Dans son arrêt 13 novembre 2002, ministre de l'Equipement, des Transports et du Logement c/ Société Hélitransport, le Conseil d'Etat détermine les actes de l'Etat susceptibles de contrôle et le fondement de l'engagement de sa responsabilité en matière contrôle de l'activité d'une société étrangère sur le territoire national prévu par des dispositions conventionnelles.
Des accords ont été conclus entre la France et la principauté de Monaco, les 8 août 1988 et 24 janvier 1991, relativement à la répartition des droits de trafic par hélicoptère, notamment entre Monaco et Nice. Chaque partie devait désigner séparément une société en vue de l'exploitation des droits ainsi répartis, chacune pouvant, dans le cadre de ces accords, retirer ou suspendre l'autorisation d'exploiter de l'entreprise choisie par l'autre partie, si celle-ci ne respectait pas les conditions d'exploitation prévues. La société désignée par la principauté a, pendant plusieurs années, dépassé la part de trafic résultant de ces accords, sans que les autorités françaises, saisies de plusieurs plaintes répétées de la société désignée par la France, ne suspendent son activité.
La société française saisit le tribunal administratif de Nice en vue de la réparation du préjudice, qu'elle impute à la carence des autorités françaises.
La juridiction administrative française était-elle compétente pour connaître la faute invoquée malgré le lien entre celle-ci et les relations diplomatiques ? La responsabilité de l'Etat dans l'application de dispositions conventionnelles visant le contrôle d'une activité d'une société étrangère sur le territoire national peut-elle être engagée en dehors de la faute lourde ?
[...] L'arrêt fait référence à l'application de dispositions conventionnelles mais n'envisage pas la possibilité d'assimiler l'abstention en cause à l'exécution d'une convention internationale, ce qui en aurait également fait un acte de gouvernement : la jurisprudence refuse de connaître des actes d'exécution de ces conventions (CE assemblée 23 novembre 1984 Association Les Verts CE assemblée 18 décembre 1992 Préfet de la Gironde contre Mahmedi). Le juge, s'il avait examiné cette question, aurait néanmoins pu opter pour la détachabilité de la carence comme il l'a fait à propos des relations diplomatiques. Une absence de justification de la détachabilité de la faute invoquée Le Conseil d'Etat ne justifie pas le caractère détachable de l'abstention qu'il examine. Il n'explicite par conséquent pas les critères utilisés. [...]
[...] L'expression toute faute laisse a priori entendre que la responsabilité de l'Etat peut être engagée pour faute simple en la matière. Il s'agit néanmoins bien d'une responsabilité pour faute dans une matière spécifique que l'arrêt ne rattache aucunement à la responsabilité sans faute susceptible d'être engagée du fait des traités en cas de préjudices anormaux et spéciaux causés par leur application lorsque la France y est partie (arrêt d'assemblée du 30 mars 1996 Compagnie générale Radioélectrique puis du 29 décembre 2004 M. [...]
[...] Aucun contentieux indemnitaire relatif aux actes de gouvernement n'est envisageable, même en l'absence de toute faute, et ce contrairement par exemple aux traités : CE 25 mars 1988 Société Sapvin. Si le juge n'a pas la possibilité de contrôler les actes de gouvernement par la différenciation des contentieux (acceptation d'un contentieux indemnitaire en l'absence de faute par exemple) il peut agir sur les limites de ses possibilités de contrôle à travers la réduction ou l'élargissement du domaine d'intervention de l'acte de gouvernement. [...]
[...] L'assimilation de l'abstention en cause à la conduite des relations diplomatiques en aurait fait un acte de gouvernement qui aurait échappé au contrôle juridictionnel. Or la jurisprudence assimile aux relations diplomatiques les actes d'intervention auprès des Etats étrangers afin de protéger les ressortissants français, leurs biens ou intérêts : CE 2 mars 1966 Dame Cramencel, CE section 28 juin 1967 Société des transports en commun de la région d'Hanoï. Plusieurs éléments des faits de l'espèce étaient susceptibles de justifier une telle qualification : la carence des autorités françaises concernait la protection d'une société française, vis- à-vis d'une société étrangère, désignée dans le cadre d'une convention internationale par un Etat étranger ; les effets de l'abstention n'étaient pas limités au cadre exclusivement français ; la société étrangère exerçait son activité partiellement à l'étranger. [...]
[...] De même l'arrêt Consorts Yener et Consorts Erez du 29 avril 1987 fait seulement était du caractère détachable des relations internationales de la France de la mission de sécurité en question. On peut trouver une justification de la pratique de la détachabilité dans les conclusions du commissaire du gouvernement Michel Bernard à propos de l'arrêt du 30 mars 1966 Compagnie d'énergie Radioélectrique : l'incompétence du juge administratif à l'égard de l'activité diplomatique de l'Etat français cesse dès lors que cette activité produit des effets dans l'ordre juridique interne et ne met pas en cause l'appréciation de la conduite des relations extérieures de l'Etat En l'absence de critères explicites, on peut pencher, comme le fait Clotilde Deffigier, vers l'idée d'un faisceau d'indices : la carence concerne une relation interne, entre les autorités françaises et une entreprise privée française, l'accord des autorités monégasques n'était pas requis pour effectuer la suspension, les conséquences de l'abstention n'affectaient que les deux sociétés, aucun contexte international particulier ne motivait le refus de la suspension. [...]
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