Le Conseil d'Etat, dans son arrêt du 14 février 2007, a eu à trancher un problème relatif à un refus de naturalisation d'une personne pour défaut d'assimilation aux valeurs essentielles françaises. Dans cette affaire, la Haute Juridiction a clairement admis que les dispositions de l'article 21-24 du Code civil pouvaient justifier une décision d'irrecevabilité fondée sur un défaut d'adhésion aux principes qui régissent la République française.
M. Farid A, ayant fait l'objet d'une procédure de naturalisation, s'est vu accorder la nationalité française par décret en date du 13 janvier 2004, publié au Journal officiel le 14 janvier 2004. Cependant, au regard de l'article 27-2 du Code civil, il s'avère que « les décrets portant acquisition, naturalisation ou réintégration, peuvent être rapportés sur avis conforme du Conseil d'Etat dans le délai d'un an à compter de leur publication au Journal officiel si le requérant ne satisfait pas aux conditions légales ».
Le problème de droit posé au Conseil d'Etat est donc ici celui de savoir dans quelle mesure et sous quelles conditions, un décret portant naturalisation d'une personne, peut être rapporté par le gouvernement pour défaut d'assimilation à la Communauté française ?
[...] C'est ainsi que dans l'arrêt étudié, le Conseil d'État a clairement admis que les dispositions de l'article 21-24 pouvaient justifier une décision d'irrecevabilité fondée sur un défaut d'adhésion aux principes qui régissent la République française. Finalement, si l'on veut tenter une synthèse du contenu de la notion d'assimilation au plan juridique, on pourrait avancer que celle-ci comprend la connaissance de la langue française, la connaissance des droits et des devoirs du citoyen par le postulant, mais également l'adhésion aux principes qui régissent la République française : Le Code civil devrait donc faire référence à cette adhésion, d'autant plus que cela permettrait une meilleure sécurité juridique pour les postulants : en effet, cette condition restant très subjective, les postulants ne peuvent donc savoir à l'avance s'ils seront considérés comme assimilés à la Communauté française ou non. [...]
[...] Cet arrêt, comporte un réel intérêt notoire, dans la mesure où il vient préciser les contours d'une notion floue, celle d'assimilation à la Communauté française : Cette notion constitue en effet, une condition légale de première importance pour acquérir la nationalité française. Cependant, cette notion d'assimilation reste définie de manière minimaliste par le Code civil, qui, concernant le mode d'acquisition par décret de l'autorité publique, précise que ne peut être naturalisé s'il ne justifie de son assimilation à la Communauté française, notamment par une connaissance suffisante, selon sa condition, de la langue française et des droits et devoirs conférés par la nationalité française (article 21-24 du Code civil). [...]
[...] À l'inverse, certains comportements témoignent d'un défaut d'assimilation. C'est le cas de la fréquentation exclusive des étrangers issus de la même tradition et l'observance stricte de coutumes radicalement opposées aux usages français Dans la pratique, l'administration doit donc porter une appréciation sur le comportement du postulant en ce qu'il révèle l'adhésion ou le défaut d'adhésion aux valeurs qui fondent la République française : Laïcité, liberté, égalité de traitement homme/femme, respect de l'ordre public et des institutions, ce qui fait que cette condition reste donc une condition appréciée subjectivement. [...]
[...] Cependant, ladite circulaire citée antérieurement en date du 27 avril 1995 indique toutefois d'une manière lapidaire que l'appartenance à des mouvements recourant à la violence contre des institutions du pays d'origine constitue un motif de refus, sans tenir compte de la nature du régime politique en cause. Une réécriture de l'article 21-24 du Code civil serait donc nécessaire, au regard de cette évolution de la Jurisprudence, afin de donner un contenu plus riche à la notion d'assimilation, laquelle va bien évidemment au-delà de la simple connaissance des droits et devoirs conférés par la nationalité française En effet, le gouvernement aidé par le Conseil d'État ne cesse d'élargir la notion d'assimilation, et fait par conséquent entrer sous cette condition, des aspects qui n'étaient pas prévus au départ, de façon à refuser la naturalisation à des individus qui, si la notion d'assimilation avait été mieux définie, auraient peut-être obtenu la nationalité française. [...]
[...] Cependant, et dans cela que réside toute la particularité de cette procédure, c'est un mode d'acquisition dépendant d'une décision discrétionnaire du gouvernement. Cela signifie donc que le gouvernement n'est jamais obligé d'octroyer la nationalité française au demandeur, même si celui-ci répond aux conditions légales exigées par les textes. Aujourd'hui, le droit de la naturalisation reste en définitive assez semblable depuis 1945 : la seule réforme pouvant avoir de l'importance ici étant celle du 22 Juillet 1993 par laquelle les pouvoirs publics sont obligés de motiver en toute hypothèse leur décision de refus de naturalisation (Article 27 du Code Civil). [...]
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