En vertu de l'article 1er de la loi du 29 juin 1934 il est illégal de fabriquer, d'exposer de mettre en vente des produits sous la dénomination de crème dans le cas où la production ne provient pas exclusivement du lait. La société anonyme des produits laitiers « la fleurette » produisait alors la « Gradine », crème issue en partie seulement de lait. Elle se trouvait donc prohibée des rayons. Pour la première fois, les juges du Palais Royal estimèrent que l'Etat devait être tenu responsable en raison de dommages produits par une loi.
On peut clairement observer cette affirmation lorsque le législateur énonce que « rien, ni dans le texte même de la loi ou dans ses travaux préparatoires, ni dans l'ensemble des circonstances de l'affaire, ne permet de penser que le législateur a entendu faire supporter à l'intéressée une charge qui ne lui incombe pas normalement ; que cette charge créée dans un intérêt général doit être supportée par la collectivité ».
On pourrait penser que cette décision est une avancée exceptionnelle de l'Etat de droit. Cependant les conditions restrictives d'application de cette jurisprudence, vont scléroser, ce contentieux. Tout d'abord, il suffit que la loi prévoie l'absence d'indemnisation pour que celle-ci soit automatiquement refusée, comme on peut le constater dans l'arrêt Perthuis et autre du 13 octobre 1978. Secondement, le préjudice indemnisable doit être suffisamment grave et spécial, ce qui réduit d'autant plus les possibilités d'engager cette responsabilité du fait des lois.
[...] Ainsi le Conseil d'Etat consacre une jurisprudence fort intéressante afin de garantir l'Etat de Droit, mais il verrouille le contentieux d'une telle façon, que ce n'est que dans un nombre très limité de cas que cette jurisprudence pourra jouer. [...]
[...] Dans une jurisprudence du 30 mars 1966 le Conseil d'Etat est venu élargir la jurisprudence La Fleurette, mais cette fois aux engagements internationaux. Ainsi la responsabilité de l'Etat est susceptible d'être engagée sur le fondement de l'égalité des citoyens devant les charges publiques pour assurer la réparation de préjudices nés de conventions conclues par la France avec d'autres Etats. Récemment cette veine jurisprudentielle a connu un prolongement de signification, cette fois concernant la promulgation d'une loi contraire à un engagement international. [...]
[...] Secondement le préjudice indemnisable doit être suffisamment grave et spécial, ce qui réduit d'autant plus les possibilités d'engager cette responsabilité du fait des lois. Partie 1 : La responsabilité du fait d'une norme Par le truchement de cette décision La Fleurette du 14 janvier 1938, le Conseil d'Etat est venu reconnaître la possibilité d'une responsabilité du fait d'une loi ; par la suite cette solution a été étendue à d'autres normes : La responsabilité du fait d'une loi Dans un premier temps le Conseil d'Etat ne s'est pas reconnu compétent pour engager la responsabilité en raison des préjudices qui pouvaient résulter de la promulgation d'une loi. [...]
[...] Après avoir analysé la loi interdisant la production de crème lorsqu'elle n'est pas faite exclusivement avec du lait, le Conseil d'Etat estime que le législateur n'a pas voulu faire supporter par le requérant la charge qu'il a créée. : La responsabilité du fait d'une convention internationale Postérieurement à cette décision La Fleurette, le Conseil d'Etat est venu élargir la liste des normes susceptibles d'engager la responsabilité de leur auteur. Par une décision du 14 janvier 1938 Compagnie générale de grande pêche, le Conseil d'Etat est venu appliquer cette jurisprudence aux décrets coloniaux. Même solution concernant les décrets-lois avec la jurisprudence Société des Etablissement Lacaussade rendue le 22 octobre 1943. [...]
[...] Mais comme il s'agit d'une responsabilité sans faute fondée sur la rupture d'égalité devant les charges publiques, il est en plus nécessaire que le préjudicie présente un caractère anormal et spécial. Il semblerait que le Conseil d'Etat interprète de manière particulièrement restrictive la notion de préjudice spécial. Pour permettre l'indemnisation, la législation ne doit toucher qu'un nombre très limité de personnes. Dans la jurisprudence La Fleurette il semblerait que la société anonyme des produits des produits laitiers La Fleurette soit la seule affectée par la loi du 29 juin 1934. [...]
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