Conseil d'État, 12 mars 2021, taxe d'enlèvement des ordures ménagères, exonération du paiement, taxe fiscale, tribunal administratif
La décision de justice rendue par le Conseil d'État le 12 mars 2021 porte sur l'exonération du paiement d'une taxe d'enlèvement des ordures ménagères. En l'espèce, une société louant deux immeubles à un établissement de santé a demandé à être déchargée du paiement de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères concernant ces deux immeubles pour l'année 2017, au motif que ces immeubles n'ont pas recours à l'utilisation du service de collecte et d'élimination des ordures ménagères, soumis au paiement de cette taxe.
[...] C'est sur cet argument que le tribunal a fondé sa décision. En effet, il apparaitrait donc logique que, lorsqu'il s'agit d'une redevance pour service rendu, ne pas recourir à l'utilisation d'un service public, pour quelle que raison que ce soit, constitue une cause d'exonération du paiement de cette redevance. Toutefois, il s'agit en l'espèce d'une taxe, malgré l'erreur du tribunal administratif : on peut donc se demander quels effets juridiques amène le régime juridique de la taxe en l'espèce. Une non-utilisation du service ne justifiant pas une exonération automatique de la taxe fiscale Le Conseil d'État démontre que le concept même de la taxe fiscale empêche une exonération du paiement de celle-ci pour une simple non-utilisation du service public en question Toutefois, une justification amenée par la société aurait potentiellement pu amener à une décharge du paiement de cette taxe La taxe fiscale, imposition de toute nature entrainant un paiement obligatoire En l'espèce, le Conseil d'État critique le jugement rendu par le tribunal administratif en première instance pour, entre autres, une erreur de distinction entre une redevance pour service rendu et une taxe fiscale. [...]
[...] En statuant ainsi, le tribunal administratif tente de justifier que les immeubles loués par la société Natixis ne bénéficient pas du service public d'enlèvement des ordures ménagères. Toutefois, s'appuyer sur ce règlement sanitaire issu d'un arrêté interpréfectoral pose un problème concernant la hiérarchie des normes : le tribunal a justifié sa décision à partir d'un texte hiérarchiquement inférieur à d'autres dispositions contraires à celui-ci. En effet, l'article 1521 du Code général des impôts dispose que la taxe d'enlèvement des ordures ménagères porte sur toute propriété soumise à la taxe foncière sur les propriétés bâties, ce qui est le cas des immeubles de la société en question. [...]
[...] En effet, celui-ci s'est fondé sur certaines dispositions d'un règlement sanitaire du département de Paris, issu d'un arrêté interpréfectoral de 1979 : ce règlement disposait que les établissements hospitaliers, les locataires des immeubles de la société Natixis en l'espèce, ne dépendaient pas du service de collecte et d'élimination des déchets ménagers assurés par la collectivité, ici la commune, et devaient assurer eux-mêmes cette mission. De ce fait, les établissements hospitaliers devaient être considérés par le droit comme s'ils étaient situés dans des parties de la commune où le service en question ne fonctionne pas. Dans cette décision, le tribunal administratif a entendu s'aligner sur un jugement rendu par ce même tribunal le 8 mars 2018, qui, en s'appuyant sur ce même règlement, déchargeait un établissement de santé parisien du paiement de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. [...]
[...] Le problème de droit est alors en l'espèce : la société Natixis Lease Immo, au motif duquel elle ne recourt pas à l'utilisation du service public faisant l'objet d'une taxe fiscale, est-elle autorisée à se voir déchargée du paiement de cette taxe ? Le Conseil d'État répond ici par la négative : il annule le jugement rendu par le tribunal administratif de Paris le 12 juin 2020, et rejette les demandes de décharge de paiement de la taxe par la société. On peut alors se demander : le simple fait de ne pas recourir à l'utilisation d'un service public faisant l'objet d'une taxe fiscale constitue-t-il une cause d'exonération du paiement de cette taxe ? [...]
[...] En statuant ainsi, le Conseil d'État coupe court à une potentielle nouvelle jurisprudence du tribunal administratif qui, instituée une première fois par la décision du 8 mars 2018, et répétée ici par le jugement rendu au fond le 12 juin 2020, élargissait nettement le champ des causes d'exonération possibles concernant la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. En effet, en statuant de la sorte, le tribunal administratif laissait la porte ouverte à de nombreuses autres requêtes similaires et, ainsi, à une nette augmentation des exonérations du paiement de la taxe d'enlèvement des ordures ménagères. Le Conseil d'État reste donc fidèle à sa jurisprudence et empêche un élargissement trop important des possibilités d'exonération. [...]
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