La responsabilité de la puissance publique du fait de ses agents est un régime fondé sur la distinction entre la faute personnelle et la faute de service (TC 30 juillet 1873 Pelletier). Si la faute commise par les agents de l'administration relève du domaine de leur compétence, alors les agents seront protégés par l'immunité qui est prévue dans la loi de 1790. En revanche, si la faute commise par les agents de l'administration n'est pas une faute de service, si elle ne se rapporte pas à leur fonction, il s'agit non plus d'une faute de service mais d'une faute personnelle pour la commission de laquelle les intéressés peuvent être mis en cause devant la juridiction judiciaire. Par un arrêt du Conseil d'Etat, La ruelle, 28 juillet 1951, le CE a admis que l'administration pouvait se retourner contre son agent lorsque celui-ci a commis une faute personnelle et il l'admet dans l'hypothèse où la faute personnelle est dépourvue de tout lien avec le service. L'arrêt Moine du 17 décembre 1999 en est une illustration.
Dans un îlot du Pacifique, le 11 janvier 1987, le Lieutenant Moine, de sa propre volonté, organise un exercice à balle réelle et tire avec son arme de service sur le soldat Patissou placé sous ses ordres, lequel décède de ses blessures. Condamné pénalement, le lieutenant est radié des cadres de l'armée par un décret présidentiel du 29 juin 1988. L'Etat ayant indemnisé les parents de la victime, le ministre de la Défense émet, le 6 mai 1988, un titre exécutoire à l'encontre de Mr Moine pour obtenir le remboursement des sommes ainsi versées. Ce premier titre exécutoire a été annulé par un arrêt du Conseil d'Etat du 3 octobre 1997 parce qu'il n'indiquait pas les bases de sa liquidation. Par conséquent, le ministre de la Défense émet un second titre exécutoire le 26 janvier 1998 qui indique ces bases. Mr Moine demande alors au Conseil d'Etat d'annuler ce nouveau titre.
Le Conseil d'Etat rejette ce recours car il constate l'existence d'une faute personnelle et il en tire les conséquences du point de vue de la réparation.
[...] Dans ces conditions, son comportement est constitutif d'une faute personnelle non sans lien avec le service et avec son arme personnelle. - Cependant, ici, le CE considère que la faute commise, en raison de sa gravité est détachable des fonctions. Une faute personnelle détachable du service La faute commise, bien qu'étant intervenue dans le service, avait le caractère d'une faute personnelle détachable de l'exercice par l'intéressé de ses fonctions Le CE s'appuie alors sur deux arguments : un comportement de l'agent inexcusable et la gravité de son agissement Un comportement inexcusable - Pas d'exigence particulière d'un supérieur hiérarchique en dehors de tout exercice organisé par l'autorité supérieure - Exercice insensé, irresponsable - CE 21 décembre 1987 Kessler : frapper ce n'est pas une pratique administrative normale. [...]
[...] II- L'action récursoire de l'Etat envers son agent Celle-ci est rendue possible par la nature même de la faute ce qui a pour conséquence d'incomber à l'agent la totalité de la réparation à verser La possibilité d'intenter une action récursoire Si les fonctionnaires et agents des collectivités publiques ne sont pas pécuniairement responsables envers lesdites collectivités des conséquences dommageables de leurs fautes de service, il ne saurait en être ainsi lorsque le préjudice qu'ils ont causé à ces collectivités est imputable à des fautes personnelles détachables de l'exercice de leurs fonctions L'absence de responsabilité de l'agent en cas de faute de service : - Décret-loi du 19 septembre 1870 : irresponsabilité de l'agent lorsque sa faute consiste en une faute de service - Les fautes de service correspondent essentiellement à trois cas : la faute dans l'organisation et le fonctionnement du service : le service est mal organisé, il a mal fonctionné C'est le plus fréquent / la carence fautive, l'abstention fautive : CE Doublet 1959, Mossy Cremayel 2003 / L'illégalité fautive : l'administration n'applique pas les textes, comprend mal les textes : CE arizona tobacco product 1992 - Dans ces cas-là, les agents ne sont pas responsables de leurs fautes commises dans l'exercice de leur mission. L'Etat en est seul responsable. - TC 13 janvier 1958 Sieur Peyre : l'appréciation que le proviseur a portée n'est que la suite logique de la position du conseil de discipline. Il n'a pas émis d'avis personnel, il n'a pas commis de faute qui serait sans lien avec le service. [...]
[...] Ce premier titre exécutoire a été annulé par un arrêt du Conseil d'Etat du 3 octobre 1997 parce qu'il n'indiquait pas les bases de sa liquidation. Par conséquent, le ministre de la Défense émet un second titre exécutoire le 26 janvier 1998 qui indique ces bases. Mr Moine demande alors au Conseil d'Etat d'annuler ce nouveau titre. Le Conseil d'Etat rejette ce recours car il constate l'existence d'une faute personnelle et il en tire les conséquences du point de vue de la réparation. [...]
[...] L'obligation faite à l'agent de réparer le préjudice subi La faute étant une faute personnelle dépourvue de tout lien avec le service, l'action récursoire de l'Etat envers son agent est alors possible. L'agent devra donc alors rembourser les sommes versées à la famille de la victime par l'administration à celle-ci, le fait qu'il soit en procédure judiciaire et qu'il ne soit plus agent public étant indifférent à cette obligation. Une action relevant du contentieux du juge administratif - M Moine, devenu commerçant, n'est pas fondé à invoquer à l'appui de ses conclussions tendant à l'annulation du titre exécutoire attaqué la circonstance qu'il aurait été lis en redressement judiciaire - ici le CE s'aligne sur la jurisprudence du CE 14 janvier 1935 Thépaz : s'il n'y a pas coïncidence entre les deux fautes, alors il est possible que l'agent soit jugé devant le tribunal judiciaire en même temps que devant le juge administratif. [...]
[...] C'est donc une faute de service. L'Etat doit donc répondre des conséquences dommageables de la faute. - Mais ici, en raison de son extrême gravité cette faute justifie qu'ait été mise à la charge du requérant la totalité des conséquences dommageables qui en sont résultées La possibilité d'une action récursoire contre l'agent en cas de faute détachable du service : - En l'espèce, le CE a considéré que la faute était une faute personnelle dépourvue de tout lien avec le service. [...]
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