Décision du Conseil d'État du 17 octobre 2013, pertinence de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, article R311-1 du Code de la justice administrative, article L. 11-1 I du Code de l'expropriation, nécessité publique, article 17 de la DDHC, article 61-1 de la Constitution, article 544 du Code civil, théorie du bilan, article 6 de la Charte de l'environnement, arrêt Sporrong et Lönnroth, arrêt Grassin, commentaire d'arrêt
"La propriété, c'est le vol !", disait le philosophe Pierre-Joseph Proudhon dans son oeuvre "Qu'est-ce que la propriété ?" Cette formule célèbre permit à son auteur de dire que sans système légal perfectionné, la propriété d'un bien et plus précisément sa possession n'est nulle autre qu'une contrainte exercée par le supposé propriétaire, à l'image d'un voleur. Partant, c'est bien au juge administratif qu'il incombe dans son habit de juge de l'excès de pouvoir de statuer sur l'expropriation pour cause d'utilité publique. Tel a été le cas dans un arrêt rendu par le Conseil d'État le 17 octobre 2013, Collectif des élus qui doutent de la pertinence de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes, dont les faits matériels se rapportent à un décret pris en date du 9 février 2008 par le Premier ministre.
Il y est déclaré d'utilité publique les travaux nécessaires à la réalisation du projet d'aéroport pour le Grand Ouest-Notre-Dame-des-Landes et de sa desserte routière, et est également approuvé les nouvelles dispositions des plans locaux d'urbanisme des communes de Fay-de-Bretagne, Grandchamp-des-Fontaines, Notre-Dame-des-Landes, Treillières, Vigneux-de-Bretagne dans le département de la Loire-Atlantique. Suite à l'adoption de ce décret, le Collectif des élus qui doutent de la pertinence de l'aéroport de Notre-Dame-des-Landes (CEFDPA), représenté par ses coprésidents, M. D… A et Mme C… B…, adresse une demande d'abrogation dudit décret portant déclaration d'utilité publique.
[...] La logique déductive d'un rejet motivé par le contrôle de la légalité des déclarations d'utilité publique Le Conseil d'État après avoir énoncé la règle, en fait application au moyen de la théorie du bilan, ce qui a pour conséquence d'amener le Conseil d'Etat à rejeter la question soulevée L'application louable de la théorie du bilan Tout d'abord, les juges accueillent la contestation des requérants et pour y répondre, ils font ainsi recours à la théorie du bilan coûts-avantages. En effet, en précisant que lorsqu'une opération d'utilité publique est contestée devant la juridiction administrative, le juge est tenu « de vérifier successivement que celle-ci répond à une finalité d'intérêt général, que l'expropriant n'est pas en mesure de la réaliser dans des conditions équivalentes sans recourir à l'expropriation, notamment en utilisant des biens se trouvant dans son patrimoine et, enfin, que les atteintes à la propriété privée, le coût financier et, le cas échéant, les inconvénients d'ordre social ou économique que comporte l'opération ne sont pas excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente », le Conseil d'État confirme une fois de plus son modus operandi jurisprudentiel, retenu pour la première fois dans un célèbre arrêt, Commune de Levallois-Perret Boyer, rendu le 19 octobre 2012. [...]
[...] Ensuite, les juges considèrent toutefois, que, tant les articles 1er et 31 de la loi du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l'environnement, que les articles L.1212-1 et suivants du code des transports, sont dépourvues de portée normative. Le Conseil d'État conclut donc, en l'espèce, que ces dispositions sont de droit souple, dans la mesure où elles se bornent à fixer des objectifs généraux à l'action de l'État en matière de développement durable ; où définissent en termes généraux les objectifs poursuivis par l'Etat en matière de développement des réseaux de transport. [...]
[...] » Ainsi, il incombe au juge, en l'occurrence le Conseil d'État de contrôler, comme le rappelle la Cour européenne des droits de l'Homme (Cour EDH) dans un arrêt rendu le 23 septembre 1982, dit Sporrong et Lönnroth, qu'un « un juste équilibre a été maintenu entre les exigences de l'intérêt général de la communauté et les impératifs de la sauvegarde des droits fondamentaux de l'individu ». Enfin, les juges du Conseil d'État s'alignant ainsi sur le fil droit de la précédente jurisprudence de la Cour EDH, ils motivent leur rejet de toute méconnaissance de l'exigence de nécessité résultant l'article 17 de la DDHC par le contrôle ainsi opéré sur la légalité des déclarations d'utilité publique. [...]
[...] Ainsi, les juges font une interprétation in concreto dont la précision des dispositions est indispensable. Cette analyse se trouve bel et bien confirmée par une jurisprudence Fédération nationale des associations d'usagers des transports, rendus postérieurement à l'arrêt commenté, le 15 avril 2016, et, dans laquelle le Conseil d'État avait annulé la déclaration d'utilité publique du fait que les inconvénients du projet l'emportaient sur ses avantages « dans des conditions à lui faire perdre son caractère d'utilité ». Enfin, les requérants évoquent des règles de procédure certes postérieures, mais que le Conseil d'État finit par neutraliser. [...]
[...] En effet, les motifs factuels sur lesquels une autorité administrative fait reposer sa déclaration peuvent se mouvoir et ainsi, par l'évolution de circonstances de fait, cette même déclaration peut sembler obsolète. Ainsi, le droit devient le reflet de la réalité, dans la mesure où les juges en constatant des évolutions économiques peuvent procéder à l'abrogation d'une déclaration d'utilité publique. Ensuite, les requérants portent devant le Conseil d'État des éléments se rapportant à l'inclusion du secteur aérien dans le système communautaire d'échanges de quotas d'émission de gaz à effet de serre ainsi que de l'augmentation du prix du pétrole. [...]
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