine fiscal de la France vers un autre pays membre de l'Union européenne. Cependant, la législation alors en vigueur, à savoir diverses instructions prises par le directeur de la législation fiscale, prévoit que le transfert à l'étranger de son domicile fiscal par le titulaire d'un plan d'épargne en action ouvert depuis plus de cinq ans, entraîne la clôture de celui-ci et le paiement de contributions sociales.
Or, cet administré conteste la légalité de ces instructions. Il forme alors un recours pour excès de pouvoir contre ces différentes dispositions auprès du secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat le 16 décembre 2004.
[...] L'instruction en date du 3 mars 1993 qui impose la clôture du plan d'épargne en action n'est pas déclarée illégale au regard du texte. Il faut cependant noter que cette contrariété n'est établie que dans le cas de contribuables transférant leur domicile fiscal dans un autre Etat membre de la Communauté européenne dans le cadre de leur liberté d'établissement. Le contrôle de conventionnalité est un outil performant pour assurer un meilleur encadrement des normes de droit interne, du fait notamment de la place importante du droit communautaire et international. [...]
[...] Le Conseil d'Etat se fonde donc sur le caractère impératif d'une disposition pour se prononcer en faveur ou en défaveur d'un recours pour excès de pouvoir à son encontre. On dénombre bien entendu d'autres conditions de recevabilité relatives au délai ou à la compétence du juge par exemple. Il faut noter toutefois que le caractère impératif d'une disposition est discutable dans le sens où l'impérativité est soumise à une certaine sélectivité du juge qui décide librement en se fondant sur des éléments dont il est sans doute parfois le seul à connaître le sens exact. [...]
[...] I - L'arrêt “Chauderlot”, une application de la jurisprudence du Conseil d'Etat quant à la recevabilité du recours pour excès de pouvoir contre des actes administratifs Le recours pour excès de pouvoir formé est contesté par le ministre car les dispositions visées n'auraient pas de caractère impératif A contrario, le Conseil d'Etat considère que les instructions remplissent les conditions de recevabilité pour la validité de cette procédure : elles ont un caractère impératif Rappel par l'arrêt “Chauderlot” de la non-recevabilité d'un recours pour excès de pouvoir à l'encontre de dispositions dénuées de caractère impératif Le ministre de l'Économie, des Finances et de l'Industrie s'oppose au recours pour excès de pouvoir du contribuable au motif que les actes contestés découlent directement de textes législatifs, auxquels il ne serait donc rien ajouté. Et ce, malgré leur caractère impératif et général. [...]
[...] Le Conseil d'Etat dans cet arrêt doit néanmoins s'intéresser au fond des dispositions. Autrement, après avoir dégagé les conditions d'acceptation du recours pour excès de pouvoir et après l'avoir accepté, il doit s'interroger sur la légalité des dispositions contestées. II - L'arrêt “Chauderlot”, le rappel de l'importance du contrôle de conventionnalité des instructions contenant des dispositions impératives, par rapport à un principe communautaire Le juge administratif exerce un contrôle de conventionnalité des dispositions impératives par rapport aux normes communautaires et son application est réaffirmée par le Conseil d'Etat La suprématie du droit communautaire, via l'article 43 du traité instituant la Communauté européenne, sur les dispositions impératives à caractère réglementaire et général L'administré dénonce dans ses requêtes l'illégalité des instructions au regard de l'article 43 du Traité instituant la Communauté européenne qui consacre le principe de la liberté d'établissement. [...]
[...] Celle-ci opérait une différence entre les circulaires interprétatives et les circulaires réglementaires. Les premières ne créent pas de droit et sont insusceptibles de recours, tandis que les secondes dénaturent le texte auquel elles se rapportent : elles pouvaient donc faire l'objet d'un recours. Cependant, cette conception a été vivement contestée, notamment parce qu'en suivant cette logique, le juge devait analyser le fond de la circulaire pour examiner la recevabilité d'un tel recours. Or il ne doit jamais opérer de la sorte. [...]
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