Conseil d'État, 12 juin 2020, GISTI - Un acte de droit souple peut-il faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir en vue d'obtenir son annulation ?

Extraits

[...] Les effets notables sur les droits ou la situation d'autres personnes qui les agents chargés de les mettre en œuvre revêt un caractère décisif dans la recevabilité d'un recours en excès de pouvoir à l'encontre d'un acte de droit souple. Une prise en compte du droit souple certes, mais le Conseil d'État n'englobe pas pour autant l'ensemble des actes revêtant cette caractéristique. C'est ici bien évidemment l'objectif de cette prise en compte, de prendre des actes qui seraient à même d'entrainer des conséquences réelles et concrètes à l'encontre de personnes alors même qu'ils ne seraient pas en mesure de remplir les conditions formelles d'une norme juridique contraignante. [...]

[...] Cet arrêt GISTI de 2020 marque ainsi la consécration de la compétence du juge administratif pour connaitre du recours en excès de pouvoir à l'encontre de ces actes. Le Conseil, par le biais de son arrêt GISTI de 2020, qui a par ailleurs fait son entrée au GAJA en 2021, et plus précisément par la rédaction de son premier considérant, entend offrir une série d'illustrations de ces actes en précisant notamment que sont susceptibles de faire l'objet d'un contrôle circulaires, instructions, recommandations, etc. [...]

[...] Cet arrêt marque ainsi la consécration de la compétence du juge administratif concernant des actes de droit souple Une consécration qui s'insère dans une vaste opération d'expansion des actes susceptibles de faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir (II). La consécration d'un droit mou conditionné par des effets concrets La consécration de ce droit souple se traduit par une progressive appréhension de ce dernier en droit interne dont la recevabilité dans le cadre d'un recours en excès de pouvoir se matérialise par la nécessité de produire des effets concrets Une progressive appréhension du droit souple dans l'ordonnancement juridique français La progressive introduction en droit interne du droit souple, s'opère sous l'influence des relations internationales et notamment de la traduction anglaise de droit souple Soft Law . [...]

[...] Conseil d'État juin 2020, GISTI - Un acte de droit souple peut-il faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir en vue d'obtenir son annulation ? Au pays du Code napoléon et du droit administratif spécifique, le droit souple reste un sujet d'étonnement , André Autrand et Jérôme Bédier, rédacteurs en chef de L'ENA hors les murs . Une source d'étonnement certes, mais à la lumière de cet arrêt de Section du 16 juin 2020 GISTI du Conseil d'État, il ne fait aujourd'hui plus nul doute que le droit souple a aujourd'hui acquis une place certaine dans l'ordonnancement juridique français. [...]

[...] Illustration est faite de cette possibilité par l'arrêt Garde des Sceaux de 2014 du Conseil d'État qui entend connaitre d'un avertissement en milieu carcéral eu égard à sa nature et à ses effets sur la situation des détenus. Un dernier bastion d'incompétence du juge administratif semble néanmoins se déceler. C'est précisément le cas des actes de gouvernement qui demeurent encore marqués par une irrecevabilité du recours en excès de pouvoir. Néanmoins, en ce qui concerne par exemple les actes en lien avec la conduite des relations internationales, un acte détachable de celle-ci sera susceptible d'un recours en excès de pouvoir. [...]